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C'est une histoire terrible que celle de ces fillettes.

Elles sont trois: Justine, Laurette et Ninon, qui, en dépit de leurs efforts conjoints, faits d'un amour sans condition dont seuls les enfants ont le secret, et d'une confiance absolue dans la vie, ne parviendront pas à sauver leur maman.

Rebecca a 33 ans, "l'âge du Christ en croix", et honnêtement, la plupart du temps c'est à peine si elle parvient à sortir de son lit, alors se sortir des addictions...

Faut dire qu'elle se donne du mal, Rebecca, depuis son adolescence, d'abord pour attirer l'attention de parents absents, puis pour fuir la réalité, celle de son échec à les faire réagir.

Anton est tombé amoureux de ses yeux pleins de défi, de sa rage qui cachait mal son envie de disparaître. Lui, le fils de psychiatre, artiste surdoué qui n'a d'autre ambition que d'être heureux, en est sûr: "Un jour elle ira bien. Ce n'est pas une intuition. C'est une décision."

Alors il abandonne tout, apprend à peindre les murs des autres plutôt que des toiles de coton, et Rebecca y croit.

Pendant quelques années d'un doux répit, ils font trois enfants, trois filles phare, bouée et lumière... mais il est des dragons que même le plus charmant des princes, mêmes les plus valeureuses des princesses ne peuvent combattre:

"En rentrant du travail, Anton a repéré les canettes de bière dans la penderie de l'entrée, et, près de l'évier, une plaquette de Néo-Codion entamée. Rebecca s'est expédiée sur sa planète-opiacés."

Les fillettes est le récit d'une enfance écourtée, parsemée d'intenses allégresses, d'aventures fantasques et d'histoires merveilleuses mais toujours menacée par la noirceur d'un nuage planant, maléfique, au dessus de Rebecca.

Le récit est principalement concentré sur une journée unique, narrée tour à tour par chacun des protagonistes, et qui, à hauteur d'enfant, à des allures d'éternité.

L'innocence des mots d'enfants pour décrire le quotidien de l'addiction... c'est glaçant, ça met en colère, ça émeut...

Les fillettes est un roman cruel, et pourtant, à tellement d'égards, rempli de lumière et d'amour.

Rebecca est morte du manque, et, ironie du sort, c'est ce qu'elle laissera en héritage à ses enfants.

Je laisse les mots, sublimes, de la fin à l'auteure:

"L'enfance est irréparable. Voilà pourquoi, à peine advenue, nous la poussons gentiment dans les abîmes de l'oubli. Mais elle nous court après - petit chien fébrile -et nous poursuit jusqu'à la tombe. Comment peut-on en garder si peu de souvenirs quand elle s'acharne à laisser tant de traces?"
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Lire Gorokhoff, c'est entendre une musique résonner. Une musique très délicate, un air lointain qui berce, une mélodie à demi-mot comme un murmure. Puis la seconde d'après, une détonation merveilleuse. Lire Gorokhoff, c'est avancer à pas feutrés sur les frissons d'une grande symphonie. Et c'est devenir soi-même l'une de ces cordes qui vibrent de sensibilité.

« L'enfance est une atmosphère. Décor impalpable et mouvant, mélange d'odeurs et de lumières. Les silhouettes qui l'habitent sont fuyantes, et finissent par s'envoler. Sa mélodie est apaisante, la seconde d'après elle se met à grincer. Agonie à l'envers, épopée ordinaire, c'est le début de tout ; une fin en soi. L'enfance est irréparable. Voilà pourquoi, à peine advenue, nous la poussons gentiment dans les abîmes de l'oubli. Mais elle nous court après – petit chien fébrile – et nous poursuit jusqu'à la tombe. Comment peut-on en garder si peu de souvenirs quand elle s'acharne à laisser tant de traces ? »

