La psychologie populaire affirme volontiers que l’estime de soi est la marque d’une bonne santé mentale, mais quand on pense au nombre de personnes qui fondent leur estime d’elles-mêmes sur leur apparence physique, leur attitude positive, leur fortune ou parfois même la simple chance, on voit qu’au fond, cette idée reçue est assez sujette à caution. Tiens, prenez quelqu’un comme Donald Trump: voilà un homme qui a de l’estime de soi à revendre.
Acceptez ce qui est. Une dépression est souvent chronique et incurable. Alors acceptez-le pour cesser de culpabiliser parce que vous ne réussissez pas à vous en sortir. Arrêtez les traitements inefficaces. Adoptez toutes les mesures positives qui contribuent à mieux vivre avec votre maladie ou ce qui vous mine. Acceptez que certaines pertes sont douloureuses pour cesser de vous morfondre. Vous aurez toujours le cœur lourd, mais vous pourrez enfin aller vers une vie plus légère. Acceptez que des pulsions vous poussent vers des comportements, des partenaires sexuels ou des substances néfastes, que rien, qu’aucune introspection, ne pourra modifier.
C’est pourquoi il est important de tenir bon pendant une longue traversée du désert, de résister à l’envie de se recroqueviller dans un coin pour se lamenter sur son sort et de continuer à être connecté(e) au monde, aux gens et à soi-même, car une oasis peut toujours accueillir le voyageur au bout du voyage. Et il faut arrêter de chercher à tout prix à se sentir bien et à avoir confiance en soi, car c’est le genre d’objectif fallacieux qui, quand on n’arrive pas à l’atteindre, nous retombe sur la figure sous forme d’autoreproches — et ça, c’est vraiment trop injuste!
C’est un fait, les gens dont le bien-être dépend de facteurs sur lesquels ils n’ont pas un contrôle total sont les premiers à avoir l’impression d’avoir tout raté quand la chance tourne et leur fait perdre ce dont ils étaient si fiers. Ajoutez à cela la façon dont les publicitaires veulent nous faire croire que leurs produits feront de nous des gagnant(e)s sexy, attirant(e)s et so trendy, et vous aurez de bonnes raisons de ranger l’estime de soi, ou ce que l’on prend communément pour telle, dans la catégorie des drogues dangereuses.
Les gens qui possèdent une estime de soi trop développée et se considèrent comme des êtres supérieurs et exceptionnels sont une preuve supplémentaire du risque qu’il y a à surévaluer l’estime de soi. Ayant une conscience plutôt faible de leur tendance à se comporter comme des imbéciles, et donc à nuire sans la moindre gêne à leur entourage, ils sont très fiers de leur franchise et de leur capacité à dire certaines vérités que d’autres sont trop polis ou timides pour exprimer.