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Critiques de Rachel Kushner (86)
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Télex de Cuba

La couverture de ce roman n’est vraiment pas terrible !

Je l’ai associé immédiatement – trop rapidement sans doute – avec ses palmiers et son reflet du cocotier dans la piscine, aux histoires sirupeuses des telenovelas, desquelles ne décollent pas les autochtones des Amériques Sud et Centrale !

Passez cette impression erronée, s’écoule bien une centaine de pages, avant que ne soit installé tangiblement le décor et que « Télex de Cuba » harponne son lecteur.

Puis, enfin, il y a rupture ce qui permet au livre de se dérouler selon un bon rythme de croisière : les personnages se font de plus en plus familiers tout en présentant une réelle complexité, le cadre historique émerge progressivement et se dissous savamment dans les petits et grands drames de ces colons nord américains contraints à quitter leur paradis tropical.

Rachel Kushner a su, c’est certain, rendre crédible cette ambiance si particulière de la vie à Cuba fin des années 50. Cependant, sa vraie réussite dans cette fresque romanesque, est ce qu’elle laisse à penser, à ressentir et à exprimer de l’après Cuba aux personnages ayant survécu!

Alors là chapeau !

Chacun à sa manière, révèlera sa nostalgie des années vécues dans le giron de la société "United fruits", comme aucun ne se risquera à nier que ces années les ont façonnés en les marquant du sceau de l’indélébilité.

Rien que pour le traitement de cette partie du récit, le temps consacré à la lecture ne sera pas du temps perdu !

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Télex de Cuba

Cuba dans les années 1950, le quotidien à Preston, ville "réservée" aux Américains qui travaillent à Unifruitco, compagnie sucrière qui exploite les terres de pratiquement toute la région de l'Oriente. Le décor est idyllique lorsqu'on habite La Avenina, l'avenue où résident les cadres de l'entreprise. Ils ont reconstitué une Amérique améliorée, l'argent coule à flot, et les domestiques vous procurent un confort sans pareil. Rachel Kushner fait intervenir plusieurs narrateurs dans son récit. L'un d'eux, K.C Stites, le fils du directeur de la compagnie, n'est qu'un enfant au début de l'histoire.

L'auteur a l'intelligence de ne pas lui prêter une pensée plus critique qu'il n'est possible à son âge. Il vit, heureux, comme un coq en pâte, et le sort réservé aux ouvriers, leurs habitats misérables, la discrimination ostentatoire, rien ne le choque. Le monde est ainsi et lui aime son existence, paradis exotique où l'argent rend tout facile.

Peu à peu , d'autres narrateurs prennent le relais, une autre enfant Everly Leveler dont le père vient d'être nommé cadre dans une usine de nickel , proche de Preston. Venant des USA, son regard est une peu différent de celui de KC. Tout ne semble pas lui aller de soi.

Vient ensuite Maurel, Français au passé et au présent très trouble, agitateur, marchand d'armes, homme extrêmement complexe qui contemple avec cynisme la montée en puissance des frères Castro et la perte d'influence des Américains.

Pendant la lecture de ce roman, le lecteur oublie qu'il est en 2014, il est plongé dans le Cuba d'avant l'ère castriste et se délecte des multiples personnages dépeints par l'auteur, des paysages des Tropiques, du monde que Rachel Kushner reconstitue avec une incroyable maestria !

A la fin du roman, KC reprend la parole et murmure à notre oreille sa nostalgie de son paradis perdu, une très belle conclusion.
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Télex de Cuba

Saga familiale qui met en scène le petit monde des expatriés américains à Cuba, à la fin des années 50. Ils gèrent les plantations de canne à sucre ou l'usine de nickel. Les personnages de fiction côtoient Batista, puis les frères Castro. Tout est vu à travers les yeux des enfants et jeunes gens, ce qui fait de "Telex de Cuba" un roman polyphonique, agréable à lire et très intéressant car il m'a fait découvrir cette période historique.
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Télex de Cuba

