AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782919547166
210 pages
Editions Rue Fromentin (07/02/2013)
3.97/5   15 notes
Résumé :
" Oh oui, mais Bernard, c'est un philosophe ! "

Bernard n'en revient pas. Christine, l'une de ses plus jolies collègues, vient de prononcer cette phrase en réunion. Et devant tout le monde ! La gloire. Cette femme superbe a su déceler chez lui des qualités, des capacités que Bernard lui-même ignore.
Alors, c'est décidé. Il ne faut pas mollir après cet instant historique. Bernard vivra dès aujourd'hui en philosophe. Il pensera, il produira du ... >Voir plus
Que lire après La France de BernardVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Patrice Jean écrit des livres très drôles où il se moque comme il convient du wokisme et des wokistes, ce qui est tout à son honneur. Son chef d'oeuvre est sans doute L'homme surnuméraire, pour des raisons que je dirai.
Mais voici son premier livre, La France de Bernard, que je n'avais pas lu jusqu'ici ; maintenant je l'ai lu, et mon sentiment est mitigé ; bien sûr, le livre est drôle. Son héros (si l'on peut dire), comme souvent chez l'auteur, est un imbécile, comme celui du Parti d'Edgar Winger, ou de Rééducation nationale ; échappe cependant à la règle celui de l'Homme surnuméraire, aimable ludion qui me fait penser au personnage incarné par Romain Duris dans l'Auberge Espagnole ; celui-là n'est pas bête du tout, et il y a deux ou trois autres personnages sympathiques, raison pour quoi peut-être j'apprécie particulièrement ce livre ; pourtant d'habitude la méchanceté en littérature ne me dérange pas trop;peut-etre que je vieillis (sûrement que tu vieillis, Dominique!)
En revanche, je digresse toujours autant ; suffit !
Donc notre héros, Bernard Michaud, est un imbécile ; il est cadre moyen dans une grande entreprise. Un jour à la suite d'une remarque d'une collègue (pour la remarque, reportez-vous à la quatrième de couverture), il décide qu'il est philosophe ; d'ailleurs pourquoi pas ? de nos jours, on trouve des philosphes auto-proclamés à tous les coins de plateau de télévision ou de radio ; un des plus ineffables et Charles pépin, que je me suis payé sur le site.
Ce n'est pas difficile d'être philosophe, il suffit d'une année de fac ou deux, voire d'un bac philo, comme on disait de mon temps, voire de rien du tout. Dans ce domaine, le langage est prescriptif ; on dit qu'on l'est et on l'est. Et pourquoi pas ? Qu'est-ce que la philosophie sinon, comme l'a dit Huxley, l'art de trouver de mauvais raisons à ce que l'on croit, en vertu d'autres mauvais raisons ? Ou encore un jeu sur le langage. Bon, je déteste la philo, mais j'ai des circonstances atténuantes : j'ai eu un prof de philo marxiste (pléonasme à cette époque) et très méchant.
Et alors, Bernard Michaud ?
J'y viens, j'y viens !
Par le truchement de sa supérieure hiérarchique, dont le mari est prof dans le supérieur, il pénètre dans différents cercles où l'on pratique la philosophie, et surtout la bonne conscience de gauche, tendance canal historique Télérama ; parce que tout ce peit monde est cultivé, lit les livres qu'il faut lire, voit les pièces et les films qu'il faut voir, admire les artistes qu'il faut admirer, et parle, parle, parle, et déparle, comme on dit dans mon Sud-Ouest ; Télérama, justement, l'auteur nous en dit qu'il s'est beaucoup inspiré pour ses dialogues du courrier des lecteurs de ce magazine ; je veux bien le croire ; hélas le courrier susdit a disparu (le livre a été écrit en 2013).
Je le sais parce que, j'ose à peine le dire, je lis moi-même Télérama ; eh oui, Télérama a au moins un lecteur réac ;leurs critiques télévision sont parfois très drôles, il suffit de ne pas lire le reste, et de se garder surtout d'aller voir les films burkino-modalves en version originale sous-titrée qu'il conseillent
Un peu largué, il décide de se cultiver par lui-même, et se lance dans les grands auteurs ; il s'essaie même à rédiger un dialogue à la manière de Platon, son idole, et quand on y pense, ce n'est guère plus faux et de mauvaise foi que l'original ; à débattre avec soi-même, on triomphe aisément et le dialogue est la forme littéraire le plus malhonnête.
Et Bertrand pénètre aussi dans d'autres icercles de l'enfer cultureux, notamment les cafés philosophiques ; mais sont-ils vraiment plus philosophiques que les vrais cafés ?
J'en doute ; lors de son odyssée culturelle, un peu dépité de la culture, Bertrand passe quelques soirées dans un vrai café populaire, à l'ancienne.
Mais ce passage, je l'ai détesté, parce que l'auteur en peint la clientèle dans la meilleure tradition du mépris pour le peuple des soi-disant élites intellectuelles ; affreux, sales et méchants, voilà comment sont les consommateurs, pour reprendre le titre d'un film de Risi que j'ai détesté pareillement.
Et voilà comment ils voient le peuple, ces cultureux qui se pâment devant les Bidochon et les Beaufs de Cabu. Mais le peuple pense mal, n'est-ce pas ? Alors il faut en changer.
En tout cas, je préfère de beaucoup passer un moment dans un tel café que dans un café philosophique, où je ne mettrais d'ailleurs les pieds que contre une somme à six chiffres
Ce passage m'a fait me demander d'où l'auteur parle vraiment, et c'est pour cela que mon sentiment sur le livre demeure mitigé.
Patrice Jean taille aussi chemin faisant une veste, et même un costume trois pièces à Onfray ; j'en ai été surpris, car il ce dernier ne ressemble pas aux autres têtes de turcs du livre ; et puis je me suis dit que c'était le Onfray de l'époque, celui de l'Université Populaire de Caen, pas le Onfray d'aujourd'hui, ce merveilleux imprécateur héritier de Bernanos, qui dénonce comme aucun autre les monstruosités de notre époque, ce chrétien qui croit qu'il est athée, cet homme de droite qui croit qu'il est de gauche (je lui souhaite de le comprendre un jour, et cela viendra sans doute. Il y a plus de joie dans la maison du Père pour un pêcheur repenti.que pour cent juste de)alors Jean a raison, on ne peut lui reproche de n'être pas prophète.
Notre pauvre Bernard, finalement, qui est bête mais pas méchant, à la différence de la plupart des intellectuels qu'il rencontre au cours de son odyssée, finira assez bien, à peu près comme le Romain du Parti d'Edgar Winger, auquel il ressemble.
Alors, un bon livre ? Oui, quand même.
Et puis il nousdonne une raison d'espérer : finalement le wokisme d'aujourd'hui n'est pas pire que celui d'il y a onze ans ; il faut croire que la bêtise n'a pas progressé ; c'est toujours çà.
Commenter  J’apprécie          153
Premier roman de Patrice Jean, "La France de Bernard" ne bénéficie probablement pas de la qualité d'écriture de "l'Homme surnuméraire" ou de la cohérence de "Revenir à Lisbonne", mais il déborde de cette dérision irrésistible que l'on rencontre avec joie à chaque livre.

