Elle se rengorgeait de l'attention qu'il lui portait, et exagérait ses gestes, dans des attitudes qui se voulaient sexy mais qui n'étaient que pathétiques.
Comment imaginait-elle qu'il puisse bander pour un tas de cosmétiques pareil? Autant se taper un pot de crème Nivea.
Merde! Et elle ronflait fort, en +! Comme un vieux moteur encrassé qui crachait ses derniers boulons en refusant de mourir en silence.
Il lui balança des coups de pied, pour qu'elle la ferme, mais rien n'y fit. Elle ne cessait ses pétarades.
Il la tourna dans tous les sens, la frappa, lui enroula la tête dans un linge: en vain. Elle ronflait toujours, aussi discrète qu'une scie électrique au milieu d'une bande de bébés en pleine sieste.
C'était l'un des grands changements depuis qu'Epi était venu pour la dernière fois, une bonne dizaine d'années en arrière. On ne fumait plus en boîte de nuit, ou alors dans les fumoirs, des espèces de pièces en verre transparent, équipées d'aspirateurs de fumée, dans lesquels il fallait se tasser pour savourer sa sucette à cancer.
Avant, en boîte, ça puait la clope, maintenant ça sentait le fennec, la transpiration.
Et de deux! Dire que jusqu'ici il avait évité le sang...
Mais il devait reconnaître que cette distraction avait un effet extraordinairement défoulant. Faire mal aux autres était un déstressant naturel qu'il regrettait de ne pas avoir testé bien avant, et le sang versé rajoutait une petite pointe dramatique extrêmement motivante par la terreur que sa vue provoquait chez sa captive.
Voir Rose dans ce fauteuil avait attisé ses désirs, ses pulsions. Il voulait voir une femme installée entre ces bras de cuir, mais une femme soumise, impuissante et apeurée. Il voulait jouer avec elle, lire la peur dans ses yeux, goûter les larmes de ses joues et se divertir avec sa chevelure.
Il n’avait pas envie de faire du mal à Rose. Il n’avait pas envie de couper ses boucles brunes ni voir ses grands yeux verts s’éteindre.