A l'occasion du quatre-centième anniversaire de la naissance de
Blaise Pascal, l'auteur nous présente et nous commente quinze textes, principalement extraits des Provinciales et des
Pensées.
Des phrases souvent longues, tant chez
Pascal que chez l'auteur. Des mots qui reviennent dans chaque chapitre et qui donnent l'impression que
Pascal jongle avec eux : la vérité, le bonheur, la raison, la mort, le coeur, la foi, la volonté, la charité, la passion, l'éternité, la grâce... A force de les voir et d'en lire les explications, tout finit par s'emboîter, comme les morceaux d'un puzzle. Car, comme dans un puzzle, le premier essai est rarement le bon : les notions de
Pascal doivent être lues une deuxième fois, pour que leur sens soit compris.
En préambule, toute la pensée de
Pascal est irriguée par les "trois ordres" -le corps, la raison, le coeur- qui déterminent trois manières de penser et d'agir. Si les deux premiers sont humains,
Pascal affirme que le troisième est inaccessible sans la grâce : la charité, qui régit l'ordre du coeur, ne vient que de Dieu. J'ai noté ça et là quelques florilèges.
La vérité : nous la connaissons non seulement par la raison, mais encore par le coeur.
Le bonheur : nous sommes incapables de la vérité et du bonheur ; la quête du bonheur est pourtant la principale motivation des actions des hommes.
Pascal nous dit que seul Dieu peut combler le coeur de l'homme.
La raison : la raison est ce qui distingue l'homme de l'animal. "L'homme n'est qu'un roseau, le plus faible de la nature, mais c'est un roseau pensant".
La passion est, à l'inverse, "ce par quoi l'homme se rapproche le plus des bêtes" (page 139).
La mort : l'homme, conscient de sa finitude, sait qu'il va mourir ; mais comme il n'a pas le pouvoir d'y échapper, il se détourne de cette pensée par la recherche du divertissement. D'où l'affrontement permanent en lui de la volupté contre la volonté.
Le coeur est, justement, le siège de la volonté. Selon la formule
pascalienne bien connue, "le coeur a ses raisons que la raison ne connaît pas". Mais elle ne s'applique pas aux relations amoureuses. En effet, "la connaissance de Dieu, distincte des preuves philosophiques ou scientifiques, relève de l'ordre du coeur, qui est siège de la volonté et donc de l'amour" (page 107).
La foi : elle n'est pas d'origine humaine, mais se reçoit de la grâce de Dieu. Foi et confiance ont la même racine sémantique. Ainsi, si l'hostie devenait un morceau de chair humaine, Dieu s'imposerait à l'homme ; il n'y aurait donc plus de foi. Or, Dieu est caché, pour ménager la liberté de l'homme. "La foi est surnaturelle. Elle touche le coeur, qui est le siège de la volonté. Mais la raison reconnaît ce que la volonté a accueilli comme étant solide" (page 136).
L'éternité : "le temps de cette vie n'est qu'un instant, l'état de la mort est éternel" (page 148).
Pascal fustige les libertins, ceux qui ne cherchent pas Dieu et placent leur liberté individuelle au-dessus de tout (page 24), et leur indifférence face aux seules questions qui méritent vraiment d'être examinées.
La grâce : elle est première et nécessaire pour permettre à l'homme de faire le bien et d'obtenir la vie éternelle (page 171).
L'auteur rappelle aussi la nuit du 23 novembre 1654, où
Pascal connaît la célèbre "nuit de feu", au cours de laquelle il reçoit la certitude de l'existence de Dieu.
Eric-Emmanuel Schmitt reprendra l'expression pour décrire sa propre expérience spirituelle.
Enfin, un ouvrage sur
Pascal ne saurait oublier de mentionner son fameux pari. Selon
Pascal, l'homme n'a pas de raison de croire que Dieu existe vraiment, mais il a intérêt à y croire. En effet, si Dieu n'existe pas, le croyant et le non-croyant ne perdent presque rien. Par contre, si Dieu existe, le croyant -par une conduite consistant à diminuer ses passions- gagne tout, c'est-à-dire le paradis, tandis que le non-croyant va en enfer pour l'éternité. Ainsi, l'homme n'a rien à perdre à croire en Dieu, alors qu'il a tout à perdre en n'y croyant pas.
C'est un pari : s'il faut connaître les choses humaines avant de les aimer, pour pouvoir les aimer, les saints nous apprennent en effet qu'à l'inverse, les choses divines, il faut les aimer pour les connaître. On entre ainsi dans la vérité par la charité, ce qui correspond au combat de la volonté et de la volupté évoqué plus haut.
Lu dans le cadre de l'opération Masse critique.