Le Grand Charivari de la RTBF - "Toute une vie" de Jan Zabrana
En 1950, ils pendaient les gens, et c’est quelque chose qu’on ne peut oublier…Aujourd’hui, ils se débarrassent des gens administrativement, en silence – en les précipitant dans des soucis matériels chroniques, en les renvoyant de leur travail chaque fois qu’ils en trouvent un. Ca use un homme en quelques années, ça l’écrase, ça l’abat définitivement. Et pourtant, rien ne lui est arrivé. S’il les accusait un jour de l’avoir congédiait illicitement, il serait ridicule.
Ceux qui nous gouvernent aujourd’hui sont les mêmes assassins qui pendaient des femmes dans les années 50 à la prison de Pankrac. (La veille au soir, les jeunes communistes avaient organisé des discussions publiques sur le thème de « l’Amour » dans plusieurs quartiers de Prague.) Ce sont les mêmes qui laissèrent une femme accoucher seule dans une cellule de béton de Pankrac, qui, nuit après nuit, maintenaient les gens debout dans des cachots d’un mètre carré au sol incliné, où on ne pouvait s’appuyer à rien, où on ne pouvait que se tenir debout, les mêmes qui fusillèrent des gens à l’aube et les enterrèrent, qui versèrent la cendre de cadavres incinérés sur la route de Benesov. Oui, oui, ce sont ces vieux assassins bien connus. Ils ont même ajouté un article au droit socialiste : de sa culpabilité ou de son innocence, c’est l’assassin en personne qui décide. Et quand ils ont compris que leur bestialité et leurs crimes étouffés par la censure pourraient refaire surface, ils ont appelé les chars. Mais qu’attendez-vous au juste de ces gens-là ? L’erreur, précisément, consistait à en attendre autre chose.
La meilleure chose, que j'aie vu dans ce monde fut le ciel, la meilleure chose que j'aie entendue dans ce monde fut le silence, la meilleure chose que j'ai connue dans ce monde fut la solitude.
La littérature est la mémoire de l'humanité, et c'est pourquoi elle donne du fil à retordre aux tyrans de tout poil, aux Etats policiers soi-disant socialistes et même aux simples menteurs et imbéciles.
J'ai enfin acquis la certitude qu'il est possible de courir tous les risques de la liberté - mais que celui de son absence, n'est pas supportable. Je n'écris plus. Parfois, seulement je lis ce qu'ils écrivent - ces jouvenceaux et ces salauds éternellement veux. Satiram scribere, comme ce serait facile, sur leurs petits vomis. Mais je n'en peux plus.
Mort à tout ce qui est libre. C'est ce vers quoi tout tend, partout dans le monde.
Marquer pour le camp des vaincus... Qu'est-ce ma vie depuis mes dix-sept ans sinon la volonté de marquer pour le camp des vaincus ?
... trébucher sur des livres, qui ne sont pas des jalons sur le chemin de la vie, mais des jalons vers d'autres livres.
Les dictatures ont lancé leur ultime offensive : contre la langue, le dernier rempart d'une logique humaine commune.
J'admets volontiers que "le socialisme à visage humain" m'a toujours paru grotesque. Comme une phrase vide de sens.