Un type intéressant. Marié et divorcé quatre fois. Ses parents étaient riches. Il a travaillé un moment pour le Département d’État. Il a écrit son premier livre où il a dévoilé beaucoup de choses sur les gars des Affaires étrangères. Il a quitté la fonction. Il a continué d’écrire, tout de même. Il a gagné beaucoup d’argent avec ses livres. Il aimait écrire, boire, les femmes et le golf, peut-être pas nécessairement dans cet ordre. Il passait pour un intello de gauche mais d’après ce que j’ai appris de son avocat new-yorkais, il possède un portefeuille digne d’un banquier conservateur de Boston. Ça va être une mêlée ouverte pour sa succession. Toutes ces ex-femmes.
On ne pouvait guère appeler ça « faire l’amour » ni donner à la chose tout autre qualificatif romantique. C’était plutôt une bataille sexuelle. Nous nous arrachâmes mutuellement le reste de nos frusques, nous nous empoignâmes et nous roulâmes à droite et à gauche sur le tapis. À un moment donné, elle m’enfourcha et j’aperçus nos ombres projetées par les flammes sur les murs et le plafond. Elle rejetait la tête en arrière, ses seins dansaient alors qu’elle sautait violemment sur place en transpirant et en marmonnant des mots que je ne comprenais pas. Si le marquis de Sade avait été là il aurait applaudi d’une main avec enthousiasme.
Un peu d’herbe. Un peu de coke. Il y a des années, avant que je le connaisse, il s’était amusé avec des produits chimiques. Il disait que c’était de la recherche, pour un livre qu’il écrivait. Naturellement, tout ce qu’il faisait, il disait que c’était pour un livre qu’il écrivait.
— Le shah d’Iran ? C’est de l’histoire ancienne !
— De l’histoire ancienne ? On lit encore des articles sur les trésors nazis, de l’or ou des toiles de maître planqués dans une cave, ou les tonnes d’or que les Japonais auraient enterrées aux Philippines. C’est de l’histoire ancienne mais ça ressort constamment. Même si c’était vrai, ce serait de la gnognotte à côté de ce qui a été escamoté d’Iran. Au temps de sa gloire, le shah encaissait vingt-deux milliards de dollars par an, en revenus du pétrole. Et je dis bien milliards, pas millions.
— Quel genre de pilote était-il ?
— Du genre terrifiant. Il pilotait, comme il faisait à peu près tout. Il aimait prendre des risques. Quand c’était nouveau, quand il apprenait, il était prudent, il faisait attention. Mais après avoir bien compris qu’il était aux commandes, qu’il savait ce qu’il faisait, ça l’a ennuyé alors il lui fallait mettre un peu d’animation là-dedans.
— Il était comme ça aussi avec les femmes ?
— Tous les hommes sont comme ça quand il s’agit de femmes.