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Critique de delangeais


Un bain de jouvence


Ce livre paru en 1980 sous le titre de Nicolas Gayoûle tient une place à part dans l'oeuvre de Jean-Pierre Otte. À un moment de son évolution, l'écrivain a voulu s'inscrire et se reconnaître dans une appartenance à un pays et aux personnages de ce pays wallon dont, en connivence, il partage les particularités, les caractères, les accents, les manières d'être. Il y a un désir qui s'arborise en nous au privilège d'un coin de terre qui en a reçu et favorisé les racines.

« À partir de mes paysages, confie-t-il, à partir de toutes sortes de points d'ancrage et d'appartenance, de connaissances et de reconnaissances, mon propre dessein, en y voyant les éléments d'une mythologie personnelle, était de me fabriquer des racines portatives, de m'enraciner dans la terre intérieure et d'errer de par le monde, en véritable sédentaire-voyageur, lequel, sur un fragment d'Héraclite, allait oublier où conduit le chemin, à l'exception du chemin qui le menait à lui-même. On voit bien que c'était une sacrée opération à réaliser concrètement et poétiquement en son for intérieur. »

Ce livre s'inscrit donc dans une histoire et un processus, et s'articule autour de la figure tutélaire d'un grand père, conteur et chansonnier, pour se développer par épisodes dans une vie comme irradiée, où les âmes pures côtoient les âmes damnées et où les faits et gestes sont tour à tour cocasses ou tragiques, éclatants, infâmes, mystérieux en diable.

Bouffées de fraîcheur et enchantements.Voilà un livre enchanté. Jean-Pierre Otte tend à chacun un petit miroir de poche où notre âme un moment se recueille et s'ennoblit, fait sourdre l'écho de sa vraie profondeur. Ce livre est à l'image de ce petit miroir. Seize chapitre, seize sujets, une fresque colorée écrite dans une langue claire, précise, drue, odorante, musicale. le livre s'ouvre comme on ouvre une fenêtre au soleil du printemps.

Comment retourner à Liège sans penser à ces «têtes de houille au fond de la Meuse», une vision populeuse et lyrique de la ville de son adolescence. Comment ne pas suivre avec un sourire amusé ce milicien campagnard qui entraîne ses parents sous les néons de certaines rues obscures à Cologne ? Comment ne pas considérer d'un regard neuf les vieux usages, les gestes du commencement, qui sont la beauté drue et la vérité même de la vie, comme la fabrication du pain, pendant que «la pâte lève, enfle d'une haleine extensible, comme un beau ventre enceint entre les hanches du pétrin»… Ainsi le présent se mêle au passé dans un coude à coude fraternel d'un Jean-Pierre Otte dressé à la croisée européenne des mutations et des migrations, planté dans son terroir mais accueillant à l'universel, Sentimental, admiratif, lyrique, truculent, complice, sarcastique, Jean-Pierre Otte est tout entier dans son livre. Le Nouvel Observateur l'a salué comme étant le premier écrivain à avoir donné à la belgitude ses lettres de noblesse.


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