Cuba, un eldorado pour Américains ? Cuba, île capitaliste dont les richesses (plantations sucrières, mines de nickel…) étaient détenues par une poignée de yankees privilégiés, incarnation d’un colonialisme qui n’assumait pas son nom ? Cuba dans les années 40 et 50 c’était cela. Pas de Fidel Castro au pouvoir, pas de nationalisations massives des productions, pas de Baie des cochons ni d’embargo, de fermeture des frontières, d’anti-américanisme, d’accointance avec l’URSS communiste. Rien de tout cela. A cette époque, une succession de chefs autoritaires, Batista en tête, faisaient amis-amis avec les plus riches entrepreneurs américains à qui ils offraient sur un plateau d’argent leur pays, une main-d’œuvre peu onéreuse facilement exploitable (Cubains mais surtout Haïtiens et Jamaïquains encore plus désœuvrés), des lois libérales plus que favorables et bien entendu une police entièrement dévouée à la chasse aux rebelles et autres opposants et agitateurs politiques. C’était cela Cuba et c’est ce que Rachel Kushner nous offre avec son très beau Telex de Cuba, véritable saga, mêlant souffle romanesque et roman choral, récit des derniers mois vécus par une poignée d’Américains nantis sur cette île. Nous sommes en 1958 : Fidel, son frère Raul et une armée grandissante de rebelles communistes sèment le trouble et la terreur, marchant sur la Havane et son gouvernement corrompu. Cette armée, soutenue par la population, menace les possessions américaines, cibles privilégiées. Dans notre roman il s’agit d’une vaste exploitation de cannes à sucre détenue par un Américain, reposant sur un encadrement 100% américain : ingénieurs, contremaîtres, gestionnaires débarqués avec leurs familles, abandonnant avec circonspection la mère patrie. « Parqués » dans des résidences fermées et surveillées, véritables eden de nantis, enclave américaine au cœur de la jungle cubaine, des cases dépenaillés et des ghettos noirs, ces exilés ne se soucient ni de la misère ambiante, ni de politique, s’accommodant parfaitement de cette boule de coton dans laquelle ils se prélassent, insensibles à ce qui se déroule sous leurs yeux aveugles. Nous suivons les derniers sursauts d’un idéal qui est sur le point de prendre fin. Finis courbettes et asservissement, compromis et compromission de la part du gouvernement cubain prêt à tout pour faire partie de ce monde. Le rapport de force s’inverse et menace l’équilibre fragile sur lequel se reposait cette poignée de paumés, subitement confrontés à la fin de leur monde. Rachel Kushner dépeint avec justesse cet état de fin qui n’empêche pas pour autant les illusions de ces gens qui veulent encore y croire. Telex de Cuba est une vraie peinture sociale qui ne tombe jamais dans la caricature manichéenne : d’un côté les gentils Cubains révolutionnaires (loin d’être tendres et pour beaucoup peu soucieux d’idéologie politique), de l’autre les méchants Américains dont on peut reprocher pour beaucoup de s’être mis des œillères car après tout, on leur offrait tout pourquoi le refuser. J’ai beaucoup aimé ce roman et son rythme qui alterne tout du long le point de vue de plusieurs personnages, prisme narratif qui donne une vraie dynamique. L’écriture de Rachel Kushner est une écriture riche et puissante, qui ne s’essouffle jamais. Sa sensibilité, son refus de juger, la justesse de son ton et l’acuité de ses portraits font de Telex de Cuba un roman d’une profonde qualité, fort enrichissant pour moi qui connais finalement peu de choses sur Cuba. Je ne peux que le recommander.
Lien : http://livreetcompagnie.over..
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Télex de Cuba

Cuba, 1958. La fin d’une époque, l’avènement d’une nouvelle ère, révolutionnaire. Presque 60 ans après, le pays ne s’en est pas encore remis.

Mais revenons aux années 50. L’époque pour laquelle sonne le glas, c’est celle de la « colonisation » de l’île par les gigantesques compagnies américaines, venues exploiter sans vergogne les ressources naturelles locales, nickel et canne à sucre en tête. Ca ressemble furieusement à de l’esclavagisme, entre Yankees qui font trimer les Cubains qui eux-mêmes tuent à la tâche (au propre et au figuré) Haïtiens et Jamaïcains.

