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sur 2508 notes
Un roman de la terre où le sang du cochon égorgé se mélange à celui de la jeune fille qui vient de faire l'amour pour la première fois. Vous êtes arrivés au Paradis, une ferme tenue par Émilienne qui élève seule ses deux petits-enfants orphelins Blanche et Gabriel avec pour aide Louis le commis, un gamin battu par son père qu'elle a recueilli comme un oisillon blessé.

Cécile Coulon nous raconte une histoire dure et brutale comme peut être le travail de la terre. On ne ménage pas sa peine ni ses efforts. Son écriture, son style, ses mots collent parfaitement au récit, tout est d'un réalisme incroyable. Un roman d'une beauté sauvage, où la sensualité côtoie la rudesse, où le désir se mêle à la haine.
Deux mondes inconciliables qui s'affrontent le monde rural qui essaye de survivre et la ville véritable pieuvre qui étend ses tentacules.

Une construction originale, des chapitres courts dont les titres sont des verbes à l'infinitif. L'auteur nous emmène dans une intrigue qui va crescendo, une passion dévorante qui se transforme en vengeance et conduit le lecteur aux portes de la folie, un récit qui explose dans une fin inattendue.

Ce roman s'appuie sur des personnages totalement différents et criants de vérité:
Émilienne qui ressemble à sa terre, un arbre fort aux branches tordues. Prisonnière de ses quatre-vingts ans, elle s'économise en animal qui attend l'hiver.
« Parfois, le jeune couple s'autorisait à quitter les lieux pour manger au restaurant, mais Émilienne elle restait avec ses bêtes. Elle faisait partie du troupeau, même si elle marchait à l'avant. »

Blanche a hérité du bon sens de sa grand-mère : apprendre vite ou mourir. « Elle avait plus vite appris à marcher qu'à parler, débordante de mouvements, une enfant plus âgée était cachée en elle et attendait le moment d'éclore. » Enracinée dans sa terre, elle va être emportée par sa passion.

Louis le garçon de ferme, enfant battu et qui rêve de Blanche.
« Louis aurait adoré avoir Blanche pour soeur. Il l'aurait protégée, aimée, sans aucun doute grondée aussi, mais leur lien aurait été clair. Il en aurait compris les limites, les rives à ne pas franchir, les rivières dans lesquelles les garçons n'ont pas le droit de se baigner.
Pour la fille Emard, Louis n'avait aucun charme, aucun pouvoir érotique, il occupait la place d'un animal domestique, intelligent et docile. … Il ne faisait pas partie de la famille, il faisait partie de la ferme. »

Gabriel, un garçon naïf, cassé par la mort de ses parents, qui vit à travers les plaines de son chagrin.
« Aurore comprenait qu'elle ne soignerait pas Gabriel, qu'il y avait en lui un arbre noir depuis l'enfance, que la mort de ses parents avait arrosé de colère ; elle ne pouvait pas le tomber, cet arbre, seulement couper quelques branches quand elles devenaient trop encombrantes. Elle le rafraîchissait, le frictionnait de ses mots et de son sourire, elle le secouait pour que tombent de son âme des feuilles mortes et des fruits empoisonnés. »

Alexandre à l'ambition démesurée
« Alexandre n'était pas un garçon de grange, d'oeufs, de cornes. Alexandre n'était pas un garçon de marécage, de lisier, de grenouilles. Alexandre était un homme impatient dont les rêves dévorants dépassaient les contours du Paradis ».

Et puis le Paradis, personnage à part entière, terre difficile à apprivoiser pour laquelle deux femmes vont se battre. Une belle occasion de découvrir tout le talent de Cécile Coulon, si vous avez l'envie de connaître une autre facette de son écriture je vous conseille « Les Ronces » un recueil de poèmes en prose qui traitent du quotidien, magnifique !

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Si proche du Paradis, si proche de l'enfer
Cécile Coulon nous revient avec un roman âpre, au goût de terre et de vengeance. «Une bête au Paradis» est un petit bijou, qui pourrait fort bien être la belle surprise de cette rentrée.

