"Mon cœur bat la chamade. Je viens d'avoir une idée pour mon livre [...], oui c'est une bonne idée, un très bonne idée. Je ressens une légère excitation, comme a chaque fois que j'ai une bonne inspiration pour mon livre. [...] Je me précipite vers le bureau, l'imagination enfiévrée. J'aime me mettre a la place de mes personnages, vivre leur vie, ressentir leurs émotions, à cent pourcent. [...] Je ris avec eux, je pleure avec eux. Il n'y a pas un sentiment qui n'ait pas été le mien, d'abord. "
Mon ciel dans ton enfer, Tome 1, Page 57.
Nathalie Bleger.
L'hôtel était encore plus magnifique de nuit que de jour, mis en valeur par des lumières de couleur. Sans même me changer j'ai descendu les escaliers menant à la mer d'un pas fébrile, comme si j'allais à un rendez-vous raté. Je ne me suis pas arrêté à ma cachette habituelle, non, je suis descendu jusqu'à la plage directement.
Une silhouette était étendue par terre, j'ai pris peur. Et s'il était blessé, mort ? Si l'affrontement avait dégénéré en mon absence, le laissant inanimé sur le sable ?
J'ai posé ma main sur son épaule, il a ouvert les yeux, surpris, et m'a fixé à travers la pénombre. Puis sans un mot, nos bouches se sont heurtées et je me suis couché contre lui sur le sable froid.
Il l'a attendu longtemps, une bonne partie de la nuit, je grelottais sur mon promontoir comme lui devait grelotter en bas, les pieds proches de l'eau. Quand il finissait par remonter la lune était au milieu du ciel, il était presque trois heures du matin. Il passait près de moi, sans me voir, je ne sentais qu'un bref effluve, un souffle frais. Et je repartais me coucher, vanné. D'un jours sur l'autre nous nous sommes habillés plus chaudement, sans nous concerter bien sûr.
J'étais le garçon qui obervait le garçon qui guettait les bâteaux, je ne sais pas lequel de nous deux était le plus dérisoire.
Julian,
Je te rends ce qui t'appartient, qui t'a toujours appartenu parce que tu en es l'âme : mon roman. Je ne lui ai pas trouvé de nom sans doute parce qu'il est inachevé. Ou plutôt pas encore né, comme un fœtus non viable.
Tu pourras le détruire sans même le lire. Moi je n'ai pas ce courage. Accepte cet ultime cadeau, preuve de ma bonne foi tardive : je n'en ai pas gardé de copie, il ne paraîtra jamais. Personne ne sera témoin de notre histoire, elle disparaîtra avec nous, c'est mieux ainsi.
Avec toutes mes excuses.
Thomas