D’ailleurs, pour les psys, personne n’était véritablement normal. La ligne qui séparait les êtres en liberté de ceux qui étaient enfermés ne correspondait pas à une frontière entre la normalité et la folie, mais entre la maîtrise de ses pulsions et le passage à l’acte.
"Elle sent tout près d'elle la présence de l'être qui lui parle. Elle ne parvient pas à le voir. La pièce est plongée dans l'obscurité, en dehors des lumières émises par le poste de télévision. Le casque qui lui immobilise la tête l'empêche de se tourner. Elle sent un souffle chaud sur sa nuque. Des lèvres qui effleurent sa peau. Un léger halètement dans la voix de l'inconnu qui lui chuchote : "Bienvenue dans le monde fabuleux du magicien d'Oz."
Tu es ma princesse et je veillerai toujours sur toi. Il suffit que tu aies confiance en moi. Tu entends ? Aie confiance… Aie confiance… Aie confiance… »
Elle sent tout près d’elle la présence de l’être qui lui parle. Elle ne parvient pas à le voir. La pièce est plongée dans l’obscurité, en dehors des lumières émises par le poste de télévision. Le casque qui lui immobilise la tête l’empêche de se tourner. Elle sent un souffle chaud sur sa nuque. Des lèvres qui effleurent sa peau. Un léger halètement dans la voix de l’inconnu qui lui chuchote : « Bienvenue dans le monde fabuleux du Magicien d’Oz. »
- C'est pas un règlement de comptes entre clans, lieutenant Gallaway. La victime serait Richard Holstein.
Jim écarquilla les yeux.
- Le gauchiste qui se présente au Sénat ? J'y crois pas ! Il faudrait le décorer celui qui a fait la peau à ce rouge. Des infos ?
- T'excite pas ! File là-bas vérifier tout çà. L'appel vient de sa belle-fille, Jane Mc Leone, étudiante à l'université. Elle est dans tous ses états, et assez confuse.
- La petite Jane ? Elle a vu quelque chose, un suspect ?
- Non, le suspect, c'est elle....
- Pardon ?
- Elle s'accuse du meurtre de son beau-père.
Elle s'imaginait qu'au-dehors, le monde continuait à tourner. Sans elle. Cela ne la touchait pas, il avait toujours tourné sans elle. Plus exactement, c'était elle qui ne tournait pas rond.
- Raconte encore comment Peter Pan a enlevé les enfants en les emportant dans les airs !
C'était l'heure de dormir mais comme chaque soir, Elizabeth et Diana ne l'entendaient pas ainsi. Après s'être fait prier à table pour avaler leur soupe et leur porridge et avoir copieusement éclaboussé le sol de la salle de bains en se jetant le savon à la tête, elles avaient enfin consenti à enfiler leur pyjama. Rouge à pois blancs pour l'aînée, rose pour la cadette. Pour autant, elle avaient décidé qu'elles n'avaient pas sommeil et réclamaient une histoire pour faire durer un peu plus longtemps le plaisir. Angelica en avait l'habitude, elle avait droit chaque soir au même rituel. Elle ne s'en plaignait pas. Ces enfants débordaient de vitalité. Mais on était vendredi, le seul moment où elle pouvait sortir et se changer les idées en compagnie de ses amis.
Sanguine : famille de pigments aux tonalités qui vont de l’orange à l’ocre en passant par le marron. Extraits de l’hématite, ces pigments sont utilisés en peinture. Par extension, une sanguine qualifie un dessin au pastel, à l’eau ou au crayon à mine de plomb mélangés à ce pigment.
"Son client avait tenu à conserver l'anonymat et la réglerait en liquide. Officiellement, cette visite nocturne de l'Acropole n'aurait jamais eu lieu. Eleni avait revêtu une tunique blanche retenue par une ceinture dorée, les jambes nues et les pieds chaussés de sandales de cuir. Encore une exigence du client qui avait souhaité que la visite se déroule dans le contexte de l'époque, loin de toute modernité. Ma foi, si cela pouvait lui faire plaisir, avait pensé Eleni. Tant qu'il ne lui demandait pas de chanter, de jouer de la lyre ou de la cithare... "
Jane ne bougeait pas. Elle restait dans la même position, bien calée sur la chaise en alu, le dos droit, les deux mains posées sur la table. Cela faisait plus d’une heure qu’elle ne faisait rien d’autre qu’attendre, pareille à une statue sans vie. Elle avait l’habitude de ces pauses, quand le cours de l’existence s’interrompt soudain. Paradoxalement c’était dans cette inaction qu’elle avait le sentiment d’être vraiment elle-même.
La première chose qu’elle vit en ouvrant les yeux, ce fut un arbre. Un mélèze plus exactement. Elle regarda autour d’elle et s’aperçut qu’elle se trouvait dans un parc. Elle le reconnut aussitôt. C’était l’arboretum de l’université du Wisconsin, l’UW-Madison, au sud du lac Wingra. Elle y était déjà venue plusieurs fois. Tout lui était familier, les allées bien entretenues, les bancs sur lesquels les étudiants ou les couples d’amoureux venaient s’asseoir, les bouquets d’arbres aux branchages mollement agités par le vent. À travers les troncs fuselés comme des quenouilles, on pouvait distinguer le miroitement du lac Mendota. Oui, elle avait l’habitude de se promener dans le coin. Donc, rien d’étonnant à sa présence ici. Ce qui était plus ennuyeux, c’est qu’elle ne savait pas pourquoi elle se trouvait là. Et qu’elle était à près de trois kilomètres de chez elle…