Rebecca a trente-trois ans et dans l'âme, la fugue des étoiles

Les fillettes est un portrait comme une photo percée de lumière. La lumière, elle émane de trois filles et d'un mari. Et cette lumière, elle se heurte à l'opacité des rideaux blancs de la réalité qui se dresse devant Rebecca, incapable de délaisser les limbes protecteurs des rêves pour affronter ce monde insaisissable. Rebecca a trente-trois ans et dans l'âme, la fugue des étoiles. Elle a fait des études prestigieuses, parle plusieurs langues, est d'une élégance de satin, aimée mais surtout, prise au piège par des noeuds existentiels. de ce monde fait de salaires qui tombent à la fin du mois, de bureaux sombres mais confortables, de soirées où l'on parle de son travail, où l'on évoque ses prochaines vacances ; étouffée par toute cette société de gens normaux. Cette mécanique rassurante des choses qui broie Rebecca. Désarmée face à ce chaos qui ne cesse de la tenailler, elle dilue la substance du monde dans la chimie et se dissout ainsi toute entière dans des sphères éthérées, artificielles. Pernicieuses. Et dans ce combat infernal, elle n'aura comme alliés que la musique, la nicotine et son journal. Auxquels s'ajoutent les regards berceurs de ses trois filles et de son mari, impuissants.

D'une habilité et d'une délicatesse inouïes, Clarisse Gorokhoff dresse le portrait d'une mère par les paroles, les questionnements, les actes et l'amour de ses filles et son mari, autant que par les extraits de son journal intime. Gorokhoff – et si je ne cesse de répéter son nom, c'est pour bien que vous compreniez que c'est un nom à retenir – nous raconte l'intimité de cette famille désaxée sur une journée, pas plus. Et nous plonge dans la tête de ces cinq personnages, chacun en prise avec sa propre réalité dissonante, qui s'entrechoque avec celle de Rebecca, rongée par l'addiction. Ce qui est brillant dans ce roman, c'est la façon qu'a l'auteure de jouer avec les intensités, cette manière de faire poursuivre cinq personnages une même lumière. Une même lumière qui pourtant prend des lueurs si différentes… Chaque chapitre est une flammèche qui se jette dans le grand brasier de l'intrigue et qui fait crépiter ce personnage de Rebecca d'une ardeur quasi mystique. Car malgré toute la lumière qu'elle reçoit, Rebecca reste une éclipse.

« Mais trois fillettes peuvent-elles sauver une femme ? Avec des cris, des rires, des larmes, peut-on pulvériser les démons d'une mère ? »

S'il est une question qui colore le texte, c'est bien celle-ci : peut-on sauver une mère avec l'innocence et l'insouciance enfantines ? Pour Rebecca, la seule façon de ne pas être dans le massacre de la vie, c'est de demeurer enfant. du haut de leurs 1, 4 et 6 ans, Ninon, Laurette et Justine lui donnent l'énergie nécessaire pour espacer ses prises de drogue. Mais jamais assez cependant pour décrocher. Et distraitement, les fillettes guettent les errements de leur mère pour se blottir dans ses éclairs de lucidité. Elles savent que Rebecca peut parfois être totalement happée hors de la réalité, mais elles savent surtout qu'elle n'est pas folle. Les fous, ce sont ceux qui ne rêvent pas. Leur mère, elle, est simplement préoccupée par des rêves plus passionnants. Des rêves faits d'un liquide inflammable…

Mais ces fillettes, ce sont autant Ninon, Laurette et Justine que Rebecca ! Car une fois ses crises de folie évaporées, Rebecca retrouve les instants d'une enfance enfouie en elle. Elle retrouve un monde bienveillant et accueillant. Mais alors, peut-on calciner ses démons grâce aux flammes de l'enfance ?

