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Citations de Christine Montalbetti (60)


Personnellement, les ronflements ne me gênent pas, ils m’encouragent même à dormir, je trouve qu’ils donnent l’exemple : leur enthousiasme bon enfant est une publicité spontanée pour les bienfaits du sommeil, dont ils ont l’air de vanter la plénitude béate, et je me sens plutôt bien dans leurs volutes affirmées et tranquilles.
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Une phrase, allons, une bonne petite phrase qui vous donne envie d’entrer dans cette histoire et de vous laisser emmener, une première phrase dont avec un peu de chance les autres ensuite découleront comme d’elles-mêmes, avec cette énergie joyeuse des phrases qui éclosent, ça ne devrait pas être bien sorcier ; mais ce n’est pas la peine de vous énerver, Simon n’y arrive pas.
(Incipit)
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Le plus difficile, alors, c'est l'attente.
On fait, du temps, toutes sortes d'expériences. Parfois, l'espace d'une journée vous paraît trop exigu pour tout ce que vous avez à y accomplir, un peu comme le coffre d'une voiture, où vous ne savez comment tout caser. Parfois, à l'inverse, les heures sont de gentilles choses molles, et vous êtes comme enveloppé(e) d'un édredon, à les laisser simplement passer, à regarder doucement changer la lumière (ah, ce temps élastique et distendu des journées oisives et libres, ce fond confortable et lent auquel vous adossez vos rêveries). Et puis parfois il y a, sur la ligne ordinaire du temps, un évènement prévu, à un horaire fixe, auquel il faut faire face.
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quant à ces pluies qu'on envisage, peut-être vaut-il mieux en courir le risque plutôt que tout reporter ?
La décision n'est pas facile à prendre.
Il y a une expression alors qui permet de dénouer tout : le risque raisonnable. Peut-on considérer qu'on en est là ? C'est le terme qu'ils emploient, ils commencent à parler de reasonable risk.
D'autant que les choses ont l'air de s'arranger. Vers 10h45, on penche nettement pour le go. [...]
Steve confirme, no constraint for launch, pas d'obstacle au lancement.
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Chassons ces idées, allons, observons plutôt la pluie qui tombe sur la vitre, plaquée par la vitesse, emmenée par son frottement. C’est toujours un peu surprenant, ce trajet presque horizontal alors des gouttes, les lignes que ça dessine, le sillage, vous visualisez, de chacune, qui avance en sinuant, qui se propulse, comme si elle avait une petite tête ronde et une queue, et, regardez-moi dans les yeux, en toute franchise, est-ce qu’on ne dirait pas des spermatozoïdes qui s’élancent à toute berzingue, vus au travers d’un microscope et nageant avec vivacité sur leur lame de verre ?
Derrière, le paysage raturé fait ce qu’il peut pour exister, campagne déserte, champs qui prennent l’eau, chemins de plus en plus boueux ; et puis une maison qui au milieu de toute cette nature donne l’impression d’être parfaitement solitaire, calme et tranquille, alors même que son contrechamp, c’est le train, plusieurs fois par jour, qui transporte des milliers de voyageurs dont les silhouettes s’aperçoivent depuis ses fenêtres – parmi lesquelles à cet instant, rapide, fugace et de profil, celle de notre Lila.
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Tout le paysage est comme filtré par la mémoire de mon après-midi au Love Hotel, dont je ne sais, au fond, ce qui me restera (certains souvenirs érotiques demeurent aigus bien des années plus tard, mais la plupart, je crois, se dissipent dans le savoir plus général que cela a eu lieu).
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Les voici donc face à nous, alignés d’un seul côté de la table rectangle, les quatre de la mission finale, eux dont le poster circule un peu partout avec ce titre, Final Mission, et puisque c’est la dernière fois qu’on envoie depuis l’Amérique une navette habitée. La dernière fois qu’un équipage s’assied derrière cette nappe, la dernière fois qu’on leur confectionne un gâteau tout exprès, et beaucoup de dernières fois encore que nous aurons l’occasion d’égrener.
