"Je faisais ce rêve, adolescent
Je m'éloignais de la clairière
Plus j'avançais, moins j'y voyais clair."
Enfants, Neil et Éva aimaient se perdre dans la forêt..
"Le rêve avait viré cauchemar
Puisque personne, personne, ne me cherchait."
Mais, le monde a vacillé, comme la flamme d'une bougie. Plus d'essence, plus d'électricité, ni de transports.
Des rumeurs courent sur l'effondrement de la Civilisation, les gens fuient où se terrent..
"Parmi ce peuple indifférent
D'arbres, de feuilles, de vent
J'avais perdu ma propre trace."
Les parents sont morts. Et dans la forêt profonde, l'homme est redevenu un loup pour l'homme. Des bêtes sauvages! Un de ces prédateurs va rôder autour de la cabane des adolescentes et ravir son innocence à l'une d'elles...
"Dans cette forêt, j'y suis encore
De cette forêt, est-ce qu'on en sort? Bénabar, Dans la forêt.
Il va falloir vivre autrement, grandir et se battre. Apprendre à faire confiance en la Forêt environnante, emplie d'inépuisables richesses...
Seul, le métronome qui bat la mesure, permettra à Éva d'avancer, de danser et de vivre!
Il y a eu le livre, le film "Et into the forest", en 2015 puis cette BD avec de beaux dessins... Il était une fois une forêt... où les fins heureuses n'existaient plus..."
Once upon a Time.
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Comment passer d'un coup de coeur littéraire à son adaptation en bande dessinée ?
Le risque est toujours grand au détour du chemin. Dans la forêt, c'est en effet pour moi l'histoire d'une magnifique rencontre avec l'univers romanesque d'une autrice que je découvrais pour la première fois, Jane Hegland.
L'auteur de BD, Lomig, - cette fois-ci c'est lui que je découvre, relève avec brio le défi.
Le récit narratif original est ici totalement respecté, un récit d'anticipation dystopique saisissant. Plus qu'un monde en perdition, c'est une civilisation qui s'effondre, à aucun moment on ne sait pourquoi.
Elles s'appellent Nell et Eva, elles sont deux soeurs de dix-sept et dix-huit ans. Elles sont livrées à elles-mêmes, coupées de tout contact avec le monde par la disparition des télécommunications et la pénurie de carburant.
L'histoire va se saisir de leur destin, deux jeunes filles désormais sans leurs parents depuis que le père parti chercher des nouvelles, des renforts, des ressources, ne donne plus signe de vie ; alors elles vont tenter de résister tant bien que mal à ce qui se passe autour d'elles, repliées, isolées dans leur maison en pleine forêt, en attendant un hypothétique retour à la normale. Privées de ressources, elles vont devoir les puiser en elles-mêmes et dans la forêt qui les environne... Deux soeurs qui vont donner sens à leur sororité pour affronter les menaces et les hostilités qui viennent et se rapprochent peu à peu d'elles, tenter à elles seules de réinventer un autre monde pour survivre.
Comment transcrire les mots qui portent l'émotion d'un récit en planches de BD ? Comment garder intact l'imaginaire venu des mots, le réinventer peut-être ? Poser des images, dessiner cette forêt, cette maison, ces deux soeurs, leurs émois, leur étonnement, les rencontres qu'elles font, leur doute, leur effroi, la joie parfois qui les étreint, un bonheur fugitif qui traverse les pages avec de la lumière comme un coin de ciel qui viendrait se poser brutalement dans le nid d'une clairière. J'ai aimé me laisser prendre dans la force douce et paisible du paysage qui m'enveloppait, j'ai vécu cette paix qui était en moi, même si je savais qu'elle était fragile et éphémère peut-être...
Cette adaptation est pour moi une réussite.
Le dessin de Lomig, les mots, des planches en noir et blanc d'une puissance d'évocation lumineuse que je découvre ici respectant le propos initial, tout est ici au rendez-vous. Quel bonheur !
Concrètement, ce sont des visages où se dessinent la joie, la naïveté, la peur, l'espoir ; ce sont des gestes qui apprennent, qui apprivoisent les événements ; ce sont des corps qui s'éprennent du bonheur qui passe, apprivoisent des gestes nouveaux pour survivre, partager, aimer ; ce sont des images sensorielles qui captent l'immanence de l'instant.
