Nulle et grande gueule

M. Parrish (le directeur du lycée) souriait de ce sourire crispé et plein d’espoir qu’ont les adultes quand ils veulent que vous croyiez quelque chose dont eux-mêmes ne sont pas sûrs à cent pour cent. Parce que si vous finissez par y croire, eux aussi pourront y croire. Peut-être.

Je le vis penser. Maintenant.
Je savais : c’est comme de plonger du plus haut plongeoir. Il faut que votre esprit vous y autorise. Votre corps veut survivre, il ne veut pas se jeter dans le vide. Jamais ! Il faut que votre esprit vous donne les ordres. Maintenant. Vas-y.

Avant, je marchais les yeux baissés, en espérant que si je ne voyais personne, personne ne me verrait (...)
(p. 113)

Au lycée, avec ses copains, je l’avais toujours trouvé plutôt superficiel. Il lançait des vannes, se forçait à rire plus fort que leurs plaisanteries ne le méritaient. La conduite typique d’un garçon dans un groupe. Mais seul avec moi, il était presque complètement différent.

Tu es mieux que "gentille", tu es quelqu'un de "bien". (p. 204)

Dans la bouche d'un sportif, il n'y a pas pire insulte que "pédé". On entend ça à tout bout de champ. A croire qu'il y a quelque chose dans ces syllabes qui excite ces types pour de bon, non ?
(p. 172)

[Elle] commençait à apprendre qu'il ne sert à rien de s'appesantir sur le passé, de remâcher des souffrances et des humiliations anciennes. (p. 324)

Depuis quelques temps, je ne supportais pas qu'on me touche. Même les contacts, les frôlements accidentels. Cela me rappelait les croche-pieds sur le terrain de basket, les coups de coude dans la poitrine, et l'équipe de Tarrytown autour de moi comme une bande de hyènes se préparant à la curée.

Toutes les petites filles [de quatre ans] qui prenaient des cours étaient vraiment adorables, et cela paraissait assez innocent de les former comme de "vraies" danseuses. (...) [Mais] la compétition comptait autant que la danse dans ces cours. Vous aviez beau être bonne, il pouvait toujours y avoir quelqu'un de meilleur. Le cauchemar, c'était que, dans une troupe de filles en concurrence, il fallait qu'une fille soit la moins douée. Il fallait qu'une fille soit juste un petit peu "trop grosse".
(p. 180)

Le bruit courait qu'il y avait eu une alerte à la bombe au lycée dans l'après-midi. Ou que l'on avait peut-être découvert une vraie bombe dans la cafétéria, ou ... dans la bibliothèque. Un garçon déclara qu'il avait entendu dire que la bombe - "une bombe artisanale" - avait été trouvée dans un placard du concierge, près du gymnase.

- "Quand ?" demandai-je d'un ton sceptique. "Dans ce cas, notre match aurait été annulé, non ? On aurait fait évacuer le lycée."

Mais personne ne faisait très attention à moi. Ils parlaient tous en même temps, le visage en feu. Des filles de Terminale nous rejoignirent avec cette nouvelle : elles venaient d'apprendre qu'un garçon, un élève de Première, était venu au lycée avec un pistolet ... ou une 22 long rifle ? ... ou peut-être une mitraillette, capable de tirer des centaines de balles en quelques secondes. Quelqu'un affirma avoir entendu dire que le garçon avait été arrêté, que des flics armés étaient venus le chercher en classe. "Des flics armés ? Ici ? Au lycée ?" Nous étions tous stupéfaits.