Nos astronautes se restaurent, assis en rang d’oignons, et c’est le moment, je pense, de vous dire un petit mot sur chacun. Nous avons, dans le sens de la lecture, Rex, Doug, Fergie et Sandra – excusez-les, tous ont un peu des poches sous les yeux, à cette heure si matinale, avec cette petite nuit derrière eux, et la difficulté, on l’imagine, à dormir, comment voulez-vous, une veille de lancement.
Je vous les présente ?
À côté de Sandra, celui que tous appellent Fergie, c’est Christopher Ferguson, le commandant. Il va sur ses cinquante ans, cet été-là. Sandra le connaît peut-être encore mieux que les autres, parce qu’elle a déjà volé avec lui sur la mission STS-126. Fergie est né à Philadelphie, en Pennsylvanie, et si vous lui demandez comment il occupe son temps libre, il vous répondra qu’il aime faire du golf, et travailler le bois. Il joue également de la batterie, on y reviendra.
Doug Hurley, je continue, est le pilote. Le visage aussi rond que Fergie a le sien émacié, et de cinq ans son cadet, Doug est né à Endicott, dans l’État de New York (…) Le troisième Larron, c’est Rex Walheim. Originaire de Redwood City, Californie, deuxième spécialiste de mission, il a deux ans de plus que Sandra, et deux fils adolescents. Dans la catégorie hobbies, il déclare la randonnée, le ski et le football américain, celui qu’on joue momifié de bandelettes, corseté de plastique et bardé de protections des genoux et autres coudières, sans compter ces énormes épaulières, vous savez, nouées à hauteur du sternum, et le visage pris dans un casque grillé.
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C'est une chose qui peut arriver, je crois, qu'au moment même où on se remémore un bonheur intense qui s'est mué plus tard en catastrophe, la sensation de ce bonheur soit capable de vous innerver encore bizarrement, comme si on parvenait, en se concentrant, et malgré le savoir du chagrin immense qui avait suivi, à en revivre l'émotion.
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L'automne arrive. Les feuilles commencent de sécher sur les arbres et de se racornir, et puis quand plus rien ne les retient, elles se décrochent, elles renoncent. Toi, cette agonie des feuilles, ça fait un bail que tu la vois se reproduire, c'est ton soixante-dix-huitième automne. Mais cette fois, est-ce qu'elles ne te tiennent pas un bien triste discours ? Tu en as vu tomber pourtant, tu en as piétiné, de ces feuilles rougeaudes, et tu continues, cette année-là. Ça volette autour de toi, ça chute des branches, et dans les allées le vent parfois les soulève, les déplace, comme le font aussi tes pas. Ça craquette, c'est le bruit que ça fait, de marcher dans l'automne, au milieu de tout ce dépouillement progressif ; et je ne sais pas si c'est une chose à laquelle on s'habitue, toute cette nature qui se délite à vue, ou si au contraire, une fois que son propre pas est devenu plus lent, son propre corps plus dolent, il n'y a pas un affolement croissant à voir ce désastre se reproduire.
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Et là, je mets cartes sur table. Deux solutions s'offrent à nous : les suivre ou rester avec Lila. Ah, le monde est un réseau inextricable de possibles, qui font autour de nous leur sarabande, et que nous assassinons finalement sans vergogne chaque fois que nous faisons un choix. Vous avez une préférence? p. 47
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Au bout d'un certain temps de solitude on est capable de comprendre des choses autour de soi qu'on ne comprend pas d'habitude.
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Ta présence flotte ici, un fantôme bénéfique et qui m'apaise. Cette affection inconsidérée qu'on peut ressentir pour des ancêtres qu'on n'a pas connus.
