Le Fonds du Puits.
Lieu de cette sombre histoire.
Ou plutôt une représentation imaginaire du fond de l'âme humaine.
La plus obscure, la plus violente.
Ce que l'on tait de ce qu'il y a de plus sale en nous.
Pourtant, le FILS l'entend cette parcelle diabolique de tout être.
Là où le FILS passe, grâce à ce que la MÈRE lui a appris, il voit, il comprend, il entend ce qu'on ne voit pas, ce qu'on ne comprend pas et ce qu'on n'entend pas.
Ces traces de nos actes les plus répréhensibles, de leurs conséquences sur les autres, de la tristesse invisible qui perdure d'époque en époque, de ces souvenirs atroces que l'on croit cachés au tréfonds de notre esprit.
Le FILS lui les aperçoit, les maîtrise et les dompte.
Il a ce pouvoir d'atténuer les douleurs invisibles, ces maladies maudites.
Parce qu'il sait lire
la langue des choses cachées, ces mots inaudibles mais criants leurs sourdes alertes.
Parce qu'il sait cette langue, il aide ce monde qu'il ne comprend par contre pas.
Il pourrait tout régler en un seul geste, tout rétablir, pour enterrer définitivement ce mal qui ronge les Hommes.
Mais il a promis de suivre les règles à la MÈRE. Il a promis... Pourtant...
J'ai rarement lu un texte aussi noir, aussi lugubre, aussi malaisant que ce conte sortant de l'imagination de
CÉCILE COULON.
Dès le début du livre, on est percuté par le ton accusateur et dénigrant de l'auteur sur le comportement des Hommes.
La violence sera l'un des fils rouges du récit tant au niveau de l'écrit qu'au niveau de la trame.
Avec une écriture poétique, glauque et presque horrifique, l'auteure dépeint l'être humain comme cet animal qui ne cesse de se reproduire pour mieux se détruire, pour aimer de se violenter, pour jouir de se voir être détruit.
Le style peut paraître pesant au vu de l'ambiance crépusculaire de l'histoire, mais on ressent l'envie d'en savoir plus sur ce FILS et de ce qu'il adviendra de ses choix pour le destin des habitants du Fonds du Puits.
Les pages se tournent sans complexe et on est même surpris de terminer ce roman si rapidement. On est happé par ce conte dédié aux indicibles et silencieuses traces de nos actes.
Les personnages sont psychologiquement aboutis grâce une description de leur mental très complets.
On discerne les doutes du FILS sur ce que sa MÈRE lui a dit de ne pas faire.
On comprend qu'il vit ses premiers pas compliqués de guérisseur, qu'il doit assumer ce rôle ingrat que lui a transmis sa génitrice.
On ressent aussi une haine quasi viscérale par rapport à certains personnages du Puits.
Notre coeur respire aussi un peu d'espoir avec la lumière que d'autres protagonistes émanent de leurs comportements.
De ce conte mystérieux, à l'atmosphère sombre, presque cauchemardesque, j'en ressors pourtant émerveillé.
Admiratif du talent de poétesse et de maîtresse de justesse de mots qu'est
CÉCILE COULON.
Avec peu de chapitres, peu de dialogues, elle réussit à imposer cette vision de malédiction de ce que les Hommes, depuis l'aube de leur avènement, peuvent projeter.
Elle arrive à nous éclairer sur le sens caché de ses non-dits, de ses traces du passé que l'on peut presque toucher en frôlant un regard, en entrant dans une maison ancienne ou en errant dans une forêt.
C'est aussi un récit sur la transmission, sur la capacité à reproduire des gestes ancestraux et de les utiliser sans enfreindre les préceptes de la discipline.
L'autrice nous fait saisir, avec ce texte noir et incisif, que la cruauté des Hommes sera perpétuelle.
Néanmoins, certains d'entre eux feront de leur mieux pour atténuer cette violence universelle et éternelle pour tenter de faire taire ces maux incompris et invisibles.
Mais pour y arriver, à nous de les entendre et d'apprivoiser
la langue des choses cachées.
Un grand moment philosophique, poétique et littéraire.