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Critique de Chikitalit


Max et les Maximonstres c'est l'histoire d'un petit garçon qui fait des bêtises. Trop de bêtises. Alors il est puni par maman. Qui l'envoie dans sa chambre. Et là, une gigantesque forêt envahit la pièce familière pour la transformer en jungle. C'est le début d'une grande aventure au pays des monstres…

Il y a au moins trois choses qui font de cet album un objet fantastique.

D'abord, une construction particulière

19 doubles pages. Sur les premières le texte est à gauche et l'image à droite au milieu de la page. Puis au fur et à mesure que l'on tourne les pages et que l'excitation de Max grandit, l'image envahit la page de droite, déborde sur celle de gauche, et finit par “écraser” le texte en ne lui laissant qu'un bandeau de plus en plus fin en bas de la double page (3 lignes / 2 lignes / 1 ligne). Au sommet de l'excitation, pendant la fête “épouvantable” que Max et les monstres organisent, le texte disparaît au profit de l'image (3 doubles pages).

Puis Max décrète que ça suffit. le bandeau revient, de plus en plus large, avec un texte de plus en plus fourni (3 lignes / 4 lignes ). Et finalement le texte finit par avoir le dessus total sur l'image en deux doubles pages. (Bien plus vite donc que quand il avait disparu.) Sur la dernière double page il n'y a que deux mots entre tirets ” – tout chaud- ” et plus aucune illustration.

Cette construction narrative n'est pas gratuite. C'est la bataille que mène Max contre ses monstres.

Une symbolique forte

Le texte ici, c'est la raison. L'image, la pulsion enfantine. Une pulsion sauvage (le titre original, tellement beau, y fait d'ailleurs allusion : Where the Wild Things Are), incontrôlable. Qui pousse nos tout petits à courir partout, à crier, à tempêter, à hurler, à désobéir. Toutes ces choses normales tant qu'un cerveau humain est immature. D'ailleurs tout le monde le sait. L'âge de raison c'est 7 ans. Quand on comprend le bien, le mal et la conséquence de ses actes. Avant ça l'enfance, c'est le Far West.

Et bien l'histoire de Maurice Sendak, c'est exactement ça. En direct et pour toujours. C'est ce moment-là, précisément, qui est fixé sur le papier, quand un jeune enfant, encore innocent mais déjà sauvage (disons un loup blanc 😉 ) fait cet effort pour la première fois. Quand tout seul, sans l'aide d'un adulte, pour la première fois, il se dit stop. Quand pour la toute première fois, il se raisonne, se calme. Et qu'il fait un pas vers la société des Hommes. Et ce premier pas (si grand pour lui, si petit pour nous), nous l'avons tous fait.

Il résulte d'un choix. D'un renoncement. C'est renoncer à la toute-puissance (les Maximonstres ont reconnu Max comme leur roi, rappelons-le) pour grandir enfin et sortir du territoire furieux de la petite enfance.

Je crois honnêtement que personne d'autre que Maurice Sendak n'a su capter ce moment aussi justement dans un album jeunesse. (Peut-être faut-il me détromper à ce sujet...)

Un texte magnifique

Et puis bien sûr, Max et les Maximonstres ne serait pas ce qu'il est sans cette écriture. Au plus près des enfants, avec une économie de mots, et une telle justesse dans le sentiment enfantin, Maurice Sendak leur parle de ce qu'ils sont, de ce qu'est la petite enfance, ce temps où il est normal de manger sa mère (littéralement, avant de se tourner vers un autre type de nourriture). Où il est normal qu'un voyage prenne quelques heures et quelques années en même temps et où la terreur, l'épouvante et les monstres côtoient les joies, les bonheurs et les figures aimantes.
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