Ne vous fiez pas à l'écriteau planté sur un pieux et sur lequel est marqué «Vous êtes arrivés au paradis». Car le Paradis en question est une grande ferme, de celle qui nécessitent des bras, de la force et du courage pour venir à bout du travail quotidien. C'est là que vit Émilienne avec son commis Louis et ses deux petits-enfants, Blanche et Gabriel. Elle «avait perdu sa fille, Marianne, et son gendre, Étienne, dans un accident de voiture».
Le roman s'ouvre au moment où tout le monde s'affaire, car on tue le cochon. L'occasion choisie par Blanche pour faire l'amour avec Alexandre. Si elle a choisi le fils de la femme de ménage de l'école du village et du guichetier à la gare de la ville voisine, c'est qu'elle s'imagine que ce beau garçon partagera sa vie et l'aidera à surmonter ses peurs. Car «même si Blanche aimait le Paradis, elle s'y sentait petite. Les fantômes qui peuplaient les lieux prenaient toute la place.»
Les fantômes, mais aussi les convoitises et les rivalités. Louis, par exemple, n'avait pas apprécié que «cette petite» avait choisi de ne pas assister «à la mort du cochon, pour s'enfoncer, à l'étage, dans la peau d'un autre garçon que lui.» Depuis son arrivée au Paradis, battu au sang par son père, il s'était fait une place au sein du domaine et était considéré comme un rouage essentiel de l'exploitation, ne rechignant pas à la tâche. Autant dire qu'il verra comme une bénédiction ce que Blanche verra comme une trahison, le départ d'Alexandre parti poursuivre des études et chercher fortune en ville. Qu'il s'imagine prendre la place de cet amant qui ne donne plus signe de vie.
Les années vont passer, Gabriel va trouver en Aurore la compagne idéale. Louis ronge son frein et Blanche va essayer de surmonter son chagrin. Mais douze ans après leur rupture, un nouveau coup de tonnerre s'abat sur le Paradis. Alexandre est de retour. On raconte qu'il a fait fortune en Nouvelle-Zélande et qu'il revient pour acheter des terres. «Entendre le prénom d'Alexandre avait réveillé chez elle une bête, créature de désir et de larmes. Blanche se préparait: elle patrouillait au Paradis sans relâche. Lorsqu'elle s'arrêtait, épuisée, il luio fallait s'endormir vite; la figure si belle, si douce d'Alexandre la hantait. Ce visage n'en finissait pas d'agiter en elle des flammes vacillantes.»
Cécile Coulon va alors réussir un épilogue qui vous laissera pantois, aussi me garderai-je bien de vous en dévoiler le moindre élément. S'élevant au niveau des tragédies antiques, elle va pousser les sentiments et les émotions à l'extrême, tout en nous livrant des fulgurances d'écriture, à l'image de cette comparaison entre le corps de la femme, une ville, et de l'homme, un village: «Les formes des femmes changeaient sans cesse, évoluaient, se répandaient à la vue des autres, la peau se gonflait en certains lieux et se creusait ailleurs, tandis que le corps des hommes, passé l'adolescence, gardait son aspect et sa taille initiale. L'âge et l'alcool pouvaient l'arrondir, mais il ne se métamorphosait pas.» Il se pourrait bien qu'avec ce sixième roman – et après avoir rejoint la maison d'édition d'Adeline DieudonnéCécile Coulon réussisse un grand coup! C'est tout le bonheur que je lui souhaite.

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Après avoir lu le roman d'une jeune femme au visage angélique (Adeline Dieudonné) et en avoir eu le souffle coupé, je réitère cette expérience époustouflante avec Cécile Coulon et sa bête au Paradis. J'en ressors aussi assommée qu'avec « Kérozène ».

Sauf qu'ici, il s'agit d'une lente mise en place, avec descriptions des personnages et de leur passé, puis tout à coup tout s'accélère, le drame s'approche, arrive, est là ! Quelle ambiance ! Quelle maitrise de la forme !

