Thomas Hardy est un écrivain qui n'a pas d'équivalent parmi les auteurs de son époque. Je le connaissais à travers le mélodrame de Tess of the d'Urberville ainsi que par le récit bouleversant du personnage de
Jude l'obscur, deux destins tragiques, deux victimes de la morale étriquée et des conventions de l'époque.
Aussi ai-je été surprise à la lecture de ce "Far from the madding crowd", dont le ton est plus optimiste et souriant. L'héroïne au nom impossible, Batsheba, au caractère autoritaire et capricieux, séductrice habile et meneuse d'hommes, fait irrésistiblement penser à Scarlett o'Hara, qui est elle aussi prête à tout pour arriver à ses fins. le beau Gabriel n'a rien de Rhett Butler, mais il parviendra à force de persévérance à triompher de ses rivaux. Une histoire d'amour, certes, mais surtout des personnages hors normes qui refusent la facilité d'une voie toute tracée, et qui ne renoncent pas.
C'est aussi l'éloge d'un comportement plutôt rare chez un simple berger: l'amour de la lecture, du savoir, de la méditation, allié à un sens esthétique du spectacle de la nature. Bref, ce Gabriel est un ange de patience et de bonté, qui finit par s'imposer malgré l'espiègle perversité de sa bien-aimée.
Sans doute
Thomas Hardy a mis une bonne part de lui-même dans son personnage, comme l'indique sa biographie. Jeune apprenti à 16 ans dans un village du Dorset, il souffre de sa condition de fils de maçon et se forge une culture en autodidacte. Son premier roman a pour titre "The Poor man and the Lady". Sa vie amoureuse fut sûrement une source d'inspiration jusqu'à la fin de sa vie. A l'âge de 84 ans, amoureux d'une jeune actrice, il commence à réfléchir à une adaptation théatrale de
Tess d'Urberville!
Il fut aussi un poète reconnu, et cette veine poétique transparait dans ses romans souvent imprégnés de nostalgie et d'émotions intimes.
Un écrivain à déguster, à découvrir et à relire.