Et si l'espoir venait à manquer ?
Alors la mort serait en toute chose.
C'est que... cinquante ans après les faits, on n'a plus envie de parler de certaines choses. Que veux-tu, mon p'tit gars, ça fait remonter à la surface des souffrances, des procès... Parce qu'il y a eu d'énormes scandales, des familles qui ont subi un terrible déshonneur. Même un grand délinquant n'aurait pas écopé d'une peine comme la nôtre. Ils nous ont exilés, mais pourquoi ? On n'avait rien fait de mal, ce n'était que des ragots, c'est tout. Il y a eu des scandales, et une immense douleur pour les familles, parce qu'à l'époque, c'était une honte indescriptible d'avoir un fils comme ça. A notre retour, après les deux ans de surveillance, nous avons tous demandé réparation à l’État : on voulait être réhabilités. Mais personne n'a obtenu quoi que ce soit.
Nous sommes désespérés, brigadier. Et quand on est désespéré, on peut tout se permettre, même d'être méchant.
Vous avez l'air de prendre ça pour une fable, une histoire pour enfants. Mais je rappelle que c'est mon histoire ! Ce n'est pas une histoire drôle, ni des ragots… L'histoire n'est pas faite de ça, elle est pavée de douleur !
Je rentre retrouver ma famille, mais elle a été déchirée par la douleur.
Et l’exil, loin de mon village, c’était aussi un exil des regards, des ragots, des mauvaises langues.
Je rentre mais tout a changé.
Oui, je rentre mais plus rien n’est comme avant.
Aujourd’hui, mon royaume, c’est ce bout de terre qui n’appartient à personne, et où on a oublié le sens des mots « chez nous ».
Je rentre, oui, mais où ?