Hiver 1910, la Seine submerge la capitale, c'est la grande crue. Tout remonte à la surface, les rats, les passions, les vieux démons et les cadavres.
le corps d'une femme atrocement mutilée et démembrée est retrouvé dans une malle flottant au fil de l'eau.
Ange Leca, journaliste enquêteur corse, accompagné de son fidèle chien Clémenceau vient d'être mis à la porte de son journal pour alcoolisme. Il est accros à la « fée verte » l'absinthe, opiomane abstinent et volage, il est l'amant d'une femme mariée. Ange se lance dans l'enquête afin de pouvoir identifier ce cadavre mystérieux, mais ce qu'il ne sait pas encore, est que son enquête va toucher sa vie privée.
L'année dernière, Pelaez et Chabert, dans cette même collection «
Grand Angle » nous offraient également avec « Automne en Baie de Somme » un polar d'époque et d'ambiance. Avec «
Ange Leca » nous sommes projetés vingt ans plus tard et nous sommes immergés dans l'époque post Mucha au moment où la Seine déborde et inonde de nombreux quartiers de Paris.
Victor Lepointe dessine ce moment inhabituel et le Paris de la belle époque dans un réalisme surprenant. Les personnages féminins avec leurs grandes tenues, et même sans, sont tout en grâce et en élégance. le dessin, d'une grande finesse est abouti. Hormis quelques planches, il reste dans une ambiance grisâtre correspondant au mauvais temps et à l'enquête malsaine pour laquelle il va graphiquement très loin.
Les scénaristes se sont inspirés des grandes figures de cette époque pour créer l'intrigue. Nous retrouvons Docteur Paul, médecin légiste qui interviendra lors des plus grands procès de l'époque tels ceux de Landru, Petiot, Bonnot. Mais également
Marie-François Goron, chef de la Sureté, ici devenu détective après son départ à la retraite. Sans oublier Raoul de Vaux dit « le Baron Perché » et Jules Lévy libraire et éditeur parisien, noctambule avéré. L'histoire colle également aux affaires de l'époque où de nombreux cadavres de femmes démembrées furent retrouvés. Enfin, les personnages féminins sont inspirés des « demi-mondaines » ou « grandes horizontales », telles « La belle Otero » ou « La Païva », ces reines des nuits parisiennes, belles et intelligentes qui étaient entretenues par des hommes souvent mariés, suffisamment riches pour subvenir aux besoins de leur foyer et de leur maîtresse.
Un document de huit pages nous resitue, photos à l'appui, le contexte historique, les personnages évoqués dans l'album et les grandes affaires criminelles de l'époque.
Cet album est destiné aux adultes car les dessins très réalistes pourraient heurter. Annoncé au départ comme un album unique,
Victor Lepointe, lors d'une séance de dédicace, m'a averti que la fin abrupte pouvait surprendre mais qu' une suite était en cours.