Comment appréhender et faire de la recherche dans les corpus de presse ancienne numérisés ? Au cours de cette journée de présentation du projet européen NewsEye, A Digital Investigator for Historical Newspapers, plusieurs propositions de réponses seront apportées grâce à des exemples concrets de recherche ayant trait à la thématique des femmes, et par la démonstration de plusieurs outils : Gallica, RetroNews, mais aussi un nouvel outil de recherche en ligne développé par le projet NewsEye.
Pour en savoir plus : https://www.bnf.fr/fr/agenda/la-recherche-des-femmes-dans-la-presse-ancienne-numerisee-1850-1950
PROGRAMME
[Matinée] 10h - 12h30
Présentation du projet NewsEye
- Introduction par Bruno Sagna (BnF)
- le projet NewsEye et sa plateforme par Antoine Doucet et Axel Jean-Caurant (La Rochelle Université, Laboratoire Informatique, Image et Interaction)
Un journalisme au féminin : enjeux historiques du numérique
- "Propositions pour une nouvelle histoire des femmes journalistes : la place cardinale du numérique" par Marie-Ève Thérenty (Université Paul-Valéry Montpellier 3, RIRRA 21)
- "Le projet FemEnRev : de la numérisation à l'histoire de la presse féministe du second 20e siècle" par Christine Bard (Université d'Angers, IUF) et Magali Guaresi (Université Libre de Bruxelles)
[Après-midi] 14h - 17h30
Presse et féminisme à la BnF
- Gallica par Hélène Raymond (BnF)
- RetroNews par Étienne Manchette (BnF Partenariats)
Outils numériques et revendications féministes
- "Le bruit des bases de données contre les silences de l'histoire; vers une nouvelle écriture de la première vague du féminisme" par Claire Blandin (Université Sorbonne Paris Nord)
- "Les femmes culottées au quotidien (1850-1950) : pantalonnades médiatiques et humanités numériques" par Nejma Omari (Université Paul-Valéry Montpellier 3, RIRRA21)
Table ronde : regards croisés sur les défis et les enjeux de la mise à disposition de larges corpus numérisés
- Modératrice : Emmanuelle Bermès (BnF)
- Intervenants : Cyrille Suire (La Rochelle Université, Laboratoire Informatique, Image et Interaction), Pierre-Carl Langlais (Université Paul-Valéry Montpellier 3, RIRRA21) et Jean-Philippe Moreux (BnF)
Le projet NewsEye, A Digital Investigator for Historical Newspapers est financé par le programme cadre de recherche et innovation Horizon 2020 de l'Union européenne (accord de subvention n°770299).
En savoir plus sur ce projet : https://www.newseye.eu/
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La logique du parcours de sens, doublée de cette stratégie d’open data, finit toutefois par conduire au même constat que l’expérience des portails : malgré son élégance théorique, elle pose des problèmes heuristiques. Qu’il soit dans une démarche de découverte ou de recherche précise, l’usager peine à se retrouver dans la masse des ressources culturelles proposées. Ces stratégies, qui reposent sur la mise en évidence de la logique intrinsèque des données par des moyens automatiques, qu’il s’agisse des algorithmes des moteurs de recherche ou des liens hypertexte entre les entités, ont pour conséquence une « mise à plat » des ressources qui se retrouvent toutes au même niveau, du feuillet anodin de quelques pages à l’œuvre majeure du patrimoine national. Il devient difficile, voire impossible de déterminer ce qui est « le plus important ».
Dématérialisés, déstructurés, voués à la production et à la circulation de masse, ces nouveaux objets mettent au défi toutes les opérations que les institutions patrimoniales réalisent depuis leur origine : on ne peut ni les conserver dans leur matière, ni les exposer ; on peine à sélectionner l’essentiel dans la masse, comme à cataloguer cette dernière ou l’inventorier en détail. Et paradoxalement, dans le même temps, ces nouveaux objets promettent de dépasser toutes les limites dans ces différents domaines : utopie d’une transmission exhaustive de tous les savoirs, qui s’auto-décrit grâce aux moteurs de recherche, se régénère quand on la migre vers un nouveau support, et se diffuse au plus grand nombre sans limite ni frontière.
L’application de procédures de fouille de texte et de données aux collections numériques, si elle conduit à l’enrichissement des points d’accès aux collections, porte ainsi en gestation la démultiplication potentielle des trouvailles patrimoniales, à un niveau de granularité plus fin que ne le permettait le traitement des collections traditionnelles. C’est la nature autodescriptive des collections numériques, associée à l’existence et à la maîtrise d’outils de traitements, qui aboutit alors à un enrichissement considérable du patrimoine, non dans sa volumétrie mais dans la finesse de la connaissance qu’il est possible d’en avoir.
Le terme de dématérialisation, appliqué notamment aux procédures administratives, est ainsi trompeur car il pourrait donner l’impression que la matérialité disparaît, entraînant avec elle à la fois l’impact écologique et la complexité. En réalité, elle ne fait que déplacer ces problèmes vers les infrastructures numériques, et renforcer la fracture qui sépare les populations qui y ont accès de celles qui en sont exclues.
L’explosion patrimoniale, ou dans le domaine numérique ce que Bruno Bachimont désigne sous le terme « d’hubris de la captation et de la conservation », relève de cette dynamique : la prise de conscience de la grande volatilité des contenus numériques, du risque d’une perte massive de mémoire de notre époque, conduit à une entreprise de patrimonialisation qui pose la question de sa masse.
Celle-ci n’est pas un fait technique, mais bien une promesse organisationnelle, matérialisée par le fait qu’à chaque identifiant ARK est attachée une déclaration de politique de persistance. On retrouve ici l’idée d’une obligation morale de conservation, que l’institution patrimoniale s’assigne à elle-même au bénéfice des futurs usagers.
Face à cette quête quasi obsessionnelle de l’exhaustivité, on peut s’interroger sur la nature de la relation de la société à son passé, son présent et son futur qui transparaît dans l’élaboration du patrimoine numérique, de la même manière que cette question a été posée pour d’autres formes de patrimoine, immatériel notamment.
notre approche du patrimoine montre également une absence de confiance dans les générations futures pour être en mesure de comprendre notre époque à partir des traces que le passage du temps aura naturellement sélectionnées, et conduit à la préoccupation de vouloir forger un patrimoine numérique aussi exhaustif que possible.
on ne conserve pas les documents numériques, on se contente d’en garantir l’accès.