Lente mise en place ? Oui, celle de la famille Emard, dont les parents meurent dans un accident de voiture à deux pas de la ferme « le Paradis », laissant leurs deux très jeunes enfants à la garde de la grand-mère Emilienne, maitresse femme, qui ne se laissera pas démonter et qui accueillera pour l'aider un jeune homme cabossé par son père.
Et la vie va, et les enfants grandissent, et le jeune commis devient de plus en plus dépendant de cette ferme, de cette femme, de ces enfants, en particulier de Blanche, l'ainée, au caractère fort comme sa grand-mère.

Mais lorsque Blanche se met à aimer Alexandre, ce bel Alexandre aux fossettes attendrissantes, à qui on donnerait le bon dieu sans confession, ce qui est normal puisqu'on est au Paradis…la gangrène s'installe doucement. Oh, c'est d'abord tout petit, tout caché, mais cela enfle, cela crève, cela rebouillonne et cela explose.

Je n'en dirai pas plus, sinon que je suis admirative devant le talent de cette jeune auteure qui s'exprime avec tant de brio et qui a réussi à m'entrainer dans les méandres nauséabonds entrecoupés de fulgurances de bonheur de cette famille qui se voudrait toujours vivre au Paradis.
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A la bibliothèque, j'ai emprunté Une bête au paradis de Cécile Coulon, roman de cette rentrée littéraire 2019.
Dans sa ferme isolée au bout d'un chemin de terre, appelée le Paradis, Émilienne élève seule ses deux petits-enfants, Blanche et Gabriel. Devenue adolescente, Blanche rencontre Alexandre, son premier amour.
Mais, arrivé à l'âge adulte, le couple se déchire lors qu'Alexandre, dévoré par l'ambition, exprime son désir de rejoindre la ville tandis que Blanche demeure attachée à son coin de terre.
Une bête au Paradis est un roman qui m'a étonné, je ne m'attendais pas à ça, je ne le pensais pas aussi sombre.
Le Paradis, c'est une ferme isolée qui ne porte pas vraiment bien son nom... En effet, les malheurs s'y enchaînent et les voisins se demandent si le Paradis ne serait pas plus proche de L'Enfer depuis qu'un accident a coûter la vie à deux de ses membres, laissant Blanche et Gabriel orphelins. Heureusement, leur grand-mère Émilienne s'occupe bien d'eux. La vie se poursuit tranquillement dans cette ferme, les enfants grandissent et un jour Blanche tombe amoureuse d'Alexandre. Un amour fort, exclusif mais qui souffre de l'ambition du jeune homme.
Blanche est viscéralement attachée à sa terre, elle n'en partira jamais.. Alors qu'Alexandre n'est pas attaché à cette terre, il ne voit pas faire sa vie ici. le clash était inévitable.. Les années passent, ils se retrouvent mais... rien ne va se passer comme prévu par la jeune femme.
Ce roman est bien ficelé. On suit la vie de trois personnes dans une ferme : la grand-mère et les petits-enfants. C'est parfois cruel.. comme la vie. J'ai apprécié que ce soit assez sombre même si certains passages m'ont étonnés. Il y a un truc que je n'avais pas vu venir, vraiment pas ! Et c'est pas mal du tout.
Pas de coup de coeur, mais je mets quatre étoiles à ce roman.
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Ce que j'ai ressenti:

Ça sent la terre, et ça sent l'orage…Une ambiance électrique pour un moment unique. Et puis, il y a la sensibilité de Cécile Coulon…Et ça, c'est comme une fleur sortant de terre. C'est de la magie.

"Vous êtes arrivés au Paradis."

▪️Ça fait mal comme…L'Enfer…

Protéger. Tuer. Observer.