« Manquer d'une mère, c'est porter en soi jusqu'à la tombe une fêlure. »

La forme du roman est très intéressante et ouvre à la perfection les perspectives et les questionnements. Gorokhoff aurait simplement pu se contenter d'alterner un chapitre sur deux ou trois entre journal et fiction ; mais à la lecture, nous aurions été pris dans une dynamique mécanique. Et justement, le propre de ce roman est d'aller se glisser au creux des singularités, d'ouvrir les libertés. Et au final, on se rend compte qu'il y a très peu de passages où Rebecca s'exprime directement. Mais chacun des extraits de son journal est d'une fulgurance ahurissante. Ainsi, avec un style extrêmement marqué et marquant, Gorokhoff creuse avec force un portrait fait de flottements. Presque le portrait d'une absente. Mais dont l'ombre jaillit de partout.

Si ce roman est aussi percutant et réussi, cela tient également de l'écriture pleine de grâce de Clarisse Gorokhoff. Au sein d'une histoire bouleversante, jamais l'auteure n'aura inséré du pathos. Jamais un mot de trop. Ce ne sont pas des silences, car autour le monde rugit, frappe, se fracasse lui-même. Son écriture est un vertige qui s'ouvre de plus en plus en nous, une coulée invisible dont on n'aperçoit que les torrents qui se déversent. Un onirisme qui résiste contre le fracas. Il y a dans l'écriture de Gorokhoff des petites touches de surréalisme, dans ces percées poétiques qui essaient de dire un réel diffus, illogique. Mais ce qui est certain, c'est qu'elle habille le chagrin de poésie d'une façon absolument exquise. Avec la pudeur de la finesse.
Lire Gorokhoff c'est tendre les mains pour récolter les larmes du ciel et les voir se transformer en perles. C'est agripper la lumière qui s'insinue dans les failles et transformer ce qui fut ébréché. Par la magie blanche des mots.
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Entrez ! Entrez donc dans cet appartement, à la découverte des trois fillettes : Justine, Laurette et Ninon ; accompagnées de leur père Anton, et de leur mère Rebecca, belle comme le soleil, brillante comme son intelligente, aimée par le monde mais totalement seule dans son monde.

Plusieurs regards, plusieurs voix qui se succèdent sur une journée entière, à l'école, dans la rue, dans leur appartement, au travail, dans leurs têtes, grâce a une construction du roman extrêmement novateur. Tel un papillon, l'auteure survole le quotidien de chaque personne en entrant dans leurs pensées.

L'amour maternel est le centre, le courant à suivre, le pilier, le leitmotiv de ce roman. Rebecca est l'être suprême, exceptionnel aux yeux des personnes qui l'entourent, qui l'aiment, qui l'aident a aller mieux.

Une mère qui oublie, une mère qui autorise l'école buissonnière, une mère qui ne veut pas se réveiller le matin mais une mère avec un amour énorme pour ses fillettes. Une mère qui écrit chaque jour, comme pour oublier sa dépendance, sa solitude, son envie de s'en sortir. Et là, à coté, ses trois fillettes, ultra courageuse, qui se battent, qui se défendent, qui ne comprennent pas forcément tout mais qui ont un amour inconditionnel envers leur mère.

Comme le soleil a son point culminant au milieu d'un ciel bleu, Clarisse nous éblouie avec une plume forte, élégante, remplie de sincérité. Comment ne pas être touché par cette histoire personnelle !
"Les fillettes" est ce roman incomparable, addictif du a sa construction, envoutant grâce aux sentiments qui en dégagent et tellement poétique malgré la détresse et la rudesse de l'histoire.

Un roman qui sent le vécu, qui vous prend à la gorge ! C'est en lisant tout d'abord le prologue si fort puis en refermant ce roman, quand on a ressenti l'auteure derrière l'histoire, le partage des émotions d'une vie et cette ode a une mère partie trop tôt, qu'on se dit que Clarisse Gorokhoff est une grande écrivaine !
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"les fillettes" est le premier roman de CLARISSE GOROKHOFF que je lis.
J'ose venir vous faire part de mon ressenti qui ne fait pas l'unanimité.
Pourquoi n'aie je éprouvé aucune émotion à la lecture de ce roman?
L'histoire de cette famille ne m'a pas ému. C'est vrai il y a de l'amour, malgré la fragilité de la mère Rebecca.

