Un très bel essai de réflexion sur ce qu'est l'héroïsme.
Fascinée par l'implication des hommes durant le premier conflit mondial, et notamment son grand-père,
Ariane Charton se questionne sur le pourquoi et le comment des être humains ont pu s'engager dans un conflit suicidaire et sanglant qui les a broyés par l'intensité des combats et des moyens mis e
n oeuvre.
En quoi étaient-ils héroïques ? L'auteure analyse pour le soldat, d'abord, mais aussi pour tout ceux qui ont combattu par d'autres formes d'actions pendant ce conflit. de formation littéraire et philosophique, c'est auprès des écrivains de cette époque qu'elle va puiser les éléments nécessaires pour alimenter sa réflexion. Péguy,
Alain Fournier,
Cendrars, Genevoix,
Giono, Barbusse,
Apollinaire, Céline et d'une renommée plus intimiste
La Ville de Mirmont… Ces auteurs ont rapporté dans leurs oeuvres écrites a postériori ou dans leurs lettres rédigées au front les évènements et le sentiment des Poilus dans leurs tranchées.
Qu'est-ce qu'un héros ? Selon le prisme de ses croyances et de ses idéologies, il revêt un nom différent. Ange pour les uns, Mal pour les autres. le filtre des valeurs ne donne pas toujours un résultat identique.
Un héros est-il moral ? « Faire preuve d'héroïsme, de courage, de désintéressement c'est alors ne pas hésiter à affronter l'ennemi, accepter de mourir mais aussi être capable de tuer même si c'est au nom d'une idée, d'un but louable : le héros n'est pas un sage [p.22] ». Par ailleurs,
« l'héroïsme n'est pas seulement affronter la mort […] Combattre avec des mots est aussi un acte courageux […] les mots ne tuent pas plus physiquement mais peuvent être lourds de conséquences, dans le bon comme dans le mauvais sens. […] tous les écrivains qui ont manifesté leur pacifisme ont été […] accusés de traitrise [p.25] ».
Malheureusement, l'auteur constate que l'héroïsme est une affaire d'hommes : « Les femmes comme les résistantes ou
Jeanne d'Arc ont été héroïques mais […] l'héroïne se distingue d'une vie aventureuse où le courage est davantage de caractère […] comme si seul le héros pouvait appartenir aussi bien à la fiction qu'à l'Histoire [p.33] » alors que l'héroïne est souvent cantonnée dans la pensée à celle des romans et de l'irréel.
Et les écrivains dans la guerre, dans cette guerre ? « J'admire aussi [leur] héroïsme […] sans chercher à se planquer [excepté
Dorgelès qui assumera son pacifisme] […] Revenus ils ont accompli un autre devoir non moins courageux : écrire pour la mémoire des morts, pour soutenir les survivants [p.39-40] ».
Car une fois l'enchantement du départ passé : « l'héroïsme, n'est-ce pas dès lors garder autant que possible la tête haute, manifester une forme de résistance à la désillusion, un acharnement à exister ? [p.75] ».
La Grande guerre fut l'enterrement du progrès développé à la Belle époque. L'auteure estime qu' « en faisant l'éloge de l'héroïsme si souvent lié à la guerre, donc à la mort, il me semble faire l'éloge de la soif de vivre [p.38] ».
Finalement « le véritable héros est celui qui cherche à se dépasser tout en prenant conscience qu'il n'est pas un homme fragile, mortel, sans doute voué à l'oubli [p.123]. »
J'ai beaucoup paraphrasé
Ariane Charton mais pourquoi déformer sa réflexion si juste que je vous conseille.
Très bonne lecture à tous !