Comme souvent dans son oeuvre, le point de départ est un simple quiproquo qui prend de grandes proportions. Bernard Michaud, français plus que moyen travaille dans une banque et s'amourache de Christine Dupin, sa supérieure hiérarchique très sexy. Une femme intelligente, sensible aux valeurs humanistes de son époque, et qui aurait , selon des échos, qualifié son subalterne de "philosophe".

La teinte profondément ironique de la remarque n'ayant pas effleuré l'esprit du malheureux, le voici prêt à assumer son rôle et à tâter du concept. Des concepts qui lui donneront, il l'espère, la possibilité de tâter les formes de celle qui a su reconnaître son esprit profond étrangement cantonné aux tâches rébarbatives dont il s'acquitte non sans humilité.

Si le postulat de départ est tiré par les cheveux, l'intérêt n'est pas dans la vraisemblance de ce coup de coeur d'un type limité pour une discipline qui a confronté les plus grands esprits de l'humanité, mais dans l'apport concret de la philosophie dans la vie de modestes gens sans éducation philosophique. Et de ce qu'ils sont susceptibles d'en retenir.

Elle donne surtout l'occasion à Patrice Jean de se faire plaisir. Il imagine les revers de Bernard, un personnage cynique aux convictions droitières uniquement mu par la perspective d'obtenir un plan cul avec une belle intello de gauche. Ce canevas de pur comique de situation digne d'une comédie italienne avec Alberto Sordi n'est pas le seul effet comique maîtrisé par l'auteur.

Ses portraits d'intellectuels fats, aveuglés par leur propre génie et fardés d'autant d'illusions que ne peut l'être le personnage principal sont toujours de grands moments de ses livres. le fantastique personnage de Michel le Berre, philosophe pontifiant jusqu'à l'écoeurement est-il supérieur à ce pauvre Bernard ? Les deux se considèrent comme des phares de la pensée, alors que ni l'un ni l'autre ne le sont vraiment. L'auteur de "La dialectique du combat prolétarien" ou encore de "Praxis de la révolution Lacanienne" est passé maître dans l'art de l'esbroufe auprès de ses semblables, des universitaires indignés qui pensent tous la même chose sur tous les sujets. Ses artifices sont sans effets sur Bernard, qui lui porte une haine tenace. Une animosité certainement due au fait qu'il perçoit à juste titre le philosophe argenté comme un rival aux yeux de la belle Christine.