La tristesse de l'histoire est bien retranscrite. Mais je n'ai pas accroché. Sur certains passages je me suis même ennuyée.

La seule raison pour laquelle je l'ai lu jusqu'au bout est que je voulais savoir si Rebecca s'en sortirait, si l'amour pour ses filles prendrait le dessus sur l'addiction.

Il m'aura au moins permis de découvrir l'écriture -souvent pleine de poésie- de CLARISSE GOROKHOFF.

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Ma chère Clarisse,

Je remets cette lettre depuis dix jours, anxieux de ne pas trouver les mots, inquiet d'utiliser ceux de tout le monde, qui ne sauraient pas dire le quart de mon émotion. Dire l'écho immense que ce bouquin a eu en moi, ton troisième, et tu sais à quel point j'ai aimé les premiers avec passion. Leur audace, leur violence et leur sincérité. Une littérature qui vient de l'âme et du ventre, une démaquillée, une écorchée vive, un coeur mis à nu. Il faut s'en montrer digne. Il me semble avoir parlé de chef d'oeuvre, il me semble n'avoir écrit directement à une autrice publiquement qu'une seule fois. Quand un roman est un tel choc qu'il explose les cadres. C'est mort, on est amoureux. Faut bien que le style suive. Alors voilà, je t'écris. Parce que quand j'ai ouvert l'enveloppe et que j'ai vu Les Fillettes qui paraît chez Equateurs, j'ai ressenti un coup de tonnerre. Je t'attendais avec impatience. J'ai poussé un cri de joie.




Et puis je suis entré dans ta musique, je l'ai retrouvée, pesant chaque phrase comme un frisson, le laissant me vriller l'âme. Parce qu'on ressent la vérité. Et l'innocence, le regard de l'enfance. L'amour. Les trois fillettes, L'amour du père qui les réveille chacune le matin. La petite et sensible Laurette. La mère Rebecca qui n'est pas là le matin, indisponible, perdue dans ses pensées, toujours un peu ailleurs, entre deux mondes, entre la grâce et le Styx. Poétique, magique, imprévisible, fascinante. Insaisissable. Belle. Instable aussi. Elle saigne de la réalité, se soigne l'âme aux opiacés, aux médicaments depuis l'enfance. Elle dont chacun voudrait attirer le regard, mais qui bien souvent se détourne. Funambule trébuchante. Jamais totalement là. Jamais totalement absente.

J'étais là. Je ressentais tout. La force d'Anton, la vulnérabilité et la résignation des fillettes. La peur de l'abandon qu'on éprouve souvent dans l'amour quand les êtres sont fuyants et impénétrables, qu'on s'épuise à les poursuivre, quand on aimerait bien leur suffire sans savoir comment, quand on aimerait qu'ils n'explosent pas le foyer, ce qu'on essaie de construire, que leurs démons intimes ne rejaillissent pas sur nos attentes pour les empoisonner. J'ai déjà éprouvé ça. le roman m'y a replongé avec force. le sentiment d'ingratitude qu'on éprouve à aimer quelqu'un sur lequel on n'a pas vraiment prise, quelqu'un que l'on ne parvient pas à retenir, ou pas assez longtemps pour avoir foi en l'avenir.

Tu as écrit une lettre d'amour à Rebecca, la décrivant comme un miroir éclaté, une terre étrangère qui n'a pas livré tous ses secrets. Une captive de l'existence. Jamais tu ne la juges. Tu la comprends. Tu l'aimes, avec tes yeux d'enfant. Et finalement, davantage que sa félure, que les bouleversements que son addiction induit, c'est cette tendresse, immense et douloureuse qui me bouleverse. Qui me hante. Ce désoeuvrement qu'on éprouve devant les personnes qu'on ne sait pas sauver d'elles-même. On les aime. C'est peut-être pour ça qu'on écrit, parce que c'est sans doute le seul moyen de décrypter en nous cet amour étrange. Ces êtres énigmatiques et intermittents dont même les absences, dont même la manière dont on les attend finit par dire qui nous sommes. Ce n'est pas leur nuit que l'on percera puisqu'au fond, ils ne se laisseront approcher par personne. Mais la nôtre. Et c'est peut-être plus fondamental encore.