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Quand tu te penches au-dessus d'une fleur, que se passe-t-il en toi ? Tu recenses les éléments botaniques qui la composent, tu la vérifies dans le vent frais, tu l'examines comme la sage-femme compte les doigts du nouveau-né. Moi qui, posant les yeux sur les plantes, suis généralement incapable de les nommer (est-ce que tu m'en voudrais pour ça ?), moi qui suis devant la nature non pas à court de phrases (ça non, tu me verrais, chaque fois que je prends le train, sortir mon carnet pour décrire les paysages; tu serais étonné de l'effet que ça me fait, les boules de gui dans les baies d'arbres, la vivacité du colza, ce jaune inouï qui tranche parmi le patchwork des champs et de prés - j'utilise souvent le mot patchwork, quand je regarde la campagne depuis les trains)
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Au bout d'un moment oui, chez Moses, on était comme sur le point d'un navire, par gros grain. On oscillait, on avait un posé de talon un peu brusque, et le regard toujours qui fixait l'horizon - je ne sais quelle ligne chavirée par la houle, quel cap qu'envers et contre tout il fallait maintenir.
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Car est-ce que ce n’est pas ça, la lecture, une fête bizarre, la célébration étonnée des sentiments divers qui nous traversent, et qui ne sont pas tous heureux, loin de là ? Et le moment de l’écriture aussi, fête bizarre, car à sa façon la phrase, au moment où elle prend vie, en même temps la donne, elle a ce pouvoir de produire des mondes, elle procure cette joie puissante.
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Les gars, en un sens, leur vie, je réfléchissais dans la nuit froide et je me suis dit ça un soir, pour résumer (je me le dis encore parfois, allongé sur ce fauteuil devant la baie vitrée), c'était plutôt comme s'ils la lisaient que comme s'ils l'écrivaient. Comme s'ils en découvraient les péripéties une à une, à mesure qu'elles se produisaient, sans pouvoir rien y faire. C'était comme des choses qu'on avaient décidées pour eux, des choses auxquelles des genres de forces obscures travaillaient. Et ils pouvaient essayer d'utiliser toute la petite marge de manoeuvre qui leur restait, l'épisode suivant, ils se le prenaient chaque fois de plein fouet.
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Quand je pense à ton fils, et à combien ça m'a hantée, cette histoire du fils prodigue, je me dis qu'il vaut mieux peut-être que l'écriture des romans endosse seule cette charge des histoires confuses qu'on porte en soi sans savoir d'où elles viennent. Le roman avance dans la brume, il charrie tout ce qu'il peut prendre dans son cours, rivière étrange, fleuve gros d'alluvions (...); il brasse en les déplaçant ces traumatismes dont on hérite sans bien les comprendre, il les rejoue, il les magnifie à sa façon, il les exalte, il vous permet d'y rejouer les vôtres.
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Ils se précipitent vers toi. Une balle dans l'épaule, l'autre dans le thorax. Deux zones qui ne sont pas létales, dira le procureur. Je vérifie la définition de thorax. La zone comprend les poumns et le coeur. Pas létale ? Je ne sais pas.
On tente de te réanimer.
Est-ce que c'est ça, alors, la dernière image que tu vois, juste avant de t'évanouir tout à fait, celle du gendarme, le même peut-être qui t'ai tiré dessus, qui s'approche pour te faire un bouche-à-bouche, son visage à contre-jour devant le ciel normand ?
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(...) on restait seulement dans la fraîcheur de la nuit, chacun avec nos pensées, et moi à fumer, parce que c'est comme si d'inspirer, de tirer une bouffée, tout ce qui fuit, on voulait le retenir, je ne sais pas si ça vous fait ça aussi, le reprendre en soi, l'ingérer, le recueillir. Et puis, en expirant la fumée loin devant soi, tout cet éphémère, on le laisse filer, oui, mais avec le sentiment du moins qu'on y a goûté.
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Ce à quoi je pensais alors? Rien de bien distinct, je crois. C'était un tohu-bohu de sensations contraires, que je laissais me traverser, en attendant qu'elles s'épuisent d'elles-mêmes. Et s'il y avait là-dedans des bribes d'intuition de la suite, oui, sans doute, parfois, mais si mêlées au reste qu'elles devaient se perdre dans la foule des idées incertaines qui profitaient de mon ivresse pour m'assaillir en vrac.
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