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Critique de hcdahlem


«La malédiction de l'espoir»

Voilà un premier roman qui fera date ! En entremêlant des parcours très différents, Renaud Rodier réussit une vaste fresque pleine de bruit et de fureur, mais aussi de résilience et d'humanité. Dans leur quête, les personnages vont se croiser et s'enrichir de leur confrontation.

Voilà sans conteste l'un des romans les plus aboutis de cette rentrée. Après un prologue un peu déroutant – la confession d'un homme qui court sur un pont qui n'a pas de fin – on va découvrir les différents personnages au fil des chapitres, à commencer par Lauren Bairnsfather.
Née à Kiowa, un trou perdu du Kansas, la jeune fille va mener une vie solitaire, perchée dans la cabane sur un arbre construite par son quincailler de père, qui passe le plus clair de son temps à bricoler dans son garage. Avec son voisin Kip, tout aussi secret qu'elle, ils vont connaître un parcours scolaire assez tourmenté, qui va culminer lors du bal de fin d'année, dont Lauren sera l'une des rares survivantes. Car c'est avec un fusil mitrailleur qu'un élève va se venger de toutes les humiliations et frustrations subies. Il va transformer la fête en un bain de sang. Lauren décide alors de partir pour New York.
Aaron Friedmann est quant à lui le descendant d'une famille juive de Vienne. Son grand père a échappé aux camps de la mort pour se réfugier à New York. Une histoire qu'il ne découvrira toutefois que bien des années plus tard, après la représentation de Brundibár au Metropolitan. Ce n'est en effet qu'en 1983, après avoir interprété un rôle dans cet opéra pour enfants écrit en 1942, et qui fut mis en scène dans le camp de Theresienstadt, qu'il pourra reconstituer le parcours de sa famille.
Émilie Ruelle est fille d'expats, passant de Rio à Caracas, avant d'atterrir à Mumbai en Inde. C'est là qu'elle fera la connaissance d'Aashakiran Yengde, ou plus simplement Aasha, une intouchable qui va devenir sa meilleure amie. Jusqu'au jour où elle est congédiée pour un vol de bijoux qu'elle n'a pas commis. En rupture de ban, Émilie part alors aussi à New York, plus précisément à l'Université de Columbia.
Quand Kip prend à son tour la parole, c'est pour nous donner sa version de l'histoire, et dévoiler ce que Lauren ignore.
Puis ce sera le tour d'Aasha de rétablir quelques vérités sur ses rapports avec son père, ses relations avec Émilie et sur le financement des ses études dans la prestigieuse Caltech.
Nathaniel Bridge vit pour sa part à Monterey en Californie avec son père Adam. Par un soir de tempête, ils recueillent Olivia, tombée en panne non loin de leur villa. La belle naufragée restera finalement sept ans aux côtés du scénariste et de son fils, avant que ce dernier ne quitte l'adolescence et la Californie pour la Juilliard School de New York.
Puis vient le tour de Harry Bairnsfather de dévoiler un secret de famille, après avoir raconté sa rencontre avec sa femme Becky. Et souligner, pour l'ancien Marine revenu du Vietnam en pièces, que «le mariage, encore plus que la guerre, lui a enseigné que les mensonges sont parfois plus utiles à la survie que la vérité.»
Dans la seconde partie du livre, comme vous vous en doutez, l'auteur va faire se croiser les différents personnages. Émilie va entrer dans la vie de Lauren, puis les deux nouvelles amies vont assister l'une après l'autre à une pièce de théâtre dans laquelle joue Nathaniel. Aaron quant à lui, croisera Lauren sur la grande-roue de Coney Island, ou plus exactement fera croire au hasard de cette rencontre. C'est aussi lui qui fera la connaissance d'Aasha dans les eaux du lac Baïkal. Mais arrêtons-là. Je vous laisse découvrir par vous-mêmes ces fils tissés entre les uns et les autres, cette habile construction romanesque qui permet de mieux cerner, page après page, la personnalité et la psychologie de personnages auxquels on s'attache très vite, notamment en raison de leurs failles et de leurs doutes.
Renaud Rodier a réussi une fresque d'une grande humanité qu'il a lui-même très joliment résumée : «L'histoire tournerait autour de quatre protagonistes, des antihéros esquintés par leur enfance, et de leur quête de l'âme soeur, cet «autre moi» fantasmé, seul à même de les arracher à leur spleen. Une sorte de quête baudelairienne, où l'Idéal et le Beau seraient incarnés par une figure distante et fugitive qui manifesterait ce gouffre croissant entre ce qu'ils étaient et ce qu'ils auraient été capables d'être, la malédiction de l'espoir.»
NB. Tout d'abord, un grand merci pour m'avoir lu jusqu'ici! Sur mon blog vous pourrez, outre cette chronique, découvrir les premières pages du livre. Vous découvrirez aussi mon «Grand Guide de la rentrée littéraire 2024». Enfin, en vous y abonnant, vous serez informé de la parution de toutes mes chroniques.

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