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Citations de Gaston Puel (57)


Gaston Puel
Le poème se sert de la langue pour échapper au logos. C’est une folie d’alchimiste : des mots sont confiés au creuset ; libérés de leur sens étroit, ils ne sont que des signes. Leur sens est à inventer. Le poème est une flèche décochée. Le lecteur lit sa trajectoire.
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MOTS DE PASSE


Par son nom chaque chose m’appelle :
La lampe, les draps blancs,
La chaude nuit d’été.

Dans le lointain silencieux
Tremblent quelques lueurs.
Une odeur de cendre
Dans un battement d’ailes
Monte de la terre nue.
Qui va là ?

Les mots s’enchaînent :
Le feu rougit le fer,
Le boucher lave ses mains rouges,
Ses couteaux brillent sur l’étal.
Qui va là ?

Mots paisibles, arrogants,
Qui me fuient, qui m’enlacent
Fantômes se coulant dans mes rêves,
Enigmes invalides, rébus à déchiffrer,
Nous allons dans ce labyrinthe…

— Qui va là ?

Carnet de VEILHes, III, p.12
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Gaston Puel
Les amants se ressemblent…


Dans l’amour devenus
Ces blancs fardeaux du Vide
Les amants se ressemblent

Transparents
Les miroirs sont leurs gîtes

Chus du désir
Lunes transies
Ils se séparent
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À Josette et Éric


|…]
On est sans doute poète sans raison. Comme une arbre.
Simplement enraciné dans la terre et dans le ciel. Avec
seulement quelques mots pour répondre de sa vie. Ce
serait pitoyable s'il n'existait des êtres tels que vous,
mes amis, pour reconnaître ce très modeste faiseur de pain
et l'accompagner dans sa précaire et éphémère fonction.

Janvier 1999.

p.7
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FEU D’HERBE


Dans le ciel délavé du soir s’élève un filament de fumée,
feu lointain d’herbe ou de feuilles mortes. Des flammes
s’évanouissent puis reprennent vie sous la poussée du vent.
Là-bas un homme s’appuie au manche d’une fourche.

Maintenant un panache blanc bourgeonne puis se dilue
avant d’atteindre un bouquet d’arbres, la voix de Madame
Butterfly, portée par la musique de Puccini, se perd dans
le bercement mollement syncopé du train qui m’emporte.

L’homme à la fourche fait corps avec sa terre, je
l’envie, alors que promis à l’ailleurs, loin de la prégnante
appartenance à une demeure, la clarté endeuillée du
soir s’ouvre à la nuit. Il reste dans le ciel un frêle nuage
rose. C’est l’heure, j’entends la porte du jardin qui grince
atrocement .

p.29
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VERS L'AVAL (Carnet de Veilhes III)


Entraînés vers l'aval
Nos enfants s'éloignent
La rive nous écorche.

Personne en amont
Sinon des remous,
Remords ou regrets.

Râle ou gazouillis,
L'eau clapote, lente.
Mourante, naissante.

Menteurs ou frivoles,
Nous disons ici
Et sommes sans lieu.

p.34
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Dans notre chambre, remplaçant le crucifix du
précédent locataire, il y a une croix de tapisserie
plus claire. Une pomme y mûrit.

p.29

Extrait : LES PROPRIÉTÉS SPECTRALES 1951-52
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Emmurer ses craintes, mûrir son envol, mériter
ce destin de papillon légataire que le ver-à-soie
s'exténue à filer dans sa prison utérine.

p.29

Extrait : LES PROPRIÉTÉS SPECTRALES 1951-52

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LA VOIX DES PRONOMS 1952

PRÉTEXTE *


Le poète n'est pas un être d'exception. Il raconte et se
raconte à travers une grille à peine secrète. Son message,
qu'il voudrait simplement chiffré par l'affectivité, remue
des mots comme des grelots.
Il arrive que des sonnailles soient entendues.
Pourquoi et comment lui est venue sa manie ? Il ne saurait
le dire. Il a entendu d'autres appels ; il a été troublé par la
chute d'une pomme mûre ; il a senti le vent de quelques
mots frôler ses jeunes tempes.
D'une encre raide il a formé, lui aussi, un appel. Il a délié,
rempli, raturé son écriture et surtout rudoyé la fourmilière
qui agaçait sa nuque. Il cherchait à traquer l'émotion – ce
souffle court – il voulait la traduire dans sa respiration la
plus ordinaire.


p.46
* Texte qui ouvre l'anthologie Lustres 1943-1953
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LA RANDONNÉE DE L'ÉCLAIR 1954

FONTAINE


Je voudrais t'offrir cette rivière née de la terre dont
l'eau vive veinée de soleil commande au repos du
cœur.

Si un jour l'amitié de nos bras nous porte jusqu'à ce
remuement limpide et si près de lui tu t'étends, verras-
tu les ruines blanches qui dominent de toute éternité
ce jade raisonnable, convoyeur du présent ? Dans cet
âtre dévasté verras-tu le tisonnier du temps qui bat
toujours sa moisson d'étincelles ? Verras-tu ce brandon
rare à l'assaut du soleil ? Verras-tu ce qui palpite
encore de l'éclair d'un baiser ?

