A l'occasion de la parution de 'Le Livre d'une langue' (Editions du Patrimoine), l'autrice et académicienne Barbara Cassin nous présente en quelques mots son livre, à travers la critique d'une lectrice Babelio.
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Le discours politique n'a jamais été obligé de dire la vérité.
Interview sur la chaine RT France (la grande interview à 8'05'' environ) sur le lien suivant : https://francais.rt.com/magazines/la-grande-interview/60203-jean-marc-sylvestre-barbara-cassin
… la langue n’est pas seulement un moyen de communication, elle est porteuse d’une culture et d’une vision singulière du monde. Une langue n’est pas une façon différente de désigner les mêmes choses, c’est un point de vue différent sur ces choses. Prenez un mot tout simple, comme « bonjour » (bonne journée). Il ne dit pas exactement la même chose que le grec khaire (réjouis-toi, jouis), le latin vale (porte-toi bien), l’hébreu chalom ou l’arabe saalam (va en paix)… Appréhender cette diversité, c’est contribuer à préserver la richesse de la pensée.
Chaque langue est une vision du monde, et c'est la traduction qui fait communiquer ces mondes.
C'est à partir du regard de l'autre qu'on devient ce qu'on est. C'est le regard de l'autre, admiré ou aimé, qui fait éclore un possible, qu'on aurait ignoré autrement.
"Il s'agit de saisir le Kaïros par les cheveux et de se laisser aller."
Pour moi, le,mensonge est un art de combat, et c'est pour ça que je ne me dis pas philosophe, je suis plutôt une philosophe avec un point d'interrogation, je suis une philosophe tremblante, et pas du tout sûre de l'être.
Donc, je n'aime pas l'Un. C'est de là que me viennent mes rapports étranges à la vérité : je ne crois pas à la vérité, je crois davantage au mensonge, parce que là, il y a le choix.
Le français est, comme toutes les langues, une langue "impure" - composite, métissée. Qu'est-ce que le français, sinon un créole latin à base celtique, enrichi par les langues germaniques, et qui n'a cessé de puiser des mots dans toutes les langues du monde ? Et de leur en donner aussi.
page 121
[…] je crois que le mot travaille la chose, le fait être d’une certaine manière. Prenons khaire, le mot grec qu’on utilise pour saluer. Il ne signifie pas du tout bonjour, ni good morning ou welcome, il veut dire très littéralement « jouis, prends plaisir, réjouis-toi ». Quand on se salue dans cette langue, on ne dit pas « passe une bonne journée » ou « que le jour soit bon », on dit « jouis », ce n’est pas pareil ! C’est un monde qui se dessine là. Quand un Latin rencontre ou quitte un autre Latin, il lui dit : Vale, « porte toi bien », « sois en bonne santé ». C’est encore un autre monde. Quand on dit « bonjour » en hébreu ou en arabe, on dit shalom, salam, « que la paix soit avec toi ». Le monde s’ouvre de manière complètement différente selon la langue, si l’on vous dit « passe une bonne journée », « jouis » « porte-toi bien », ou « la paix soit avec toi ».
Aujourd’hui, lorsqu’on écrit une phrase dans Google et qu’on demande à Google-translate de la traduire, on obtient souvent des résultats très étranges. Par exemple, cette phrase de la Bible : « Et Dieu créa l’homme à son image ». J’ai demandé à Google de la traduire en allemand, puis je lui ai demandé de retraduire la phrase allemande en français, et à la fin de l’opération, quand le résultat est stabilisé, cela donne : « Et l’homme créa Dieu à son image » !