GUERRE D'INDOCHINE : VISION GENERALE
La guerre d'Indochine (1946-1954) a dévoré un nombre très élevé de soldats français : deux fils de maréchaux de France, vingt fils de généraux, 1300 lieutenants, 600 autres officiers, 75 000 sous officiers et hommes de troupe soit l'encadrement de sept divisions et en hommes de troupe l'effectif de 5 divisions.
Cette guerre de "pauvre" (voir "la 317 ème section" et "La section Anderson" de
Pierre Schoendorffer) a déjà fait l'objet de deux livres très différents par le style et l'intention : "La guerre d'Indochine" de
Lucien Bodard et "L'
histoire de la guerre d'Indochine" du général
Yves Gras.
Le premier, écrit dans un style lyrique, baroque, coloré, s'intéresse à la période 1946-1950 à travers des "figures" militaires telles que le maréchal de Lattre de Tassigny ; le second brosse en une synthèse précise, très bien documentée, riche en informations, un tableau complet des opérations, des interactions entre le politique et le militaire, des grands engagements qui finirent par dévorer la chair et l'âme du Corps Français en Extrême Orient.
Qu'apporte donc, dans ce contexte, l'ouvrage de Bernard Fall (né à Vienne en 1926, mort près de Quang-Tri en sautant sur une mine en 1967) dont la dernière version originale fût publiée en 1964 juste avant le véritable engagement militaire nord-américain ?
"
La Rue sans Joie", nom donné par les combattants français à la route Mandarine, notamment à sa partie annamite, qui court depuis Hanoï jusqu'à Saïgon, combine récits de combats, réflexion sur l'élaboration des plans de campagne, et analyse historique.
La premier particularité de ce livre est qu'il englobe le conflit indochinois depuis son début jusqu'à l'apparition des conseillers américains au Sud Vietnam en 1962.
La deuxième particularité est dûe aux conclusions prémonitoires du dernier chapitre.
Bernard Fall, professeur en relations internationales à l'Université Howard de Washington, historien, politologue et correspondant de guerre a vécu sur le terrain la guerre française et l'engagement US.
Il explique très clairement pourquoi la France ne pouvait pas gagner cette guerre et pourquoi les USA n'y arriveront pas s'ils ne tirent pas les leçons de l'échec français. le dernier chapitre, remarquable, rappelle que "si l'on oublie
L Histoire, on est condamné à la revivre". Il vous suffira de remplacer le mot Indochine par Afghanistan et Irak lorsque vous aborderez les explications du succès nord-vietnamien pour vous rendre compte qu'il n'y a rien de nouveau sous le soleil.
La troisième particularité tient dans la qualité du récit lors de la description des combats, dans la bienveillance exprimée vis-à-vis de la souffrance humaine et dans la dénonciation des immondes conditions d'emprisonnement des Français capturés (A l'époque on a dû entendre siffler de rage l'élite des "penseurs français", les compagnons de route et autres marcheurs encensant la lutte des classes).
A lire donc !
P.S. Si jamais vous souhaitez vous intéresser à cette période, je vous conseille de lire la fiche Wikipedia sur la guerre d'Indochine puis de choisir selon ce qui vous paraît être le plus à même de vous satisfaire.