Le 31.03.17, "Au palais des images les spectres sont rois" et Paul Nougé dans l'Emission sur Radio Campus Bruxelles.
"Plus de conscience", le pathétique appel de Karl Marx, le mot d'ordre essentiel du vieux prophète, l'on ne saurait trop louer Magritte de l'avoir clairement entendu.
René Magritte ou la révélation objective. 1936.
L'opération a réussi
c'est le malade qui meurt
[Correspondance, 1926]
Dans les Yeux des Enfants
Dans les yeux des enfants, tu glisses des mots de toutes
les couleurs.
Tu racontes les plus belles histoires, – rien.
Un oiseau remue doucement dans les yeux sans ouvrir
ses plumes.
Une graine se connaît seule au fond de la terre glacée.
Ronde, fermée ; soleil, printemps et la forêt, elle est.
Rien. Elle est.
Et les enfants se promènent amoureusement
au fond de leurs yeux de toutes les couleurs.
Présence
Le jardin appuie à la fenêtre son épaisseur parfumée.
La nuit vient doucement s'appuyer au jardin.
Marie (elle est assise à la fenêtre) entrouvre un peu sa robe,
ses épaules se découvrent.
Elle attend au tournant de la nuit.
Elle attend.
Passe un doigt lentement sur ses lèvres.
Son doigt
sur ses lèvres fait le signe du silence.
Elle attend.
Passe les doigts à peine sur ses cheveux, sur ses
bras qui sont nus.
Garde les yeux ouverts sur le cœur de la nuit.
Et le jardin recule à peine, quitte la fenêtre, comme la nuit
tendrement se sépare du jardin.
C'est qu'un peu d'aurore rougit le mur, la fenêtre, toute la
femme appuyée au matin.
L’inquiétude
Elle attend, se lève, se mire
puis elle attend, se lève, se mire
attend, se lève, se mire
dans un miroir blanc
où ses seins blancs
pointent, se noient et se retrouvent.
Au temps de l’Alphabet
des pieds des mains pour rire
mais les yeux pour pleurer
un bel oiseau se mire
des pieds des mains pour rire
la nuit vient de tomber
le pied boitera
la main sèchera
le monde mourra
mais moi moi moi …
laissons le monde dire
et les yeux se fermer
un bel oiseau pour rire
des pieds des mains pour rire
la nuit peut bien tomber
la nuit peut bien tomber.
Elle est Sauvage et Craintive
Elle est sauvage et craintive,
elle s’enferme dans ses mains de verre,
ses mains qui l’étonnent comme le passage des saisons,
les rébellions de sa chevelure et de ses rêves.
L’ombre de l’été est incertaine.
Elle s’épaissit mais devient courte.
Il ne lui reste qu’un liséré d’ombre.
Encore un peu, c’en est fait, la lumière la brûlera vive.
Ses yeux vont s’ouvrir, ses mains se briser,
si le paysage soudain gelé ne s’unissait au ciel
pour faire ainsi un bloc transparent,
pour les craintes d’Elise une prison de verre
jusqu’à la fin des temps.
Les mots sont sujets à se grouper selon des affinités particulières, lesquelles ont généralement pour effet de leur faire recréer le monde sur son vieux modèle.
J’ai faim, j’ai faim
J’ai faim, j’ai faim
pardonnez-moi de vous couper
la parole
Parfois me reviennent à l'esprit
Les yeux gris d'une jeune femme
Parfois me revient à l'esprit
telle page d'un livre de magie
où l'on peut lire les vertus de la flamme
le sens profond de toutes les couleurs
Et parfois j'oubliais ma douleur
à rechercher par quel détour
ou quelle grâce
le livre faisait du vert la couleur
de l'amour qui nous enlace (...)
(" Au palais des images les spectres sont rois")