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EAN : 9782870277829
212 pages
Complexe (16/10/1999)
4.5/5   1 notes
Résumé :

Les États-Unis, maîtres du monde ? La réponse est oui, dirait Benjamin Barber, conseiller de Bill Clinton... Nous pourrions en rester là, mais c'est plus compliqué. Les Américains sont-ils devenus, après la chute du mur, cette superpuissance unique qui s'impose à la terre entière - et c'est une "première" dans l'histoire de la planète - un peu par hasard, un peu malgré eux, à cause de la d&... >Voir plus
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Cet ouvrage rassemble les contributions aux 9e carrefours de la Pensée, organisés au Mans en décembre 1998. Tenu au lendemain du déclenchement des frappes aériennes en Irak, mais avant le lancement de l'opération « Force alliée » au Kosovo qui en confirmera les conclusions, ce colloque fait le constat peu discutable de l'unilatéralisme des États-Unis, « puissance hégémonique unique à l'échelle de la terre tout entière » (Paul-Marie de la Gorce, p. 27).

Les États-Unis sont devenus la nation « indispensable », sans laquelle rien ne se fait. C'est vers eux que sont dirigés, avec d'autant plus de succès que leur situation menace les intérêts américains, les « appels d'empire » lancés par les pays en guerre. Or, si durant la guerre froide, n'importe quel conflit était peu ou prou instrumentalisé dans le « grand jeu » américano-soviétique, la disparition de l'URSS et la mondialisation ont pour effet paradoxal de laisser à l'écart des zones entières de la planète. C'est le cas de l'Afrique où, leurs intérêts vitaux n'étant pas menacés, les États-Unis ne cherchent guère à intervenir.

La domination américaine s'exerce dans tous les domaines. Elle utilise les ingrédients traditionnels de la force militaire.
Elle fait de la mondialisation son alliée pour pénétrer tous les marchés de la planète. Enfin, elle maîtrise toutes les dimensions du « soft power » (médias, informations, produits culturels) pour « transformer le monde en une espèce de parc à thème mondial, un Euro-Disney global qui diffuse le style de vie et les symboles de la culture américaine » (Benjamin Barber, p. 20).

La question se pose de savoir qui est à l'origine de ce mouvement. Henry Lelièvre et Alain Gresh affirment : « Cette hégémonie américaine n'a rien d'involontaire, elle résulte d'une politique très intelligente et depuis longtemps concertée » (p. 206). Cette obsession du complot ne convainc guère. Plus proche de la réalité est la présentation de Norman
Spinrad qui voit dans la domination américaine une « hégémonie involontaire » : « Rien qui ressemble à un impérialisme culturel américain puisqu'il n'y a rien qui ressemble aux États-Unis à la moindre politique culturelle » (p. 109). Pour lui, l'américanisation de la culture est un effet incident de l'ouverture des marchés sur une planète anglophone. Benjamin Barber
ne dit rien d'autre dans sa présentation de « Mc World » : « Ce n'est... pas exactement un pouvoir américain mais plutôt le pouvoir de la sensibilité américaine partagée par tous... C'est une hégémonie qui trouve son origine en bas plutôt qu'en haut » (Barber, p. 20).

Qu'elle soit volontaire ou non, l'hégémonie américaine durera-t-elle ? Deux facteurs doivent être pris en compte. D'abord, les faiblesses intrinsèques des États-Unis. Les contributions sont nombreuses, de Loïc Wacquant sur le système pénitentiaire, d'Éliane Elmaleh sur le féminisme, d'Éric Klinenberg sur le renchérissement médiatique, qui éclairent l'envers du « rêve américain ». La plus magistrale est celle de Serge Halimi qui, en 10 pages, instruit sans appel le procès de la réussite économique américaine : « si le taux de chômage officiel a diminué... les inégalités de revenu et de salaire ont augmenté » (p. 39). Ce déclin intérieur avait, à la fin des années 80, nourri le pessimisme d'un Paul Kennedy. Il n'est plus aujourd'hui de mise, avec la reprise de la croissance et la décrue du chômage. Mais si l'économie américaine, en apparence du moins, semble mieux se porter, le « modèle américain », nous disent les participants au colloque du Mans, est gravement mis en cause.

L'autre danger pour l'hégémonie américaine vient de l'émergence de puissances alternatives. Ainsi que l'on pouvait s'y attendre, cette dimension est l'occasion de réfléchir à l'émergence d'une Europe-puissance. C'est l'objet notamment des interventions de François Fillon et Raymond Douyère. Pour l'heure, toutefois, « nul ne voit à l'horizon se lever le moindre rival : la Russie est à terre, l'Europe est encore déliquescente. Quant à l'Asie et au Japon, ils sont embourbés pour un bon moment dans leur crise économique tandis que la Chine n'est pas encore prête à jouer un tel rôle » (Lelièvre, p. 209).

Le propos est globalement critique. Parfois avec excès. On y reconnaît la ligne éditoriale du Monde diplomatique qui co-organisait ce colloque. Aussi n'est-il pas mauvais de rappeler, ainsi que le fait François Fillon, que les États-Unis sont souvent « un bouc émissaire ou un repoussoir facile » (p. 189). La France s'est fait une spécialité de dénoncer l'impérialisme américain. La guerre au Kosovo l'aura encore montré. Cette posture confortable méconnaît les qualités intrinsèques du modèle démocratico-libéral américain qui, à tout prendre, ne vaut pas moins que le communisme planificateur.
Et elle fait l'économie d'une réflexion autonome sur nos propres impuissances.
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