Approfondir la légèreté.
Après plusieurs ouvrages aux sujets assez lourds (la Shoah, le suicide, les féminicides…), j'avais envie de légèreté, allez savoir pourquoi ;-).
Pourquoi pas une bio tiens, une auto-bio même? Banco !
Pour avoir vu ‘Rocketman' très récemment à la TV (W9 le 1er mai),
Elton John m'a paru être une bonne idée de légèreté, du simple fait déjà de ses célèbres costumes hauts en couleur (euphémisme).
Une certaine image de la folie dans le sens festif du terme.
Bien sûr, cette scintillance n'est que la partie émergée d'un iceberg, le masque souriant du clown triste, une façon de montrer ce que l'on veut cacher.
Bien sûr le personnage est bien plus complexe que ce que suggèrent les quelques notes et pas de pop pétillante de ‘I'm still standing' par exemple.
Ce sera donc ‘Moi,
Elton John' qui va rejoindre le dessus de ma table de nuit.
Il va de soi que tous les poncifs se retrouvent, dans cette bio, c'est un peu le genre qui veut ça : l'après guerre difficile du Londres bombardé, les parents qui se disputent en permanence avant de divorcer, les corrections qui pleuvent et induisent un caractère pour le moins poltron, l'oreille musicale voire absolue, la révolution rock'n'roll qui déferle, les petits boulots alimentaires quand la musique ne nourrit pas encore son homme, les clubs miteux ou faire ses armes au coeur d'un groupe qui, bientôt, rendra les siennes, puis, plus tard, le célébrité venue, l'infinie solitude de la star mondiale, les hits (nombreux), les flops (moindres), les amours impossibles, les trahisons diverses et…la plénitude.
Quelques anecdotes indispensables pour comprendre et intégrer l'essence essentielle de l'oeuvre de Sir
Elton John émaillent également cette bio pour la rendre plus authentique (enfant, il s'est coincé le prépuce dans la fermeture éclair de son pantalon, par exemple). Authentique aussi le style employé, volontairement populaire comme l'est devenu très rapidement le chanteur en définitive (pour ‘your song' : j'ai pondu la musique en quinze minutes chrono). Un peu plus de hauteur n'aurait pas nuit.
Autre évidence, la fameuse trinité ne fait pas défection: sexe (bien que tardivement découvert), drogue (la coke au kilo) et le rock'n'roll (crocodile, cela va de soi). L'alcool, bien que ne faisant pas partie du trio initial n'a pas oublié de se présenter, entre autre sous la forme de vodka-martini découverte avec les Duran-Duran.
Le ‘gay way of life' tient une place importante dans cette bio-confession, évidemment.
Elton John le revendique haut et fort, sans la moindre ambiguïté, justifiant même son statut de survivant aux années sida à une propension plus grande au voyeurisme qu'aux frénétiques travaux pratiques. Quitte à friser la caricature (faute de pouvoir le faire de ses cheveux dont il déplore la chute anticipée), il appuie le trait parfois lourdement ce qui n'était pas forcément nécessaire.
Plus intéressants, artistiquement et musicalement, la genèse des deux premiers albums, l'assurance du premier producteur qui croit vraiment à son produit en devenir et n'écoute pas le chant des sirènes, la rencontre et l'amitié avec Bernie Taupin (Le parolier), l'admiration pour The Band (et Dylan) comme pour le son de Bowie (moins de l'homme).
Forcément on croisera le gratin (sans se prendre le chou-fleur) de
John Lennon (à qui il offrira un coucou que je ne décrirai pas ici) à Ringo Star (partenaire d'une gueule de bois monumentale) en passant par Rod Steward, Elvis, la Reine mère, la reine Elisabeth II,
Tina Turner, Versace, George Mickael,
Freddie Mercury ou la princesse Diana à qui il consacre un chapitre entier.
Pop et exubérante, telle est l'image tourbillonnante qui colle à la peau du chanteur aux millions de disques vendus, pourtant, à l'arrivée, subsistera une impression de solitude, de tristesse, d'enfermement aussi, que ce soit dans le personnage qu'il s'est créé comme dans les lieux clos ou trouver refuge et se protéger d'un public envahissant au moment où le succès (et la came) était à son paroxysme.
Le revers de la médaille, l'autre côté du miroir, l'obscurité qui engloutit quand s'éteignent les amplis et les projecteurs.
Projecteurs qu'il braque également sur sa passion pour les collections, ses addictions suivies de sa cure réussie de désintox et la création de sa fondation contre le SIDA.
Une fin de récit plus intime quand les propos évoquent sa rencontre et son mariage avec David, le chemin de croix de la GPA et la naissance de ses deux garçons ou la santé se dégradant l'âge avançant.
En bref, si ça ne casse pas trois plumes à un canard (autruche, paon…) ça se lit sans déplaisir en guise d'interlude entre deux ouvrages plus consistants.
Plus anecdotique qu'instructive (l'oeuvre musicale n'étant que rarement disséquée) cette bio se veut cependant sincère et sans concession et nous permet une approche intime d'un personnage unique qui a traversé une large époque de transition qu'il a largement participé à faire évoluer.
Un grand bonhomme !!
Pour finir de décrypter le grand artiste singulier qu'il est mieux vaut ressortir les vinyles (son contenant musical préféré) et se refaire le répertoire en intégralité, c'est cela que l'on attend d'une rock-star aussi prolifique finalement, sa musique, toute sa musique, rien que sa musique, le reste, après tout, lui appartient !