On connaît la petite Laurette et sa vulnérabilité, ses grands yeux écarquillés sur le monde, sa naiveté, sa franchise et sa pureté. La force de sa grande soeur, Justine, et sa propension à voler dans les magasins. Jusqu'à la sagesse singulière du bébé, Ninon, qui découvre le monde. L'enfance qui donne à sa réalité une allure de conte inquiet. On épouse chaque point de vue. On entre dans l'intimité de cette famille et ses codes. La force du père et sa manière de tout maintenir ensemble. On les aime. On approche Rebecca peu à peu également, comme le sphinx brisé qu'elle est.

C'est ta vie intérieure, Clarisse, qui s'anime. Ta sensibilité, ta faculté à dépeindre tes personnages par leurs intériorités parcellaires, dans ces monologues intérieurs hypnotiques qui tu sais composer comme des symphonies. Ils ont chacun leur voix : celle des enfants et de ce qu'ils saisissent, les ténèbres de Rebecca, ses pensées enrobées de fièvres et de brumes, ses ivresses, son élégance, sa grande culture. On la devine. On les devine tous, comme ces gens qu'on aime vraiment et qui nous échappent toujours un peu.

Peut-être que ce qui m'a plu, c'est que j'ai lu ton livre comme un secret, comme des mots sur mes silences. Comme un murmure sur mes points de suspension et sur une douleur qui je n'ai pas osé articuler moi-même quand il aurait fallu. Tu m'as prêté tes mots. Parfois on est littéralement orphelins de quelqu'un. Je m'étais reconnu déjà dans ta rage, dans ta violence, dans ton audace. Là , j'en découvrais la source. La même que moi. Ces beautés et ces hantises de l'enfance où rien n'est réglé, rien n'est certain, rien n'est vraiment compris. Où le monde et les gens sont plein d'un mystère que plus tard, on aura l'illusion de comprendre un peu.

Ce qui m'a bouleversé, c'est que tu m'as replongé dans cette incertitude première, et cet immense amour, cette incommensurable confiance qu'on éprouve au début de la vie, juste avant de s'en prendre plein la gueule. Quand on contemple tout sans filtres. L'avenir se chargera de nous apprendre à mentir, à nous masquer, à nous blinder.

Rebecca ne triche pas. Ses filles non plus. Elle souffre. Et elle veut soulager son mal de vivre, s'oublier dans ses vertiges. Jamais on ne lui en fait reproche, jamais on ne lui applique les mots des pauvres gens. Evidemment qu'elle se fera mal. Mais c'est plus fort qu'elle. Tous les réconforts sont accompagnés d'une facture. On passe notre vie à tenter d'équilibrer les douleurs pour qu'elles ne soient pas insoutenables. Ça peut être l'alcool, la clope, la drogue, l'amour, les voyages… ça peut être n'importe quoi.

Dans l'intimité des fillettes, dans leur fragile bulle de magie, dans la menace sourde que fait peser sur elles cette mère qui vacille, toujours susceptible de partir sans prévenir, j'ai vu toutes mes inquiétudes. L'impermanence, tout ce qui est volatile, le temps et les souvenirs qui nous échappent. Ma peur d'être quitté, ma peur de ne pas être aimé, ma peur de voir cette famille que j'aime et sa bulle rattrapée par la violence du monde.