La vie au Paradis, c'est un petit enfer. Des heures de labeur et de journées harassantes. Émilienne, Blanche, Gabriel, Louis tournent dans une danse infernale, dans cette ferme, pour faire éclater un bout de terre. Tant de malheurs sur cette parcelle, et tant de beautés aussi. Il ne faut plus que la résignation et l'habitude pour donner sens à ce travail d'agriculteurs, une certaine rudesse dans la chair et l'esprit pour survivre. Ça sent la terre, et ça sent l'oubli. L'oubli de soi, l'oubli des autres pour de la terre. Mais grâce à Cécile Coulon, l'oubli s'éloigne, et laisse place à un moment d'intimité avec une famille recomposée de frêles assonances, décomposée de malheurs assourdissants: de la matière à orages.

Construire. Surmonter. Continuer.

Et deux femmes qui se donnent corps et âme dans ce domaine, parce que c'est leur Paradis. Leur raison de vivre. C'est ici qu'est leur amour, et c'est beau de les voir aimer avec autant de désespoir et de renoncement. de voir la vie jaillir de leurs mains travailleuses, de ressentir leurs dévouements sans faille.

▪️Ça fait mal comme… L'Amour…

Avoir faim. Aimer encore. Y croire.

Blanche et Alexandre. Ça pourrait ressembler à un amour inconditionnel, fait de jeunesse et de rapprochements physiques…Un amour si grand qu'il emporte tout, un sentiment si fort qu'il dure au delà de la raison. Une passion faite de caresses et de tendresse. Et puis, il y a Louis. L'épouvantail de cette terre Paradis. La pierre angulaire de l'amour. Ici et absent. Présent et distant. Spectateur impuissant.

Frapper. Pleurer. Venger.

Ça sent la terre, et ça sent le drame. Parce que dans l'amour, rien n'est tout à fait simple, rien n'est écrit d'avance, et rien ne se passe comme prévu. Ça fait toujours mal, l'amour. Parce que l'on est sur Terre, et non pas, au Paradis…Que les êtres se déchirent, se désirent, se détruisent. Cécile Coulon nous conte une histoire d'amour, ni belle, ni laide. Une histoire d'attirance comme tant d'autres, mais avec des personnages qui changent, qui se changent, qui se dérangent. Un trio improbable, mais qui se racontent comme une belle histoire dans les mots sensibles de Cécile Coulon.

▪️Ça fait mal comme…La Vie…

Vieillir. Soigner. Se tordre.

Et dans ses pages, il y a la vie. La vie tout simplement. Une vie de bêtes, une vie de rien, une vie de possibles. de la matière pour de l'amour et des trahisons, de l'amitié et des répulsions, de la jeunesse et de la mort, de l'émerveillement et de la vengeance. Un cycle de vies, des cycles de saisons qui prennent des mots dans la poésie et des racines dans la terre du Paradis.

Lire. Vaincre. Vivre.

J'avais lu Les Ronces et les mots m'avaient griffés. J'ai lu Une bête au Paradis, et la poésie s'est enracinée. Ça sent la terre, et ça sent le Coup de Coeur. Merveilleuse Cécile Coulon, merci pour ce joli roman. Je marche sur tes braises avec le coeur frappé…

« Ça fait mal comme de marcher sur une braise »

Ma note Plaisir de Lecture 10/10.

Remerciements:

Je tiens à remercier très chaleureusement Babelio ainsi que les éditions L'Iconoclaste pour leur confiance et l'envoi de ce livre.
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Une ferme isolée, on ne sait où, exploitée par une génération de femmes. Huis clos composé de Blanche, son frère, sa grand-mère et d'un commis. Blanche qui ne vit que pour sa terre, laissera partir l'unique amour de sa vie. Lecture fluide, belle écriture mais qui, au final, donne une sensation de déjà vu, surtout la scène des cochons. Est-ce le nouveau lard chez la jeune génération ?
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Petit roman remarquable par sa construction.
D'une certaine manière, il renverse certains codes des rôles classiques masculin/féminin dans nos représentations mentales.
Sans faire dans le genre à suspense, l'auteure développe autour de la psychologie de ses personnages des attentes, une tension qui tient le lecteur en haleine jusqu'au bout.
Ce n'est pas un roman sur la paysannerie, mais la ruralité est présente, ce n'est pas un roman sur les rapports homme femme, mais les sentiments sont très présents, ce n'est pas un roman sur la famille mais les liens qui nous lient à nos proches sont au centre de la narration.
Bref, c'est un livre tout en finesse par son approche des personnages et d'une brutalité froide par la suite des évènements qui constituent la trame du roman.
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Âpre. Voilà le premier mot qui me vient à l'esprit en refermant ce roman.

