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Critique de Levant


A ceux qui vivent dans l'oubli du monde, l'indifférence absolue, à ceux-là il ne reste pour glaner une once de considération qu'à espérer une maigre pensée de la part de leur fossoyeur. Le seul qui pourrait alors leur souhaiter la paix dans le repos éternel. Eux qui auront vécu dans un pays où le mot amour n'existe pas.

C'est à ce stade de désespoir que sont parvenues Yeonmi Park et sa mère lorsqu'elles s'engagent dans le désert de Gobi pour rejoindre la Mongolie. A ne compter plus que sur les étoiles pour guider leurs pas. Seront-elles ces amies qui leur porteront un peu d'intérêt.

Dans le système nord coréen, les individus n'existent pas. Les imaginer comme prisonniers ou comme otages, c'est encore leur donner de la valeur. Dans le système nord coréen les individus sont devenus des objets voués au culte de leur tortionnaire.

À qui n'a pas connu la faim, la hantise d'être dénoncé, quand "même les souris et les oiseaux vous écoutent", à qui n'a pas connu la privation de liberté quand le seul tort est celui d'être né au-delà d'une limite tracée par les hommes, à celui-là il faut dire lisez cet ouvrage : Je voulais juste vivre de Yeonmi Park.

Franchir la frontière pour s'échapper de la Corée du Nord ne donnait pas pour autant la liberté à Yeonmi et sa mère. Cela leur donnait le droit d'être vendues, violées, et la hantise d'être renvoyées en enfer. Que de force de caractère et de fol espoir d'un lendemain meilleur il a fallu à une personne encore immature, mais déjà déterminée à ne plus endurer la faim et la négation de la personnalité, pour accepter de devenir une valeur marchande.

Et au bout du périple, une vie à commencer. Avec pour premier défi celui de gommer aux yeux des autres le handicap de naître au monde à quinze ans. Car d'enfance, Yeonmi a été privée. L'enfance c'est la période du rêve. En Corée du Nord, le rêve est comme l'amour, absent du vocabulaire.

Dans le concert des nations, il s'en trouvera pour serrer la main de celui qui engage des sommes faramineuses pour doter son pays de l'arme nucléaire, alors que les êtres qu'il retient entre ses frontières meurent de privation. La raison d'état est déraison quand elle rabaisse l'homme.

Un ouvrage qui a le mérite de sortir les Nord-Coréens de l'indifférence à défaut de les extirper des griffes de la folie. Car ils sont encore des millions à ne rêver ni espérer de liberté.

Un ouvrage édifiant.
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