La ligne de feu c'est l'histoire d'un homme qui, au moment d'expirer, pendu par une lance à incendie au dernier arbre debout d'une forêt en cendres, décide de parler, de mourir certes, mais de ne pas disparaître sans que les mots soient dits, sans que cette justice lui soit rendue. Mourir oui, mais pas sans derniers mots, pas sans épitaphe, pas sans voix.
Parler parce que le silence de la mort fait trop peut peut-être, mais parler pour exister encore un peu, donner son dernier souffle à la parole, à ce qui fait de nous des hommes finalement.
Voilà la superbe de ce personnage, Reed Kitchen, une espèce de prophète halluciné qui dit la vie d'une façon incomparable. Qui voit les choses par l'oeil de la symbolique et de la poétique. Ce gars-là c'est un bavard génial, un labyrinthe lyrique à l'envolée fulgurante.
Et l'écriture de Ferguson est à l'avenant, un rythme étrange, saccadé, tout en temps de pause, en respirations, en halètements, en rythmique. Parce que la prophétie n'est jamais nette, et le flou implique l'hésitation, la phrase, la périphrase, la contre-phrase, le jeu du va-et-vient...
C'est une voix unique au mot aérien, c'est un livre qu'on lit à voix haute tellement le phrasé est construit, tellement la rythmique est complexe, tellement ça sonne tout simplement.
En deux mots comme en cent : j'adore.