Mais cet « âge d’or » n’aura qu’un temps, car la révolte couve dans les bidonvilles ouvriers et les montagnes de l’arrière-pays. Le jeune Fidel Castro, son frère Raul et leurs partisans ont pris le maquis. Révolutionnaires idéalistes, ils mènent une guérilla visant à la fois les intérêts américains et le gouvernement cubain en place.

Au fil des presque 500 pages de son roman, Rachel Kushner nous raconte 7 années de l’histoire cubaine, de 1952 à la chute du président Batista en 1959, chassé du pouvoir par les frères Castro.

Entre l’arrivée en 1952 de la famille Lederer, attirée comme tant d’autres par cet Eldorado caribéen, et l’évacuation chaotique des expatriés américains 7 ans plus tard, ce roman choral adopte tour à tour le point de vue des différents protagonistes : privilégiés américains, rebelles romantiques, trafiquants d’armes ou belles danseuses espionnes. L’auteur ne prend le parti de personne et au contraire, égratigne tout le monde. Des riches amerloques racistes à qui tout est dû, flanqués de leurs épouses oisives ou dépressives quand elles ne sont pas alcooliques (cela m’a évoqué « une histoire birmane » d’Orwell), aux "fiers" guérilleros de la Sierra Maestra préparant la révolution en jouant aux cartes et vomissant leurs tripes à la vue du sang humain, en passant par les politiciens corrompus et incompétents et les mercenaires se vendant au plus offrant.

On en retient que, au milieu de ce panier de crabes, les intentions les plus pures (à l’époque !) sont néanmoins à mettre au crédit de Fidel et de ses compagnons. Tous les autres ne sont mus que par l’appât du gain, au mépris de toute morale.

Les personnages les plus attachants sont les adolescents, qui observent les comportements parfois étranges des adultes. Plus lucides que leurs aînés, ils n’en pensent pas moins, sagement se taisent, puis finissent par agir selon leur cœur, quitte à trahir leur caste d’expatriés nantis.

Ce premier roman est admirablement maîtrisé dans sa construction. Petites histoires, grande Histoire, humour, ironie, séduction, nostalgie, destins croisés, style et belle écriture, tout est là pour faire de ce récit une saga romanesque remarquable.

J’attends avec impatience le prochain télex de Rachel Kushner !

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Télex de Cuba

Cuba, années 50. Fidel Castro et sont frère Raul sont de jeunes révolutionnaires ambitieux, encore en arrière plan dans des forêts tropicales fort humides. Début 1959, ils réussissent à renverser le président Batista, et depuis, ils sont toujours là...



Canne à sucre, nickel, le pays est riche, mais bien des hectares sont aux mains de compagnies américaines. Les expats vivent en cercle fermé, "chacun restait entre soi. Les Américains avec les Américains, les Cubains avec les Cubains, les Jamaïcains avec les Jamaïcains." Aux uns les cases insalubres, aux autres les superbes villas. Une poudrière.



Ce roman superbement construit fait la part belle aux personnages, sans s’appesantir à donner une leçon d'histoire. Par les yeux des jeunes Everly ou KC, des Américains aux épouses oisives tentées par l'alcoolisme, et de l'aventurier Maurel insensiblement épris de la danseuse "zazoue" Rachel K., se déroule une décennie capitale pour Cuba. Forcément, cela se terminera par l'évacuation des Américains et l'histoire laissera un goût certain de nostalgie.



Maurel sert de conseiller aux rebelles

"Il n'avait rien contre le culte de la nature, le fait d'enraciner une cause politique dans la factualité de la terre. Mais les habitudes rurales des rebelles étaient la paresse et l'oisiveté en lieu et place de la discipline. Personne n'était jamais volontaire pour des marches de nuit, comme adoraient faire les Allemands au camp de Wildflecken. Personne n'était partant pour une baignade vivifiante à l'aube dans un torrent de montagne glacé. Ils avaient peu de goût pour la discipline en elle-même et la transcendance qu’elle promettait. "



L'humour a donc aussi sa place dans ce roman, surtout aux dépends des Américains, d'ailleurs, y compris dans leurs différences de milieux, avec les familles Sites et Allain.



Au final, un roman au charme certain, à lire à son rythme, laissant parler les diverses voix.
Lien : http://enlisantenvoyageant.b..
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