Citations sur Auteur de crimes (15)
Ce n'était pas la première fois que Markou se trouvait face à un assassin. Et sûrement pas la dernière. Il n'avait pourtant jamais ressenti une chose pareille. Ce n'était pas de la peur, mais un froid, un léger frisson, comme si son propre corps l'alertait, lui disait de rester sur ses gardes. Une sensation proche du cauchemar, un mélange d'inquiétude et de curiosité, une douce terreur devant quelque chose qu'on sent arriver sans pouvoir faire quoique ce soit pour l'arrêter.
Exactement comme un whodunit. L'auteur ne peut pas mettre tous les indices bien en vue pour mâcher le travail du lecteur. Il ne les livre qu'en désordre, petit à petit, cachés derrière des détails insignifiants. Tous les éléments sont là, mais il faut réfléchir pour les relier entre eux. Si le lecteur n'y arrive pas, tant pis pour lui. A la fin il s'écrira : " J'avais tout sous les yeux, comment ai-je pu ne pas voir ?".
J'ai compris qu'à toutes les Kim Kardashian du monde, je me devais d'opposer la vérité de l'art authentique, de la vie authentique telle que la représente la littérature. Et les romans policiers ne sont-ils pas les mieux placés pour montrer cela ?
"Ils ne s'intéressent à rien ni à personne en dehors d'eux-mêmes. Tout le reste n'est que prétexte. Les gens et les situations ne sont rien que des outils - ou des obstacles- en vue d'atteindre leur but. "
Que le polar, ce n'est pas de la vraie littérature, mais du trash.
Markou se rappela la couverture du livre Meurtres en majuscules de Sophie Hannah. Sur fond turquoise, des boutons de manchette étaient ornés du profil d'Hercule Poirot. Sophie Hannah avait osé ressusciter le célèbre détective belge, qui, d'après le critique du New York Times, « n'aurait pu tomber dans de meilleures mains ».
« Hercule Poirot pourtant refusait qu'on le touche, encore moins que l'on s'empare de lui », s'était dit Markou en lisant la critique. Confier le détective légendaire à d'autres mains que celles de sa créatrice était pour lui sacrilège.
Il avait coutume de ranger ses livres par ordre de lecture, non par auteur ou par période, donnant ainsi à sa bibliothèque une apparence chaotique.
Il avait fini par lui promettre de l'accompagner à la prochaine séance de son club de polar, qui se tenait ce soir-là et qui était consacrée à un auteur danois. Ce, même s'il goûtait peu les polars scandinaves. Trop noirs, trop violents. La vie réelle était déjà bien assez glauque.
Si tout cela n'était qu'une fiction, s'il n'était pas un policier en chair et en os mais le héros d'un roman, s'il n'avait pas de comptes à rendre à sa hiérarchie et aux médias, mais à des lecteurs assoiffés de suspense, le second meurtre aurait eu son utilité. Comme disait Agatha Christie à travers son porte-parole, Hercule Poirot: « Un second meurtre dans un livre le rend plus intéressant. Si le premier meurtre a lieu dans le premier chapitre et qu'ensuite se succèdent des interrogatoires de témoins et des contrôles d'alibis jusqu'à la dernière page, la lecture peut devenir lassante. »
Feuilletant le livre, Markou était tombé sur une phrase de Poirot : « Il faut prendre les fous au sérieux. Ce sont des gens très dangereux ». Il aurait bien aimé que le célèbre détective belge vienne l'épauler. « Un autre ensemble de petites cellules grises ne serait pas de trop ».