Si l'étranger constitue un paradigme politique fondamental - au point qu'on pourrait presque juger une société au sort qu'elle réserve à ses étrangers -, l'étrange serait son corollaire esthétique fondamental, celui qui apparaît dans les récits de Franz Kafka ou dans l'effet d"inquiétante étrangeté" analysé par Freud à la même époque. (...) L'étranger comme l'étrangeté ont pour effet de jeter un doute sur toute réalité familière. Il s'agit, à partir de cette mise en question, de recomposer l'imagination d'autres rapports possibles dans l'immanence même de cette réalité.
Prendre position, c'est se situer deux fois au moins, sur les deux fronts au moins que comporte toute position puisque toute position est, fatalement, relative. Il s'agit par exemple d'affronter quelque chose; mais, devant cette chose, il nous faut aussi compter avec tout ce dont nous nous détournons, le hors-champ qui existe derrière nous, que nous refusons peut-être mais qui, en grande partie, conditionne notre mouvement même, donc notre position.
Les images ne nous disent rien, nous mentent ou demeurent obscures comme des hiéroglyphes tant qu'on ne prend pas la peine de les lire, c'est-à-dire de les analyser, de les décomposer, de les remonter, de les interpréter, de les distancier hors des "clichés linguistiques" qu'elles suscitent en tant que "clichés visuels".
Il s'agissait avant tout de construire les moyens esthétiques d'une critique de l'illusion. (...) Distancier, c'est montrer, affirme d'abord Bertolt Brecht. C'est juste faire apparaître l'image en renseignant le spectateur que ce qu'il voit n'est qu'un aspect lacunaire et non pas la chose entière, la chose même que l'image représente.
Pour savoir, il faut savoir ce qu'on veut mais il faut, aussi, savoir où se situe notre non-savoir, nos peurs latentes, nos désirs inconscients.
Comment qualifier nos émotions ? Que faisons-nous de notre peur, de notre colère ?
Comment dresser une Histoire des émotions ? Se servant d'oeuvres d'art, d'images et puisant dans différents épisodes de l'Histoire, le philosophe et historien de l'art Georges Didi-Huberman déplie la fabrique de nos affects. Il est l'invité de Géraldine Mosna-Savoye et Nicolas Herbeaux.
Visuel de la vignette : photo de "Le Triomphe de la volonté", film de propagande nazie tourné par Leni Riefenstahl lors congrès de Nuremberg du NSDAP de 1934.
#histoiredelart #photo #emotions
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