Toutes ces scènes sont saisies par un merveilleux trait de crayon, fin, ciselé, éblouissant...
J'ai été conquis par ce récit saisissant la beauté des décors et la délicatesse des traits, en particulier dans la vaste palette des émotions représentées.
Le sentiment de malaise qui m'a saisi dès les premières pages ne m'était pas inconnu, il contribue à créer un univers insolite, à la fois familier et étrange. L'histoire alterne entre des passages sombres et des moments de grâce.
Le dessin délicat de Lomig colle à merveille avec le récit, un trait épuré nous offre des personnages touchants, il saisit avec justesse leurs émotions. C'est doux par moments, c'est tragique à d'autres moments et cela reste beau tout le temps.
Ce récit, pour moi, prend aujourd'hui plus que jamais l'allure d'un plaidoyer implacable, posant une humanité fragile en face d'un monde en déliquescence, pour ne pas dire une civilisation en perdition, plaidoyer revendiquant un autre monde...
Ces retrouvailles avec ce récit m'ont touché, d'autant plus que j'ai rencontré il y a quinze jours l'autrice Jane Hegland dans ma librairie préférée, venue nous parler d'un autre livre, Rappelez-vous votre vie effrontée, mais nous révélant au passage un petit scoop : elle écrivait une suite à son roman d'origine, Dans la forêt. J'allais enfin retrouver Nell et Eva...
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Au fond de la forêt, Eva et sa soeur vont devoir vivre par leurs propres moyens. Les moyens du bord, quand on n'a plus ni électricité, ni réserves de nourriture, ni personne à qui parler, qui finalement les ramènent aux valeurs premières.
J'ai beaucoup aimé la version graphique de ce roman dystopique où la beauté de la forêt, les personnalités attachantes des deux soeurs, leurs rapports entre elles et à la nature sauvage, parfois âpre, sont parfaitement rendus par les dessins dans une nuance de gris de Lomig. D'autant plus que cette version fidèle au texte d'origine en évacue les quelques longueurs. Une belle réussite !
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Le lecteur est conquis par ce récit saisissant, la beauté des décors et la délicatesse des traits, en particulier dans la vaste palette des émotions représentées. Le récit intrigant distille un sentiment de malaise dès les premières pages, qui plantent un univers insolite, à la fois familier et étrange.
Lire la critique sur le site : ActuaBD
Ce huis-clos en pleine nature [...] est formidablement tenu par Lomig (Le Cas Fodyl), qui, avec son crayon fin et ultra-sensible, ne s’économise pas dans le dessin des arbres, des nuages et du vent dans les feuilles, autant que dans les postures et les regards toujours signifiants.
Lire la critique sur le site : BoDoi
- C’est les cerfs qui vont se régaler !
- Eh non, gros malin... Dans le livre il est écrit qu’ils ne mangent pas les tulipes.
- Ah bon ? Eh bien, j’espère qu’ils ont lu le même bouquin que toi.
Je sentais quelque chose d'autre...
partout autour...
une chose que je n'avais encore jamais remarquée...
une force douce et paisible qui m'enveloppait toute entière.
C'était comme si la forêt m'enlaçait telle une mère avec son enfant. Je me laissais aller...
sans résistance, aucune, et le coeur infiniment calme.
C’est ainsi qu’Eva s’est mise à danser au rythme implacable du métronome. Elle a appris à convoquer sa propre musique. C’était comme si sa nature sauvage luttait pour sortir.
Je me surprends même parfois à entendre la musique sur laquelle elle danse.
Finalement l'électricité n'aura été qu'un accident passager d'à peine deux siècles, autant dire une poussière de temps à l'échelle de l'Histoire de notre monde.
(Nell se remémorant un des derniers mois de leur vie dans un monde encore normal - p25)
L'idée me vient maintenant qu'elle avait peut-être besoin de nous parler de sa mort, qu'elle sentait proche.
Mais je crois que je n'était pas prête à l'entendre et encore moins à exprimer ce que je ressentais... De peur que mon chagrin et ma rage se déchaînent et ne nous tuent tous.
Lomig - Au coeur des solitudes