Cette nuit, veillée mortuaire.
Une fois le mort installé entre deux cierges, la veuve envoyée dormir, les pipelettes du village s'installent pour une nuit de papotages, ragots et racontars.
Chacune y va de sa version, revisitée au coin de la médisance, de l'imaginaire et de l'amplification, autour du couple mal-assemblé de Juliette, doyenne de l'assemblée et Firmin, et du couple de bourgeois qui se ruina bizarrement à les prendre sous leur protection. Suspicion, libertinage, cupidité, jalousie : on ressasse placidement les petites et grosses turpitudes…
Et plus elles cancanent, plus le style oral se met à distance, plus on entend la prose si spécifique de
Giono, qui jubile dans sa narration pleine d'invention, de perspicacité psychologique, de raffinement dans le sordide. Et en rajoute une louche, pour parfaire le conte.
Le lecteur cartésien souffre un peu, mais, se plaisant à comparer cette compagnie de commères à une réunion de co-scénaristes de
Chabrol en recherche d'idées bien scabreuses, il se prend finalement à se régaler... C'est noir, très noir, mais raconté avec un humour badin à se tordre de rire.