Qui rêve trop oublie de vivre
Tu ne peux pas mesurer combien ça me travaille, ces histoires. Comment, bordel ! un être ordinaire, sain de corps et d'esprit, décide-t-il, au détour d'un fantasme ou d'une hallucination, de se croire investi d'une mission divine, de renoncer à ses rêves et à ses ambitions pour s'infliger une mort atroce au beau milieu de ce que la barbarie a de pire ?
Mais un attentat reste un attentat. A l'usure, on peut le gérer techniquement, pas humainement. L'émoi et l'effroi ne font pas bon ménage avec le sang-froid. Lorsque l'horreur frappe, c'est toujours le cœur qu'elle vise en premier.
J’ai toujours éprouvé une sainte horreur pour les chars et les bombes, ne voyant en eux que la forme la plus aboutie de ce que l’espèce humaine a de pire en elle. (p. 164)
Qui rêve trop oublie de vivre.
..si la guerre est devenue son unique chance d'accéder à l'estime de soi, c'est qu'il est mort lui-même et qu'il n'attend que sa mise en terre pour reposer en paix
- Ma femme n'avait pas d'amant, le coupé-je.
- Elle n'était pas obligée de vous le signaler.
- Nous n'avions pas de secrets l'un pour l'autre.
- Le vrai secret ne se partage pas.
Sa gloire ? Une simple pensée dans le souvenir de ceux qui vont lui survivre.
On peut tout te prendre; tes biens, tes plus belles années, l'ensemble de tes joies, et l'ensemble de tes mérites, jusqu'à ta dernière chemise- il te restera toujours tes rêves pour réinventer le monde que l'on t'a confisqué.
Je ne comprendrai jamais pourquoi les survivants d'un drame se sentent obligés de faire croire qu'ils sont plus à plaindre que ceux qui y ont laissé leur peau. (p.84)