C’EST UNE AUTRE ENDORMIE…
C’EST UNE AUTRE ENDORMIE qui toque au hublot. Dans Les Vagues, Virginia Woolf t’immerge, te perd délicieusement, te présente une sœur en flots enfouie, et ses frères.
L’image qui vient est celle de l’éventail ou du livre. Tous deux fermés au départ sur leur contenu. Qui s’ouvriront au fil des années en déployant leurs vérités.
La place de Clichy tangue sous la pluie, sa longue statue se dessine sous les milliers de gouttes des vitres de la brasserie Wepler. Tu te fais eau, profondeur, extinction.
Dans la nuit liquide palpite un corps autre que le tien, mollesse lourde à l’inertie fuyante, haleine glacée posée sur les fulgurances de l’adolescence, ciel à l’envers de la pluie.
Tu sais te fondre, te couler. Là où tu étais, tu sens un corps.
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TU L’AS ÉCRIT…
TU L’AS ÉCRIT ou cela s’est écrit à travers toi : au fond des mères.
Le lapsus ne t’est apparu qu’à la relecture.
Souvenir amusé de ta nièce racontant ses vacances à une camarade : on est allés au bord de l’eau. Eux ils appellent ça la mère.
Ta fascination pour les reportages sur les fonds sous-marins, les épaves.
Petit frère du fond des mers et de la mère, là d’où tu viens, tu t’en retournes. Une mer toute puissante possède ce pouvoir de vie et de mort, de ressac des existences ; une une symbiose marine, tu pactises avec les lycéens d’Ansan, exactement du même âge que toi.
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Le silence n’est plus un blanc sur une bande-son, mais un filet d’air submergé, un cri ravalé
Le 16 avril 2014, le ferry sud-coréen le Sewol fait naufrage, emportant définitivement avec lui trois-cent-quatre membres d’équipage et passagers, pour la plupart des lycéens faisant un voyage d’étude