Paysage
La voix des tiges flotte sur l’eau du lac d’argent
brossé par ce vent obstiné
qui trotte depuis la pointe du jour
Cette voix soutient sans peine les trilles d’oiseaux
les porte en ces jeux de répétition enfantins
dont il ne se lasse jamais
Le monde tourne, il le sait, mais il est si lointain
Comme en un pays qui lui sera toujours étranger
il relève sa tête hantée de prières
tandis que les arbres ouvrent le ciel jusqu’au vertige
Ils en animent le bleu et son mystère sans nom
Le poème fixera-t-il l’agitation subite qui l’envahit
l’odeur blessante des lilas
le désir subtil à l’égal du mauve caché des fleurs?
Attente
L’œil glisse discret
su la pulpe fragile des semaines
pendant que l’hiver assoupi sous la neige retient
les larves d’amertumes
les amours sans pétales
et jusqu’aux écailles de l’esprit
guet muet du porteur de mots
plumet en veilleuse
Chatoiement discret
La mer exhibe ses lumières impénétrables
fagots crépitants, galets de feu
l’homme y entasse des liasses de promesses
envoûtantes
et telle l’écharpe du marcheur
constellée des voix qui l’habitent
voyance, témoin de ses mains
son oreiller
le temps court, si léger
tandis que la nictation de ses paupières
voile des images inimaginables, inouïes…
pays turquoise où le matin se couche
terre d’eau dévoreuse d’âmes
Apprendre donc
malgré tout, en dépit de tout
à recueillir les miettes
des petits riens
pluie de feuilles
clarté dans l’extase du jour finissant