Un livre que j'avais une terrible envie de découvrir. Puis une fois commencé, j'ai traversé les 120 premières pages sans plaisir, sans envie, sans empathie, pas plus accroché par le style que par l'histoire. Quelle histoire d'ailleurs ? Un flou indéfinissable…

Masse critique oblige et désireux de ne pas en rester là avec Cécile Coulon que je languissais de découvrir, j'ai tout repris à zéro. On oublie tout, on recommence, retour au début. Et là, la connexion s'est faite. Les personnages ont pris vie, la qualité de l'écriture m'est apparue. J'ai finalement dévoré ce roman en quelques heures. Peut-être cette récurrente question de moment ?

Et puis, il y a des gens qu'il faut se donner la peine de découvrir pour les apprécier vraiment, des atmosphères qui demandent un effort avant de s'y glisser vraiment. le goût de l'effort, on l'a indéniablement au Paradis, ce petit bout de terre isolé abritant la ferme d'Emilienne qui élève seule ses deux petits-enfants orphelins, Blanche et Gabriel. La vie ne les a pas épargnés et le temps n'arrangera rien à l'affaire.

Une Bête au Paradis, c'est une tragédie, un roman de peu de personnages, presque un huis clos, tant on les sent étouffés par leur devoir, entravés dans leurs envies. Des personnages terriens, taiseux, robustes, entiers mais que la passion et encore plus la trahison risquent à tout moment de faire vaciller jusqu'à basculer vers l'irréversible.

Approchez-vous discrètement, en faisant attention aux petites branches mortes qui risquent de craquer sous vos pas, observez-les attentivement et méfiez-vous des apparences, la bête de ce « Paradis » n'est pas forcément celle que l'on croit…


Merci à Babelio et aux Éditions L'Iconoclaste !


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Le Paradis est une exploitation agricole tenue d'une main ferme par Émilienne, veuve, mère de Marianne, Marianne mariée à Étienne, ex enseignant reconverti dans la "ruralité"; retour aux racines et à la terre notre mère nourricière. Marianne et Étienne ont deux enfants : Blanche l'aînée et Gabriel son cadet de deux ans.

Le Paradis, c'est aussi un cocon "familial", un refuge au-delà d'un monde voué au superflu.
La survie du cocon a un prix d'exigences et d'excellence : le travail sans compter, l'abnégation consentie, la dévotion et le respect dûs aux bêtes... à l'écosystème, dirions-nous persuadés que nous maîtrisons tout le contenu sémantique dont ce mot est porteur.
Le Paradis, c'est aussi et surtout la liberté, et pour commencer celle d'être ce qu'on est, sans artifices, sans faux-semblants, sans tricheries...

Un jour de mauvais temps, Marianne et Étienne trouvent la mort dans un accident de la route, dans une épingle non loin du Paradis.
Émilienne prend en charge l'éducation de ses deux petits-enfants devenus orphelins.
Blanche se raccroche à cette femme que la dureté de la vie ne semble pas parvenir à ébranler.
Elle rentre sa douleur et l'endurcit.
Le Paradis devient l'épicentre, le coeur de sa vie son tout, son moi...
Gabriel, plus fragile que sa soeur,a le deuil à fleur de l'âme.
Il survit au milieu des souvenirs, des regrets, des ombres, de l'amour confisqué. Empli de bleus au coeur, le Paradis a pour lui le goût de l'absence...

