C'est sa raison qui cèdera la première, pareille à une bougie trop longtemps privée d'air.
- Il s'est effacé de nos mémoires. N'oubliez pas nos courageux jeunes... Tu parles. leur nom, ce qu'ils aimaient faire, la façon dont ils se comportaient. Tout s'efface. On ne se rappelle rien.
Louis se tortille sur le perron, gagné par un malaise croissant.
- Ce n'est pas possible, murmure-t-il. Ça n'a pas de sens.
- Si je pars, je disparaîtrait comme eux.
Elle retourne à sa solitude comme on enfile un manteau trop grand : elle flotte dedans, perdue et triste.
- J'ai l'impression que tout est faux.
- Pas nous. On est vrais, nous.
- Oui. On est vrais nous.
Il va se confronter à la vraie vie, celle où il peut se perdre, celle où il peut tomber...
Elle n'arrivera jamais à s'enfuir. Jamais. Et cette certitude la laisse sans courage, sans volonté, sans armes...
Rien de cette vie ne lui suffit. Il aspire à tellement plus...
Elle et les autres sont libres de passer dans sa vie tels des fantômes qui le frôlent. Tant que personne ne prend la peine de lui adresser la parole, c'est comme s'il restait seul dans ses ténèbres, derrière un mur de silence...