Ca m'arrange finalement que
Henri de Montherlant ait écrit, que dis-je ait raillé tolstoï sur son aspect misogyne. Voilà bien un grand esprit qui concentre sur lui bien des indignations pour lesquelles je m'élève qui s'expriment ça et là à propos du grand écrivain russe qui est mort, rappelons-le, en 1910, la présente chronique est datée de 1928. C'est dire que tolstoï n'était pas là pour recevoir ces amabilités, et quand bien même fût-il là, il n'aurait probablement pas répondu à leur auteur, tout simplement parce qu'il ne répondait jamais aux attaques qui touchaient lui et sa famille. Il n'avait cure officiellement de ce qui pouvait le blesser, même si ça le touchait quand il en avait connaissance, il n'en laissait point paraître, et n'observait que mépris à l'égard de ces esprits malveillants. On passera bien sûr sur l'élégance qui anime un grand auteur d'indisposer un confrère quand celui-ci n'est pas là pour répondre, posture peu flatteuse à vrai dire. C'est
Victor Chklovski dans sa docte biographie de tolstoï qui a réglé avec éloquence le compte à cette gente proférant des chikayas en disant ceci : "..Si l'on désire connaître la vérité, et non point donner la solution de disputes auxquelles la mort a depuis longtemps mis un point final".
Mon cher
Montherlant et grand esprit que vous êtes, vous avez trouvé dans l'oeuvre de tolstoï maintes preuves qui montrent sa misogynie ; on trouve maintes preuves dans l'oeuvre de tolstoï qui montrent le contraire. Et même vos preuves sont sujettes à caution quand on y regarde de plus près, il semblerait même qu'elles servent votre fait ! Alors pour la prochaine fois, épargnez tolstoï et sa famille, et évitez d'aller chercher dans les écrits de sa fille pour vous épargner la peine de tout lire et tout connaître de l'oeuvre du grand écrivain afin de vérifier le bien-fondé de vos propos. Mais je vous pardonne parce que vous êtes mort.
Concernant la fille de tolstoï, Tatiana, qui est son aînée, si elle a pris la plume c'est d'abord pour tordre le coup aux choses infondées concernant le couple légendaire, y compris des choses dans leurs journaux intimes respectifs qui n'étaient pas destinés à une consommation publique. Je n'y suis pour rien moi Monsieur de
Montherlant si elle avertit le lecteur en disant : " Si je suis sortie aujourd'hui aujourd'hui, c'est qu'il a paru certains livres, dus à des amis de mon père, qui donnent un tableau faux des relations de mes parents entre eux, et, de ma mère, un portrait déformé par la partialité. Dans ces livres, les faits relatés sont en général exacts, mais, pour reprendre une expression de notre
Nicolas Gogol, il n'y a rien de pire qu'une vérité qui ne soit pas vraie.
En ma qualité de fille aînée, j'ai jugé qu'il m'appartient de défendre la vérité. Je dois à la mémoire de mes parents de rompre aujourd'hui le silence. Douloureux devoir, certes, car il me faut révéler bien des choses qui, d'ordinaire, ne sortent pas du cercle intime de la famille.."
Ben oui, où allez vous mettre votre nez Monsieur de
Montherlant dans des choses qui ne vous regardent pas. C'est quand même drôle comme posture de se retrouver dans la situation de celui qui tire prétexte d'un témoignage de première main qui à priori le visait directement ?
C'est singulièrement drôle aussi de tirer généralité de la jeunesse dévoyée de tolstoï qui ne vous a pas attendu Monsieur de
Montherlant pour dire à qui voulait l'entendre, sauf vous naturellement, n'avoir rien fait de bon de sa vie jusqu'à trente ans. A part la littérature bien sûr !
Mais je vous pardonne Monsieur de
Montherlant, puisque vous prévenez votre aimable lecteur de "cette chronique qui ne vise pas à être plus qu'une chronique de journal". Si je vous traduis bien Monsieur, excusez du peu, vous descendez un peu de votre grand esprit pour vous mettre à la portée du lecteur de chronique qui appréciera, j'en suis sûr que le grand auteur que vous êtes sait varier ses effets selon qu'il s'adresse à l'élite ou à la populace !
Vous poursuivez, comme une teigne, en citant la période amoureuse de tolstoï avec sa femme Sophie en le prenant à revers sur un mot sibyllin tenu dans son journal intime (toujours !) quand il semble signifier un court instant se voir dépossédé de ses propres moyens à travers cette nouvelle vie d'homme marié où il n'aurait pu son libre arbitre ? Mon pauvre ami, je souhaite à tous ce grand malheur de connaître le parfait bonheur avec une grande dame comme Sophie qui lui aura permis de créer deux romans anthologiques qui ont fait et font encore le tour du monde, un siècle et demi plus tard. Dois-je vous apprendre "Monsieur" que tolstoï s'est marié à 34 ans et que si vous ne comprenez pas qu'après un célibat qui commençait à lui peser il ait éprouvé le besoin de souffler un peu dans sa nouvelle vie, je ne peux pas faire grand chose pour vous malheureusement !.
Je crains que vous n'ayez des lubies comme le grand philosophe
Lichtenberg dans ses pires moments effrontés, Monsieur le grand esprit français, car à vous lire pour le reste oui vous savez là aussi graduer vos effets, le plus déplorable est à venir ..