Livre lu dans le cadre de l'opération Masse critique de février 2022. Merci à Babelio et aux Éditions du Détour.
Stéphanie Lamy est chercheuse, spécialiste des guerres de l'information. Son travail comme essayiste marche main dans la main avec son militantisme féministe, pour les droits de l'Homme et le respect de nos citoyennetés.
Agora toxica n'est par conséquent pas totalement objectif, sans que les convictions de l'auteure n'altèrent la pertinence de ses arguments et exemples.
Après un rappel historique des prémices de ce qui allait devenir Internet,
Stéphanie Lamy plonge au coeur de son sujet. Comme le signale le sous-titre du livre, il s'agit de révéler la société "incivile" à l'ère numérique.
Bien sûr, incivilités, harcèlements, violences et agressivité ne sont pas nés avec les ordinateurs et le réseau mondial. Cela doit se constater dès les débuts de l'Humanité. La grande différence, c'est qu'Internet et les réseaux sociaux offrent à ces États, associations, organismes, communautés et individus "incivils" une diffusion à l'échelle de la planète, un effet de masse et une rapidité de propagation proprement virale.
Grâce à divers exemples médiatisés ou tirés de ses activités,
Stéphanie Lamy démontre les techniques et procédés auxquels recourrent ces entités et individus. Il peut s'agir d'attaques de hackers, de manipulation des opinions ou d'interférences lors d'élections de la part d'États autoritaires comme la Russie. Ou des campagnes de diffamation, de harcèlement ou de menaces. de détournement des façons d'agir d'ONG luttant pour la défense des droits pour diffuser une idéologie. Qu'il s'agisse de régimes autocratiques, d'organisations identitaires, masculinistes ou homophobes, racistes ou ultra-réactionnaires, simples individus isolés ou regroupés en communautés cimentées par la haine; que les actions soient financées ou directes, le but est de déstabiliser les démocraties, de rompre les équilibres du vivre-ensemble, imposer une vision, une idéologie.
Voilà autant de matière qui m'interpelle et me préoccupe depuis déjà un certain temps. D'où mon choix porté sur cet ouvrage lors de l'opération Masse critique. Cette lecture est à la fois enrichissante, instructive et extrêmement préoccupante. Un bémol tout à fait subjectif : l'emploi de termes techniques tels que "questing" ou "astroturfing" a rendu parfois ma progression plus ardue. Il n'en reste pas moins que ce livre, ainsi que le travail et les activités de son auteure, sont à diffuser le plus largement possible afin de mieux comprendre les mécanismes des sociétés "inciviles" et des réseaux asociaux. Pour les démonter. Ou, au moins, les contrecarrer.