La confiance mutuelle entre chefs et subordonnés est une donnée essentielle à la réussite d'une opération. Quel que soit son niveau dans la hiérarchie, un soldat qui n'a pas confiance en son chef sera réticent à avancer; il remettra en question tous les ordres reçus parce qu'il croira bon de vérifier toutes les décisions prises par ce supérieur. [...]
De même, un chef qui n'a pas confiance en ses subordonnés perdra son temps en vérifications interminables de leur travail, tombant inévitablement dans le piège de l'ingérence qui entraînera incompréhensions et frustrations.
Enfin, un soldat qui a la sensation que son chef n'a pas confiance en lui aura du mal à prendre des décisions importantes, comme celle de l'ouverture du feu. Inhibé par le souci de la réaction de sa hiérarchie, sa réflexion sera envahie de doutes et ses actes empreints de timidité.
Décider de ne pas ouvrir le feu peut entraîner le risque d'être exposé au tirs ennemis en ayant perdu l'initiative. Il faut donc, en son âme et conscience, bien peser les conséquences de chaque décision. Au final, c'est bien la stricte connaissance des règles d'engagement, le bon sens dans la réflexion et une part d'instinct à ne pas négliger qui permettent de prendre une décision rapide et saine.
Car la guerre moderne a beau être une vitrine de nos industries technologiques, les soldats d'aujourd'hui ont beau se battre avec des engins valant plusieurs dizaines de millions et nécessitant des mois, voire des années, pour être maîtrisés, il n'en reste pas moins que la véritable force d'une unité provient de ses hommes et de la relation qui les lie. Le courage et la combativité du groupe sont proportionnels à son niveau de cohésion et non à la performance de tel ou tel appareil.
Un soldat a beau se préparer psychologiquement - et peut-être spirituellement - à donner la mort, cet acte implique pour toute personne normalement constituée un choc émotionnel inévitable. Je sais d'ores et déjà que mon premier tir en combat réel, qui s'est soldé par deux insurgés afghans tués, restera à jamais gravé dans ma mémoire.
Tuer n'est pas, et ne sera jamais un acte anodin. le considérer comme tel serait une dérive dangereuse qui mènerait hors de l'éthique du métier des armes.
Pour consulter les titres parus dans cette collection : https://www.lesbelleslettres.com/collections/20-memoires-de-guerre
La collection Mémoires de guerre a pour but de publier des textes inédits ou oubliés d'écrivains, de journalistes, de soldats sur les conflits qu'ils ont vécus. Celle-ci a débuté à l'automne 2012 avec la publication de deux auteurs majeurs : Curzio Malaparte avec La Volga naît en Europe récit de son expérience de correspondant de guerre sur le front russe durant le second conflit mondial et Winston Churchill, avec, son tout premier ouvrage, inédit en France, La Guerre de Malakand dans lequel le futur prix Nobel de littérature raconte, en 1897, sa guerre en Afghanistan. .
Si la collection a publié à parts égales ces dernières années les grands classiques du genre, parmi lesquels les écrits de John Steinbeck, Martha Gellhorn, Eugène Sledge, Evelyn Waugh, elle a aussi accueilli des auteurs contemporains. Des militaires français comme le commandant Brice Erbland, pilote d'hélicoptère en Afghanistan et en Libye, Guillaume Ancel et ses témoignages sans concessions sur la guerre en ex-Yougoslavie et au Rwanda, André Hébert, jeune militant communiste parti se battre aux côtés des Kurdes contre Daech, la journaliste Pauline Maucort et ses portraits de soldats victimes de stress post-traumatique ou encore les officiers de la Légion étrangère qui ont témoigné dans un ouvrage collectif. La collection vient également d'obtenir le prix Erwan Bergot 2020 pour le texte du dernier Compagnon de la Libération, Hubert Germain.
Mémoires de guerre est dirigée par François Malye, petit-fils d'un des fondateurs des éditions Les Belles Lettres et grand reporter au magazine le Point. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages historiques : Histoire secrète de la Ve République (en collaboration, La Découverte, 2006) ; Napoléon et la folie espagnole (Tallandier, 2007) ; François Mitterrand et la guerre d'Algérie (avec Benjamin Stora, Calmann-Levy, 2010) ; La France vue par les archives britanniques (avec Kathryn Hadley, Calmann-Lévy, 2012 . De Gaulle vu par les Anglais, Calmann-Lévy, 2020, reédition) Camp Beauregard, Les Belles Lettres, 2018.
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