C'est en cela que les livres de Patrice Jean sont des oeuvres jouissives. Personne n'est épargné, ni les beaufs, ni les intellectuels. La connerie étant partagée dans d'égales proportions dans les deux bords. Et les efforts de ce type lambda - plus préoccupé par les résultats du championnat de Ligue 1 que par les injustices sociales - qui s'efforce de se faire accepter par des gens considérés comme moralement supérieurs permet de créer des situations grinçantes. Bernard qui récite du Nietzsche sous une barre d'immeuble dans une cité qui craint, Bernard qui déclame au supermarché pour réveiller les masses lobotomisées par la société de consommation, Bernard au bistrot qui se mesure en logos avec un autre libre penseur aviné, Bernard à la rencontre de ses pairs philosophes, Bernard en atelier des artistes, Bernard en France quoi...

Et quand il revisite des siècles de philosophie, cela vaut également son pesant de cacahuètes. Bondissant d'une école de pensée à une autre avec une aisance de félin, Bernard se montre difficilement impressionnable. Admirateur invétéré de Socrate, il se découvre successivement épicurien à cause d'Onfray, rationaliste à cause de Descartes dont il épouse même le look, et même Nietzschéen sur la fin...

On lui doit des sophismes qui méritent une forme de postérité : "l'homme est un loup pour l'homme dit le philosophe, mais le loup est-il un homme pour le loup ?", "Qui préfère une paire de claques à un bon lit moelleux ? personne. Donc tout ne se vaut pas" "On peut penser en slip de bain, en smoking ou en pyjama. La pensée se rit du vêtement comme l'aigle se moque de l'archer". Rares sont les livres qui provoquent un éclat de rire incontrôlé à son lecteur. Patrice Jean en a le secret de fabrication.

La France de Bernard est un roman hilarant, qui signe les grands débuts d'un formidable auteur, dont l'importance croît à chaque livre.
Commenter  J’apprécie          30


Videos de Patrice Jean (5) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Patrice Jean
Nouvel horaire pour l'émission "Le coup de coeur des libraires" sur les Ondes de Sud Radio. Valérie Expert et Gérard Collard vous donne rendez-vous chaque dimanche à 13h30 pour vous faire découvrir leurs passions du moment ! • Retrouvez leurs dernières sélections de livres ici ! • • le Stradivarius de Goebbels de Yoann Iacono aux éditions J'ai Lu https://www.lagriffenoire.com/le-stradivarius-de-goebbels-1.html • le Roman de Vienne de Jean des Cars aux éditions Litos 9782268056197 • le diable parle toutes les langues de Jennifer Richard aux éditions Pocket https://www.lagriffenoire.com/le-diable-parle-toutes-les-langues-1.html • L'Homme qui peignait les âmes de Metin Arditi aux éditions Points https://www.lagriffenoire.com/l-homme-qui-peignait-les-ames-1.html • le Turquetto de Metin Arditi aux éditions Babel https://www.lagriffenoire.com/le-turquetto.html • Moi et François Mitterrand de Hervé le Tellier aux éditions Folio https://www.lagriffenoire.com/moi-et-francois-mitterrand-moi-et-jacques-chirac-moi-et-sarkosy-moi-et-francois-hollande.html • Il était une fois Lamartine de Sylvie Yvert aux éditions Pocket https://www.lagriffenoire.com/il-etait-une-fois-lamartine.html • Maigrir pourquoi je n'y arrive pas ? de Jean-Michel Cohen aux éditions First https://www.lagriffenoire.com/maigrir-pourquoi-je-n-y-arrive-pas.html • Les aveux de John Wainwright et Laurence Romance aux éditions 10-18 https://www.lagriffenoire.com/les-aveux.html • Les Trois Meurtres de William Drever de John Wainwright et Clément Baude aux éditions Sonatine https://www.lagriffenoire.com/les-trois-meurtres-de-william-drever.html • Rééducation Nationale de Patrice Jean aux éditions Rue Fromentin https://www.lagriffenoire.com/reeducation-nationale.html • Souvenirs souvenirs... (T01) de Catherine Nay aux éditions Pocket https://www.lagriffenoire.com/souvenirs-souvenirs...-vol01.html • Tu le sais bien, le temps passe de Catherine Nay aux éditions Pocket https://www.lagriffenoire.com/tu-le-sais-bien-le-temps-passe-souvenirs-souvenirs-2.html • Histoire intime de la V République: le sursaut (T1) : Histoire intime de la Ve République de Franz-Olivier Giesbert aux éditions Gallimard https://www.lagriffenoire.com/histoire-intime-de-la-v-republique-vol01-le-sursaut.html • Histoire intime de la V République: La belle époque (T2) de Franz-Olivier Giesbert aux éditions Gallimard https://www.lagriffenoire.com/histoire-intime-de-la-v-republique-vol02-la-belle-epoque.html • Sambre: Radioscopie d'un fait divers de Alice Géraud aux éditions JC Lattès https://www.lagriffenoire.com/sambre-radioscopie-d-un-fait-divers.html • Gazoline de Emmanuel Flesch
+ Lire la suite
autres livres classés : romanVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (26) Voir plus



Quiz Voir plus

Compléter les titres

Orgueil et ..., de Jane Austen ?

Modestie
Vantardise
Innocence
Préjugé

10 questions
20709 lecteurs ont répondu
Thèmes : humourCréer un quiz sur ce livre

{* *}