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EAN : 9791097079895
320 pages
EDITIONS DU DETOUR (21/10/2021)
4.21/5   7 notes
Résumé :
Depuis le début de l'humanité, nous inventons des récits, les mythes, pour mieux comprendre notre monde. Jean-Loïc Le Quellec les collecte, les étudie, les compare, à toute époque même la plus reculée, dans tout peuple, dans autant de langues que possible.
On explique l'universalité des mythes aujourd'hui par une transmission au fil des migrations. Cette diffusion n'est pas systématique, elle se fait ou pas, ou de différentes manières, dessinant ainsi les évo... >Voir plus
Que lire après Avant nous le déluge !Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Où, ailleurs qu'ici, peut-on espérer apprendre que le mythe anthropogonique par coroplastie a vraisemblablement remplacé dans le nord de l'Eurasie, juste après le dernier maximum glaciaire, celui dit de l'Émergence primordiale !? Eh bien, cette supposition, susceptible à priori, dite comme ça sans préparation, d'en indifférer plus d'un, Jean-Loïc le Quellec parvient au contraire à nous en émerveiller ! Son écriture est claire, limpide, tout est parfaitement expliqué, chaque terme soigneusement défini. L'auteur fait d'un sujet d'un abord en apparence difficile une lecture accessible et véritablement passionnante.
J'ai en effet beaucoup apprécié ma lecture de cet ouvrage reçu dans le cadre de la Masse critique de février. Je remercie d'ailleurs Babelio et les éditions du Détour, que je ne connaissais pas. Après une petite visite sur leur site, j'ai noté plusieurs ouvrages qui peuvent encore m'intéresser !
Absolument passionnant, donc ! L'anthropologue Jean-Loïc le Quellec étudie dans cet ouvrage l'émergence et la diffusion des mythes de l'humanité, notamment en analysant la répartition à la surface du globe de leurs mythèmes (leurs motifs) et de leurs "écotypes" (leurs variantes).
Si j'ai adoré l'ensemble, j'ai néanmoins trouvé le premier tiers, consacré à une approche historique des disciplines de la mythologie et de l'anthropologie, quelque peu rébarbatif. J'avoue et confesse avoir sauté là quelques paragraphes. Mais on y suit quand même, ce qui m'a intéressé, l'évolution globale de la pensée et de la recherche occidentale dans ces domaines, toujours imprégnées, au début du moins, on peut s'en douter, d'un sentiment de supériorité, servant des intérêts colonialistes, justifiant le mépris. Il semble qu'en Europe on ait passé beaucoup de temps à juger et critiquer l'irrationalité et les contradictions dans les croyances "naïves" des "peuples primitifs", sans savoir remarquer toutes celles attachées à notre religion chrétienne, considérées pourtant comme la seule et unique vérité, par nous qui sommes "civilisés".
En ce sens, l'essai dont il est ici question est aussi (surtout ?) une invitation à changer nos points de vue. Il nous interroge sur nos réflexes ethnocentriques, européocentrés. Par exemple, peut-on, pour commencer, employer le terme de "religion", comme chez nous, pour évoquer le système de croyances des Aborigènes d'Australie ou des peuples anciens ? Est-ce une notion universelle ? Notre premier mouvement étant toujours d'interpréter à partir des principes, des valeurs qui sont les nôtres, qu'on a intériorisés, il apparaît essentiel de s'ouvrir, de connaître d'autres cultures que la nôtre, d'effectuer "un pas de côté" pour concevoir toute cette variété et même se connaître mieux soi-même, en nous débarrassant "des prénotions qui encombrent trop souvent nos jugements". Les communautarismes notamment pourraient naître de cette fermeture, de cet hermétisme à l'altérité, qui nous pousserait à considérer notre propre culture comme étant la "seule valable".