Hier, on a déjeuné ensemble. Je n'avais pas fini ton roman. Je n'ai pas envie de le finir. Je t'en ai parlé en désordre et pas comme j'aurais voulu. Il me submerge. Il m'accapare et me retient. Je vais encore passer quelques jours avec. Peut-être que j'ajouterai des choses à cette lettre. Peut-être que je l'affinerai, peut-être que je la préciserai. Peut-être que je ne changerai rien. Parce que tu n'as pas le même son que les autres. Que tu écris et chuchotes dans mes profondeurs et mes enchevêtrements, mes tortueuses douleurs silencieuses. Surtout je ressens ce sentiment de lumière, de spirituel tapi dans toutes nos ténèbres. La beauté et l'étrangeté que tu suggères sans cesse. La tienne. La mienne. Celle de tout le monde.

Il est grand et déchirant ce roman. Il contient quelque chose d'essentiel.

Merci Clarisse, du fond du coeur.
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C'est beau. Tristement beau. Ce roman est une lumière qui réchauffe le coeur meurtri, une merveille qui pleure d'amour. L'amour est dans les mots d'une mère, dans l'espoir d'un père, dans les craintes de leurs filles. Ils est dans les veines d'une famille qui tente de vivre un bonheur qu'ils savent très fragile. La corde est incertaine en effet, le fil délicat. le bonheur est menacé par un ennemi difficile à maîtriser: le manque. La mère souffre d'une addiction, d'un mal-être, d'un mal-vivre. Elle souffre de ne pas être "normale"; ce qui fait pourtant sa beauté. Mais cette beauté est vouée à disparaitre ; à mourir, à périr car elle ne trouve jamais sa place dans une société normée et figée. La beauté de ces gens qui ne sont pas comme les autres est une beauté qui finit par être carbonisée dans un feu incandescend; un feu flamboyant qui paradoxalement finit par éteindre toute forme de vie.

Ce roman est une beauté douloureuse, oui. Il émeut, attriste, attendrit. Il noue ce noeud dans la gorge, pose cette main sur le coeur; une main lourde, ferme et douloureuse mais une main douce et chaleureuse. Ce roman est douloureux parce qu'il écrit la perte d'un être cher qu'on ne peut sauver.
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Une famille qui essaye de faire comme si, qui fait semblant de sauver les apparences pour rester dans la société. Un père qui se démène, une mère qui fait ce qu'elle peut. Des fillettes qui n'aspirent qu'à la normalité si rassurante, réconfortante pour grandir. Tenter de faire émerger la normalité d'un dysfonctionnement, d'une maladie. Continuer de vivre, travailler, aller à l'école pour des enfants et un père. Parallèlement en marge, la mère. Cette marginale qui ment, se ment. ✍️
J'ai aimé l'écriture de l'auteur et la lecture s'enchaîne. le style fluide fait que l'on tourne les pages aisément.
L'histoire de cette famille ne m'a ni atteinte, ni émue. Je n'ai eu ni sympathie ni empathie pour cette mère de famille et ses addictions.
J'ai manqué singulièrement de présence chez le père, la mère, la tante, les grands-parents. J'ai perçu des défauts et des qualités mais qui sont restés étouffés. Leurs violences, leurs désarrois et peines sont restés sourds dépourvus d'intensité, de puissance.
Tout m'a semblé lisse, ouaté, cotonneux.
Je suis donc restée en marge de leur vie et comme je n'ai pas reçu d'émotion de leur part, je n'en ai pas ressenti non plus.
Un roman que je voulais lire. Je suis ravie de l'avoir découvert même s'il ne m'a pas conquise.
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C'est la théorie d'un attachement auquel, par un pacte au goût de trahison, aux parents se sont substitués les drogues, les opiacés ; toute la substance d'un monde obscur qui s'insinue en une déferlante de nuages assombrissant l'âme.
Elle est une planète désorbitée, dont le ciel changeant ordonne aux humeurs, soumise à l'attraction occulte d'une force noire de médicaments blancs.
Victime du mensonge de l'enfance, qui lui avait promis une vie aussi légère qu'une ascension vers les nuages.
Pourtant, son existence est lourde, du poids des peurs et des angoisses ; lourde comme sa tête chaque matin, envahie par ces mêmes nuages, démoniaques.
Son quotidien, lui est une perpétuelle descente.
Celui d'une mère en manque.

