Connaissez-vous les trois petits singes de la sagesse ? le premier se couvre les yeux, le deuxième la bouche et le troisième les oreilles. Ne pas voir, ne pas dire, ne pas entendre le mal. À celui ou celle qui suivra cette maxime il n'arrivera jamais rien de fâcheux dans la vie.
Dans cette nouvelle en deux partie de
Hiroko Oyamada il est question d'un
petit singe qui lui n'est pas très sage puisqu'il ne couvre aucune partie de son visage, bien trop gourmand et occupé qu'il est à grappiller des kakis dans le plaqueminier qui est situé dans le jardin des voisins du narrateur de cette bien curieuse histoire. Alors vous me direz que ce n'est pas commun de voir apparaître un
petit singe dans le fond d'un jardin d'un quartier résidentiel qui plus est situé en périphérie de la ville, un
petit singe, un bébé pas plus grand que Shima-kuma-chan l'ourson en peluche de la petite Su-chan, qui vous fixe de ses yeux ronds couleur gris cendre. Mais d'où a-t-il pu bien venir ? Des collines avoisinantes ? Échappé d'un zoo ou à la vigilance de son propriétaire ? Nul ne semble le savoir dans cette histoire. Je ne saurais moi-même vous dire mais une chose est certaine c'est que ce
petit singe intrigue, est au coeur de toutes les discussions dans le quartier car il a été aperçu par de nombreux riverains mais surtout il pousse soudainement notre narrateur à la réflexion sur le monde et ses travers, sur les moeurs japonaises, non sans une pointe d'amertume et d'inquiétude quant à l'avenir puisque ce papa et compagnon des plus attentionnés a aussi fait le choix d'une vie en union libre.
J'ai aimé le ton décalé de cette nouvelle. L'autrice nous décrit avec brio les détails du quotidien de ce jeune couple et nous invite à partager quelques repas en leur compagnie, jeune couple qui finalement, une fois passé l'effet de surprise, ne semble pas plus troublé que ça par la présence de ce
petit singe, ce qui par ailleurs confère à ce récit une tonalité délicieusement saugrenue. Pour ma part j'y ai vu un
petit singe malicieux qui observe la vie du haut d'un arbre à kaki et qui se dit que décidément les hommes passent un temps fou à se préoccuper de détails plus ou moins futiles mais c'est ce qui fait la vie non ? Car après tout comme dit le dicton : "un singe est un humain moins trois mèches de cheveux", il est un animal humble qui essaie simplement de ressembler aux hommes. Devrait-on se moquer de lui ? Ou de nous ? Saviez-vous qu'on met de l'oignon cru dans la salade de pommes de terre au Japon ?