– Le Mazet, c’est le village de ma Madeleine.
– Le maire ?
– C’est ça. Je dis « ma Madeleine », parce qu’on a fait la guerre ensemble et, crois-moi, on en a chié des ronds de chapeaux tous les deux, des geôles de la Gestapo au maquis de la résistance. On se doit la vie et elle est comme ma fille. Foi de Chico Balardino, Gitan de Moustiers, personne n’a le droit de lui manquer de respect ou de lui causer des ennuis. Ni à elle ni à son village. Si tu la croises, embrasse-la pour moi et dis-lui qu’on sera au bal du 14 Juillet, comme tous les ans. Pour jouer de la guitare, pas pour la bagarre, à moins que son fichu directeur nous cherche des poux dans la tête.
Qué bordille ! Pourquoi s’est-il laissé aller à jouer le fanfaron devant cet étranger ? Et puis est-ce que c’est seulement un bomian, ce type aux yeux bleus avec des cheveux blonds comme les blés ? C’est brun un manouche, non ? C’est bronzé comme un Maure, non ? Si ça se trouve, c’est rien qu’un Allemand resté de la guerre. Un de ceux qui brûlaient des Juifs et des Tziganes. Bon d’accord, les Juifs et les Tziganes, c’est aussi des étrangers, mais quand même !
Après tout, le bomian n’est qu’un bomian, justement, un rastaquouère, un romanichel. Un voleur qui ne doit sûrement pas se contenter de chaparder des poules.
C’est vrai qu’elle a la réputation d’avoir la cuisse facile, la Bouvet de Montfort. « Madeleine » pour ceux qui la connaissent bien, « la Mado », pour les irrespectueux et quand elle n’est pas là. Une langue agile et un fessier turbulent ajoutent les plus médisants.
Sous la blancheur d'une lune laiteuse, l'obscurité porte les bruits.
Le désir fleurit, la possession flétrit .
Compagnons de classe un jour, compagnons de chasse toujours .