D'une mère qui leur manque. A ses trois fillettes.
Qui est ici mais est ailleurs, toujours en fuite des autres, toujours en fugue d'elle-même. Echappée d'une réalité qu'elle ne comprend pas, spectatrice d'une réel auquel elle n'appartient pas.
Réfugiée parfois dans cette enfance qui pourtant l'a trahie, elle s'appuie sur ses filles. Ses remparts, ses phares, ses piliers.
Dans une fusion des âmes, dans une inversion des rôles, les enfants viennent au secours de la mère dans l'espoir que celle -ci sauve la femme.
Elles prendront le relais de son récit pour, avec leurs voix, terminer son histoire. La commencer. Lui donner naissance par les mots, eux qui coulaient dans ses veines dépendantes, dans son corps qui se désagrège. Lui donner la vie, pour l'éternité en la racontant.
Quand par la mort naît une mère. Quand par la mort naissent trois mères.

C'est la théorie de l'attachement dans une pratique de la dépendance. Quand la famille se construit en soustraction, quand l'absence prend une place immense.
Quand le quotidien est la vie volée des anges.
De fillettes en manque.

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In the mood for…allô maman bobo.
Maman Rebecca est en haut, elle fait souvent dodo. Papa Anton est en bas, qui porte la famille à bout de bras.

Rebecca est aimée, brillante, belle. Sur le papier elle a tout pour être heureuse. Hélas, la vie n'a rien d'une recette miracle : les ombres, la peur, le manque dévorent son quotidien.

Anton a décidé que sa femme irait mieux, bientôt. Il est certain qu'il a bien fait de tomber amoureux d'elle, un jour. Et tous les jours depuis.

Justine, Laurette et Ninon sont les fillettes, si vivantes, si touchantes.
Ce roman, c'est une part de leur quotidien. Comme une morsure, comme une madeleine.

J'ai trouvé le sujet bouleversant. J'ai été émue par la pudeur, la sensibilité, la tendresse de l'enfance, le goût de vécu tantôt aigre, tantôt doux.
Toutefois, j'ai eu le sentiment que la proposition s'éssouflait parfois, surtout quand la voix de Rebecca prenait le devant de la page, au travers de son journal. J'ai été agacée devant le spectacle de cette mère qui n'arrive pas à offrir un cadre, une routine rassurante à ses filles, si souvent livrées à elles-mêmes. Comme une inversion des équilibres qui pousse à grandir trop vite, en volant une part de l'innocence de l'enfance.

Mais qu'il est beau de lire la force de l'amour, l'amour qu'on qualifie d'inconditionnel : aux yeux des fillettes, Rebecca est la meilleure maman du monde. La leur, c'est tout.
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Justine est l'aînée des fillettes elle est malicieuse et n'a peur de rien tandis que sa cadette, Laurette, a elle peur de tout. La benjamine, Ninon est encore un bébé, la plus effacée de ce roman.

Anton, le papa, est artisan. Il s'occupe de ses filles le matin au réveil et dès que sa journée est terminée. Rebecca est la grande absente quoique bien présente dans ce roman. Rebecca vit avec sa famille mais est instable ou plutôt, dépendante à l'alcool et aux drogues.

Les fillettes l'adorent et n'attendent que l'attention de leur mère. Elles n'hésitent pas à se battre bec et ongles pour cette mère qui vit dans un autre monde. Rebecca compte également beaucoup sur son aînée, Justine, qui, alors qu'elle est haute comme 3 pommes, est capable d'acheter des cigarettes pour sa mère...

Les 3 fillettes suffiront-elles à sauver cette maman ?
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