Et puis chez ces chez gens-là, il y a Louis, le commis qu'a recueilli Émilienne un soir d'orage, un soir où le gamin de seize ans alors, s'était fait rouer de coups par une bête humaine, une brute paternelle à laquelle le silence complice de la mère autorisait l'au-delà de tout.. Louis est resté au Paradis, intégrant cette famille qu'il a faite sienne...
Il seconde Émilienne et veille comme un frère aimant sur Blanche et Gabriel.

Et puis un jour, à l'école Blanche fait la connaissance d'Alexandre. C'est un Apollon, un charmeur à la voix enjôleuse, au sourire carnassier, un chérubin dévoré par l'ambition et l'appât du gain.

Pour Blanche, Alexandre c'est le coup de foudre, l'Amour en lettres capitales.

Seul Louis prend la mesure de la menace...

Ce roman qui s'inscrit dans une filiation littéraire dans laquelle pourraient figurer Giono, Marie-Hélène Lafon, Franck Bouysse et auxquels pourraient s'adjoindre Simenon et Dard, ce roman est une somme de petits chapitres tous introduits par un verbe à l'infinitif... "L'inconscient s'exprime à l'infinitif", disait Freud...

Il s'ouvre sur une scène dans laquelle Blanche devenue octogénaire, vient jeter un bouquet de fleurs sur la fosse aux cochons, désormais condamnée... et elle se souvient...

D'entrée, le lecteur sait donc que cette fosse aux cochons va jouer le rôle du fusil de Tchekhov ( loi de conversion des genres ) ; il n'y a plus qu'à suivre la plume tellurique, riche, sensuelle et maîtrisée de Cécile Coulon dans ce drame d'une réelle "époustouflance."

Un roman qui m'a marqué, qui a laissé une empreinte émotionnelle forte dans mon petit coeur de lecteur.

Cécile Coulon a un talent monstre... ce livre le montre avec toute la force et toute la violence d'un tragique intemporel et universel.

Un très grand roman !


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Dès les premières pages, l'auteure plante un décor plutôt sordide ; Il faut bien reconnaître que les cris du cochon que l'on tue baignant dans un son sang, pendant qu'Alexandre et Blanche font l'amour pour la première fois n'est pas des plus séduisants !

Dans ce roman, Cécile Coulon nous entraîne dans un scénario de manipulation de la part d'Alexandre exercée sur Blanche, très éprise de ce dernier. Aussi, l'annonce sans ménagement de son départ imminent pour poursuivre ses études loin d'elle, va plonger la pauvre Blanche dans une profonde dépression allant jusqu'à l'abandon d'elle-même. Tout l'indiffère. Malgré les sentiments de Louis, ouvrier de ferme qu'elle côtoie chaque jour, très présent à ses côtés pour tenter de lui redonner le goût de vivre depuis le départ précipité d'Alexandre, rien n'y fait. Pour Blanche, inconsolable, les jours se suivent et se ressemblent, vides, sans joie aucune. Impossible de recoller les morceaux de son coeur qui a volé en éclats depuis le départ précipité de celui qu'elle aime.

Mais dix ans plus tard, lorsqu'Alexandre revient au village après avoir fait fortune, tout au bonheur de leurs retrouvailles et malgré la mise en garde de Louis, la jeune fille balaie d'un revers de manche la rancoeur de son départ qui l'a tant fait souffrir et c'est dans un abandon totalement aveugle que la jeune femme plonge les yeux fermés pour la seconde fois. Car en y réfléchissant bien, pourquoi Alexandre reviendrait-il se perdre dans ce village qu'il a quitté, animé par une volonté de réussite, si ce n'est par amour pour elle ? Cependant, au fil des jours, le doute s'installe dans l'esprit de Blanche quant à la véracité des sentiments d'Alexandre. Et cette fois la vengeance qu'elle nourrit pour celui qui l'a trahi une seconde fois, ne se fera pas attendre.

Voilà une lecture addictive, oppressante que j'ai avalé d'une traite.
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