Ce livre est une véritable enquête. le Quellec nous partage en premier lieu l'état de ses investigations sur le mythe particulier dit du Plongeon cosmogonique (un être, souvent un animal, plonge dans l'Océan primordial et remonte à la surface avec un peu de vase ou de sable, à partir desquels il crée la terre). Fort de ses recherches, et s'appuyant sur la méthode de l'aréologie (étude des aires de répartition des faits culturels - longtemps décrédibilisée par l'utilisation nauséabonde qu'en ont faite partisans du système colonial et plus tard les nazis pour renforcer leurs théories racistes en établissant des distinctions entre "peuples civilisés" et "peuples inférieurs", mais réhabilitée aujourd'hui), il contredit l'hypothèse des archétypes de Carl Jung, selon laquelle les mythes seraient des constructions universelles, parce que l'esprit humain a partout la même structure et par conséquent inventerait partout, instinctivement, les mêmes histoires, pour soutenir au contraire que leur diffusion résulte de processus historiques, qu'elle est liée à des millénaires d'échanges et d'influences entre les sociétés humaines.
Après s'être intéressé particulièrement aux mythes anthropogoniques (création de l'homme) et à celui du Déluge, l'auteur termine en parlant de nos "mythes contemporains". Cette partie est plus politique. On apprend que les principes et les mécanismes d'invention et de constitution des mythes sont exactement les mêmes qu'il y a 20 ou 30 000 ans. Que c'est le même "bricolage" caractéristique de la pensée mythique. Ainsi de ce que l'on appelle le New Age, sorte de religion "à la carte", composée tout à la fois d'astrologie, de chamanisme, de spiritisme, de physique quantique, etc. Cette réception qu'on pourrait dire composite se retrouve finalement aussi dans les religions constituées, comme le catholicisme ou l'islam ; on les accepte rarement en bloc, seulement ce qu'on juge participer de notre bonheur individuel. Ainsi également des diverses interprétations sur de prétendus secrets contenus dans les pyramides de Gizeh, sur la venue dans un temps très ancien d'extraterrestres, sur de prétendus restes retrouvés de l'Arche d'alliance... C'est encore vrai pour les "mythes politiques" (tel grand homme a une ascendance divine, telle population voudrait nous grand-remplacer...), par lesquels certains cherchent encore à justifier l'état actuel du monde ou à légitimer une action, un pouvoir politique ou une vision du monde.
La fabrication des mythes, "par bricolage", sert donc moins à expliquer qu'à justifier et à donner du sens. C'est pourquoi, semble-t-il, le mythe ne souffre pas ou très peu quand on lui oppose des faits et de la rationalité. Peut-être même, au contraire, qu'à notre époque où la science est toute-puissante (d'aucuns la prétendent même totalitaire), où elle désenchante d'une certaine façon le monde, où l'on meurt simplement, sans espoir de salut ou de renaissance, peut-être est-il naturel d'assister en réaction à un rejet de la science de plus en plus ferme, pouvant prendre la forme de scepticisme, d'interprétations alternatives plus ou moins romantiques, de complotisme, et qu'on cherche finalement à renouer avec un merveilleux du monde et de notre petite vie individuelle... Bon, je mêle mes propres réflexions à ce que j'ai pu lire et qui m'a inspiré.
L'ouvrage, enfin, est riche de nombreuses cartes et de dizaines d'extraits de mythes, recueillis au fil du temps par des missionnaires, explorateurs et scientifiques. Certains sont très poétiques. On l'aura compris, je suis ravi de ma lecture que j'ai trouvée très accessible. Plusieurs chapitres sont véritablement passionnants. Je recommande à tous ceux qui sont épris de mythologie en-soi, si on peut dire, ainsi qu'à ceux s'intéressant à leur dimension sociale et politique.
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Suis-je compétente pour rédiger cette critique ? Je ne suis ni linguiste, ni anthropologue, ni ethnologue, ou que sais-je encore… et rien ne me prédisposait à lire « Avant nous le déluge ! L'humanité et ses mythes » de Jean-Loïc le Quellec, qui aborde l'émergence des mythes, ainsi que leur dispersion depuis nos origines.
C'est pourtant avec un grand intérêt que j'ai dévoré cette « petite » brique qui ne s'est pas révélée si indigeste qu'elle ne m'avait paru au départ, car non seulement j'en ai retiré pas mal d'enseignements, mais cette lecture m'a également permis d'accroitre ma capacité d'observation et de recul. J'en suis ressortie avec une perception de notre monde contemporain (surtout avec les événements de ces derniers jours) non pas différente, mais sûrement plus nuancée, plus prudente, voire plus subtile.