Luisante comme une olive dans ce tourbillon de
cendres, gagneras-tu ta facile ressemblance ? Seras-tu
Laure au seuil de l'Impossible ?

Je voudrais te haler dans mon amour qui n'est qu'une rivière.

p.53
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L'âme errante 1992

À Robert Sabatier *


Quand le gel attise les étoiles,
Si légères dans la nuit d'hiver,
Volettent les cendres des poètes.

Ils furent des morts discrets
Un paquet-poste pour cercueil,
Une lettre pour épitaphe.

Maintenant ils ont fait leur nid,
Cherchez-les dans la devinette,
Chasseurs dans l'arbre blottis.

Ne riez pas, perdez-vous dans les branches,
C'est ainsi que Pétrarque rejoignait
Celle par qui le laurier le ceignit.

Ne riez pas, les chasseurs sans fusil,
Tête en bas, nous écoutent et déboulent
Comme des lièvres d'entre les mots.

Ils sont l'oubli, le vent,
S'il pleut ils sont la pluie
Qui ne supplie personne.

J'écris vos noms, amis, soyez heureux,
Tout est sans nom, tout est poussière
Dans l'invisible où rien ne meurt.

p.155

* et à la mémoire de Robert Rovini, Serge Micheneau,
Henri Dufor et quelques autres que l'oubli a recouverts.

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Gaston Puel
Mon regard est l’aveuglé




Mon regard est l’aveuglé
Du tout sans nom
qui me regarde.
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PAYSAGE NUPTIAL/1949


Maintenant que tu as essuyé ma nuit
de ta constellation ardente, referme tes cahiers
et confie aux arbres qui nous recèlent les fiers secrets
de ta géographie.
Montre-toi. Montre le bleu vivace de l'amour.
Il te gaine jusqu'au bout des ongles.

Les idiots se promènent dans les jardins publics ;
On jette les affamés dans la gueule des locomotives :
On pleure les morts ; Les somnambules effraient
les vivants…

Partons
À la recherche d'une dignité.

p.15
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A vous

L'ange de la mauvaise nouvelle
A éventré la toiture de votre maison :

A vous les orages, les bleus parapets,
A vous les ronciers où bat son aile inquiète !

Quand paraît la beauté, ombre précaire,
Jetez votre tête aux orties !
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L'ÂME ÉGAILLÉE


Ce cœur si modeste
Mais plein de musique
Qu'un chant l'envahisse,
Il flotte, il chavire ;

D'un baiser fruité
Le vin l'éparpille
Au vent des étoiles
D'une nuit d'été.

p.36
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FOUIR


Gorgées de lumière et de sève,
Les feuilles bruissent sous l'embellie,
Les fleurs butinent les abeilles.

Ormeaux, frênes , érables,
Épris du bleu lointain,
Et vous peupliers si résolus
À vous hisser jusqu'au printemps !

Les cœurs naïfs des lilas blancs
Du renouveau chantent cantique,
L'aubépine bataille sous la neige
Dans la haie que le vent défait.

Et vous, pollens, et vous, calices,
Est-ce l'amour, est-ce la vie
Qui emporte vos épousailles ?
Qu'espériez-vous ? La poésie ?

De leurs poignes enchevêtrées
Les racines en sentinelles
Défient la faim, la soif,
Le pourridié, l'éboulement ; …

p.10
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DÉVOTIONS
I


POÉSIE,
Quand, éprises l'une de l'autre,
Vérité et Beauté se confondent,
Le jour n'a d'autre lumière
Que leur sillage scintillant.

p.38
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Parce qu'il est nu
Et le ciel vide

Que la langue est sa patrie

Le poète guerroie
Avec des mots

Sans souci de victoire.

p.12
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BERCEUSE


Confidente d'un clapotis
La source chantonne
L'été s'accompli

Un enfant effeuille
Son âme endormie
La nuit sera douce

Un frêle nuage dérive
Elle se vautre dans la suie
Toujours veuve de ses songes

La caresse du jour
Éveille son sein nu.

p.23
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LA RANDONNÉE DE L'ÉCLAIR 1954
PRIME PRÉTENTION


Je traverse des journées
D'autres explorent des forêts

Elle m'a rendu à un monde
Plus vite

Depuis trois jours
Il y a vingt-neuf ans
Que je l'aime

N'est-ce pas la parole de l'évidence ? Assurément il
faut être naïf pour l'entendre. N'est-ce pas la manifes-
tation impromptue d'un fantôme ? Assurément il ne
faut pas être très réel pour se laisser prendre à cette
parodie. Mais sommes-nous réels ? Que la réalité nous
abuse et nous confonde ne suffit pas à nous attacher à
ses preuves ! Le poète fonde sa vanité sur la possibilité
d'assaisonner le vécu, de lier ou de délier le réel et
l'imaginaire, le songe et la veille, le haut et le bas. Il
prend ses mesures et tend son espace comme un
tailleur coupe un costume ; il blasonne ses raisons avec
des symboles de passages ; il retient des migrations
solaires et lâche des nuits en plein jour ; il est acoquiné
avec le Temps. Nécessairement. Les équinoxes lui ont
donné carte blanche.

p.51
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