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Critique de raton-liseur


Cela faisait longtemps que je n'avais pas été aussi émue par un livre, à en pleurer. Ce livre, le premier d'une autrice dont je ne sais rien, est un vrai petit bijou. Il raconte, à la première personne, quelques mois de la vie d'Aya, une jeune syrienne d'une douzaine d'années qui a fui son pays avec sa mère et son petit frère (son père et son grand frère sont déjà en France). L'histoire commence à leur arrivée dans un camp en Grèce, et suit Aya alors qu'elle découvre ce camp et essaie de comprendre comment y vivre, elle qui pense n'y passer que quelques jours, ignorante qu'elle est de la toute puissance de la bureaucratie internationale.
On apprend avec elle la vie dans un camp : les distributions alimentaires régulières et monotones, les sanitaires communs, la tente impersonnelles aux lits inconfortables et aux couvertures qui grattent. On voit aussi les jours qui s'éternisent, l'ennui qui s'installe. Mais ce livre n'est pas seulement une description d'un camp de réfugié, et c'est cela qui rend cette histoire tellement accessible et les personnages tellement proches malgré l'histoire compliquée qu'ils ont vécus. J'ai beaucoup aimé voir Aya grandir pendant ces quelques mois. Alice Riché n'oublie pas que, quelque soient les conditions, sa petite héroïne a douze ans, qu'elle entre dans l'adolescence, et c'est intéressant de la voir évoluer, commencer à remettre en question ce que sa mère lui enseigne, se mettre à faire ses propres expériences, lui mentir aussi, gagner peu à peu une indépendance de mouvement et d'esprit. Mais dans le même temps, on voit la mère d'Aya s'éteindre, elle qui était une mère attentive, toujours à raconter des histoires pour changer les idées de ses enfants, toujours à essayer de tirer le meilleur parti possible de la nourriture qui leur est distribuée (dont cet espèce de fromage étrange et trop salé…)… Mais peu à peu elle se met à ne plus cuisiner, à ne plus mettre un point d'honneur à ce que sa tente soit nette et sans poussière, à se mettre en colère pour ce qui aurait avant été une broutille. Tout cela est juste évoqué, et prend moins de mots dans le livre que je n'en utilise pour l'écrire ici, mais c'est aussi cette réalité des camps qui est dépeinte. Un camp n'est pas qu'une rangée de tentes et une distribution de nourriture quotidienne, c'est aussi des filles qui grandissent , des familles qui essayent de rester soudées malgré l'incertitude, l'attente interminable, l'ennui.
C'est un livre qui respire l'authentique, avec un cadre qui est certes un peu édulcoré pour que cela reste un livre pour enfant, et des personnages avec lesquels une vraie empathie est possible. Je n'ai rien dit de l'histoire de ce livre, je n'ai parlé que de ce qu'il y a autour, mais c'est là qu'est pour moi tout l'intérêt et le charme de ce roman. L'histoire n'est finalement pas si importante que cela, elle n'est pour moi qu'un prétexte, qu'un moteur pour faire progresser l'histoire et les personnages, qui eux sont la raison principale de ce roman. Alors j'ai bien quelques toutes petites réserves, deux en fait : je suis assez étonnée de l'absence d'école dans ces camps, il me semblait que cela faisait partie des services mis en place de façon standard dans ces camps mais je me trompe peut-être ; et puis il n'est jamais indiqué comment la mère d'Aya arrive à se procurer un tout petit peu d'argent qui lui permet d'acheter des oignons pour agrémenter ses plats ou un tout petit cadeau pour sa fille. C'est resté pour moi une question qui est restée en suspens. Mais cela ne sont que des détails au vu de ce qu'est ce roman, qui dit avec un ton adapté aux jeunes adolescents ce que peut être la vie d'autres adolescents qui se retrouvent dans des conditions difficiles à imaginer pour nous, mais qui demeurent des adolescents avant tout, avides de vivre et de grandir. Un superbe roman pour les enfants de douze ou quatorze ans, une nouvelle autrice jeunesse qui, je l'espère, rencontrera le succès que mérite Aya et qui nous donnera à lire d'autres histoires aussi pleines d'émotion et d'empathie.

Un très grand merci aux éditions Thierry Magnier de m'avoir permis de découvrir ce livre, via netgalley.
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