Dire que cette lecture fut jouissive (tel que l'indique la 4ème de couverture) ne fut clairement pas mon cas. Soyons honnêtes. Certains passages me parurent particulièrement longs et ennuyants. Un exemple pour que vous me compreniez (lol) : À propos des oiseaux aquatiques migrateurs… « Ils migrent alors en suivant la Voie lactée, dite Lodde-raiddaras en same, linnunrata en finnois et linutee en estonien, toutes appellations qui se traduisent par « le chemin des oiseaux », mais on dit aussi kapk komba koma en mari et zozek-tuj en komi, c'est-à-dire « chemin des oies sauvages » ou encore Uj-xul minna l'ox, « chemin des oiseaux aquatiques » en vogul, etc. » Évidemment, l'auteur fait preuve (et parfois étalage ici) de son immense niveau d'expertise dans son domaine privilégié. D'autres que moi (entendez « moins ignares ») y reconnaitront un de leurs pairs.
Mais pourquoi n'ai-je pas raccroché dès lors, pensez-vous ? C'est que l'intelligence des constatations et des réflexions de le Quellec ne peut que nous interpeller, voire nous remettre à notre place. Ainsi lorsqu'il décrit notre cartographie et notre vision européano-centrée : « le propre de l'ethnocentrisme étant de se voir soi-même au centre du monde, sur une telle carte, nul ne s'étonne en France de voir ce pays placé tout juste au milieu, alors que cette position est tout-à-fait arbitraire. »
Ce livre dépasse ensuite largement l'explication de l'universalité des mythes car il va bien au-delà de la thématique annoncée. « Avant nous le déluge ! » nous amène à considérer notre monde d'aujourd'hui sous le regard de son auteur observant et constatant que certaines personnes, certaines organisations puisent dans des anciens textes sacrés des éléments susceptibles de nourrir leur propre idéologie. Ainsi : « À mesure que passent les années, ce type de processus a présidé à la naissance de divers mouvements qui, à priori, ne semblent pourtant présenter rien de commun les uns avec les autres, comme la scientologie, Hare Krishna, le satanisme, la néo-sorcellerie ou le néo-paganisme de tendance Wicca. Mais la liste pourrait s'allonger, n'en déplaise aux uns et autres, jusqu'à inclure des organisations fondamentalistes, racistes, d'extrême droite, ou islamistes. »
Pour conclure et répondre à ma question initiale, j'espère n'avoir pas déformé les propos de Jean-Loïc le Quellec, ni les avoir réduit à quelques citations. Si tel devait être le cas, veuillez pardonner ma faible compétence à construire une chronique objective et élaborée. Je voulais simplement vous dire que cet ouvrage s'adresse aux initiés aussi bien qu'à tout un chacun, soucieux de mieux percevoir notre humanité.

Lien : https://memoiredeliseuse.odo..
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Difficile de faire la critique d'un livre que l'on peine à terminer. Reçu dans le cadre de la Masse Critique, le résumé m'avait pourtant paru alléchant. Même si le sujet m'intéresse beaucoup, je n'ai pas réussi à finir ce livre qui m'a paru trop compliqué. J'avais pourtant choisi celui-ci car je venais de terminer La traversée des temps, tome 2 : La porte du ciel, qui romance les grands mythes fondateurs de nos civilisation, et je voulais donc une analyse plus scientifique. D'où viennent les mythes ? Comment se construisent-ils ? Comment se fait-il que l'on retrouve dans des civilisations éloignées dans le temps et géographiquement, des similitudes de croyance et des histoires semblables. Les réponses à ces questions, voilà ce que cet ouvrage nous promet.
L'auteur nous abreuve de moult histoires, ce qui ne rend pas la lecture aisée, même si ce qu'il écrit est passionnant. Il semble maitriser parfaitement son sujet, mais peine à le rendre accessible.

