Lu dans le cadre du Grand Prix des Lecteurs Pocket, voici «
La fille de Joyce », une biographie romancée qui retrace la vie de la fille de
James Joyce, célèbre romancier et poète irlandais du XXe siècle. Influent et très courtisé durant les années folles parisiennes, je n'imaginais pas sa vie personnelle et familiale avant d'avoir plongé dans ce roman biographie.
On y découvre sa fille, Lucia, promise à un grand avenir de danseuse contemporaine, sous l'emprise totale de cette famille.
Emprise de son père, qui la considère comme sa muse et qui a en besoin au quotidien, quitte à l'étouffer et la contraindre à le suivre partout où il se déplace.
Emprise de sa mère, qui visiblement ne lui apporte aucun amour maternel, et la considère plutôt comme une charge.
Et enfin sous l'emprise de son frère avec lequel elle a des liens extrêmement forts dans l'enfance et qui se distendront à l'âge adulte pour des raisons obscures. Il la fait interner à plusieurs reprises, la considérant comme dangereuse pour les autres.
Le roman est en double temporalité : décrivant d'un côté, la vie en 1929 de la famille Joyce, l'arrivée de
Samuel Beckett au service de
James Joyce, la montée en puissance des sentiments de Lucia pour « son »
Beckett, la manipulation de ces sentiments par
Beckett, l'approche tout aussi manipulatrice d'autres hommes autour de Lucia et le début de la chute vers l'enfer de Lucia jusqu'à son premier internement.
Et d'un autre côté, en 1934, Lucia, internée, suit les consultations du célèbre psychanalyste, le docteur
Carl Gustav Jung à Zurich qui tente en vain de la soustraire à l'influence de son père.
Il affirma après 1934, après avoir refusé de poursuivre le traitement de Lucia : « Ils allaient tous deux par le fond. Il plongeait et elle sombrait ».
L'emprise, le patriarcat, la manipulation, l'asservissement de Lucia sont révoltants et finalement pas si loin de nous dans le temps. Cela fait mal au coeur, on a beaucoup d'empathie, de pitié, de grande tristesse pour Lucia, une envie folle de lui crier très fort de s'enfuir, d'abandonner ces chaînes qui la retiennent à ses parents…cela fait froid dans le dos.
L'auteure a entrepris de longues recherches fouillées et documentées pour écrire ce livre, cela nous donne un très beau roman, un beau portrait de femme, un destin tragique, bref une très belle découverte.