Cette femme était un don du ciel... ou du Tartare peut-être.
Quand j’étais petite, ces effluves de musique étaient comme les relents d’un bon repas et quand ils me parvenaient, ils me faisaient saliver. J’aurais voulu rejoindre la foule qui accompagnait les soldats pour commémorer la fin de la guerre ou un autre événement de l’histoire de la Ville. Je savais que mes camarades de classe y allaient en famille. Ma mère me l’interdisait. On aurait dit que ces fêtes étaient un moyen inventé pour l’insulter personnellement. Elle s’énervait contre moi, elle prétendait qu’il n’y avait rien qui méritât d’être fêté dans ces célébrations.
Il n'y avait pas matière à s'amuser, loin de là. Devant elle, les paires d'yeux braquées n'attendaient visiblement qu'une réponse tout aussi formelle que de circonstance. Piégée, la jeune femme avait l'épouvantable impression qu'une chape de plomb venait d'être fondue sur ses épaules, l'empêchant de respirer. Seule sa meilleure amie Marilou la dévisageait avec désolation, elle qui savait à quel point Capucine détestait se donner ainsi en spectacle.
Quoi répondre? Que dire? Elle eut envie de hausser les épaules mais, une fois de plus, se retint. Comme si ce choix lui appartenait à elle..
Ils croyaient quoi ces deux idiots? Qu'elle était sortie d'une relation où elle se laissait dominer sans rien dire pour rentrer de nouveau dans ce type de liaison? Si c'était le cas, ils se fourraient le doigt si profond dans l'œil qu'il leur ressortirait très certainement par le cul!
C'était incroyablement plat de dire ça et encore une fois cliché mais Capucine avait cette impression grisante qu'une envolée de papillons s'était faite la malle de son estomac ou encore que des petits poissons y dansaient la polka en frétillant.