Difficile pour moi d'avoir un avis, donc. Un contenu assez pointu. Je ne pense pas le terminer pour l'instant, mais j'y reviendrai probablement dans un moment.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
À propos de Jake Angeli (l’activiste de l’assaut du Capitole en 2021) : « Parmi ses tatouages, on reconnait le marteau de Thor, appelé Mjölnir dans la mythologie nordique et adopté comme signe de reconnaissance par les partisans du suprématisme blanc. Sur sa poitrine, un autre tatouage représente l’Yggdrasil, l’immense frêne « arbre du monde » qui, dans la mythologie nordique, porte à son sommet l’aigle Vidofnir (tout comme le Turul est posé au sommet de du Vilagfa, l’arbre du monde de la mythologie hongroise). Cette image de l’Yggdrasil est reprise aujourd’hui comme marqueur identitaire par les païens d’extrême droite. Au-dessus de ce tatouage, Angeli en porte un autre : le valknut, qui confirme, précise et renforce les symboles précédents. Un symbole pris isolément, risque toujours d’être mal interprété, mais l’association de trois d’entre eux permet de délivrer un message beaucoup plus clair, à savoir l’appartenance au wotanisme, dont le valknut est la marque. »
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En popularisant, au début des années 1960, la notion de "pensée sauvage", Claude Lévi-Strauss a clairement établi qu'il ne s'agit certainement pas là d'une caractéristique propre aux "sauvages", contrairement à ce que l'Occident avait longtemps imaginé. Non : il s'agit d'un mouvement de l'esprit humain en général. (...) En effet, connaître les causes matérielles et rationnelles d'un événement n'empêche pas de pouvoir leur ajouter un supplément de cause immatérielle, proprement mythique. C'est même ce que font tous les peuples du monde, y compris les Occidentaux.
Les grandes épidémies furent imputées à la colère divine (Deus Irae) et, par exemple, lors de la peste de 1729, à Marseille, l'évêque Henri-François-Xavier de Belsunce déclara en chaire que "Dieu irrité veut punir les péchés du peuple (...)". Suivant une approche encore fréquente, on pourrait comprendre cette explication par le châtiment divin comme relevant tout simplement de l'ignorance, puisque l'épisode se situe bien avant la découverte du bacille responsable de cette maladie (...). Mais que vaut cette explication quand on constate qu'avec l'épidémie de Covid-19 s'est répandue l'idée que "la nature se venge" des excès commis par l'humanité ? Après l'apparition de ce nouveau virus, on a rapidement vu se multiplier les déclarations évoquant la "vengeance de Gaïa" (...). Pourtant, le génome complet de l'agent pathogène fut très rapidement séquencé, ses variants identifiés et pistés, sa façon de se propager reconnue et des vaccins efficaces mis au point en un temps record. L'explication mythique par la "vengeance" de la nature, de Gaïa, des forces vitales ou du pangolin (!) n'est donc pas attribuable à l'ignorance, et cet exemple suffit à montrer que le propre du mythe ne tient pas au fait qu'il serait une pré-science, qu'il donnerait une explication du monde erronée parce qu'en attente de la véritable compréhension scientifique. Non, le mythe n'est pas une explication : il ajoute du sens.
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Le propre de l’ethnocentrisme étant de se voir soi-même au centre du monde, sur une telle carte, nul ne s’étonne en France de voir ce pays placé tout juste au milieu, alors que cette position est tout-à-fait arbitraire.
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Videos de Jean-Loïc Le Quellec (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jean-Loïc Le Quellec
Les mythes "partagent tous une structure commune : ils décrivent un ordre ancien du monde et racontent un bouleversement qui survint ; ce qui explique l'état actuel des choses", nous dit Jean-Loïc le Quellec dans "Avant nous le déluge ! - L'humanité et ses mythes", (Editions du Détour, novembre 2021).
Parcourant l'histoire des mythes, depuis les récits cosmogoniques qu'on peut faire remonter au dernier maximum glaciaire jusqu'aux mythes plus récents émergés autour de l'épidémie de Covid-19, Jean-Loïc le Quellec s'intéresse aussi à leur transmission, leurs migrations, et tout ce qu'ils peuvent nous dire des communications entre groupes humains en des temps très reculés. Propre à l'homme, le mythe est donc à l'origine une histoire explicative.
+ Lire la suite
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