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Critique de Belier92


Pour apprécier L'art de lier les êtres, il faut s'intéresser aux questions de la folie, et de la psychiatrie. C'est le minimum requis pour goûter une telle lecture.
Paolo Milone est un psychiatre génois, retraité depuis quelques années. Son livre est présenté comme un roman. Étrange roman, qui lorsqu'on le feuillette ressemblerait plutôt à un recueil de poésies. Et les petits textes qui le composent, autant de descriptions de patients et de leurs troubles, de récits d'interventions à leur domicile ou dans le service d'urgence de l'hôpital, ponctués de réflexions parfois acerbes sur les collègues de travail du narrateur ou de ses conseils aux jeunes interne et psychologue qui oeuvrent à ses côtés, constituent un panorama très juste de ce qu'est la pratique de la psychiatrie dans un service fermé, ici le Service 77, avec ses malades très malades, souvent agités, et qu'il faut parfois attacher pour contenir ce qui les déborde et rend impossible, à certains moments, toute communication verbale avec eux.
L'auteur aborde d'autres thèmes importants : la dangerosité, le suicide, les limites de la psychanalyse, mais aussi l'attirance mutuelle parfois entre le thérapeute et certaines de ses patientes. Heureusement Anna, sa fidèle épouse, est là pour ramener son psychiatre de mari à la réalité lorsqu'il s'égare, ce qui n'est pas si rare, avec un tel métier.
Ce service 77 a bien sûr ses équivalents en France, la folie n'ayant pas de frontières. Et, comme en France, la psychiatrie semble être le parent pauvre de la médecine en Italie. Comme en France, des lits, des services entiers sont fermés chaque jour ou presque, sans rien pour les remplacer… Et c'est là, en décrivant un hôpital lui aussi malade et de plus en plus inadapté aux besoins de notre société, que L'art de lier les êtres prend une dimension politique. Poésie, psychiatrie et politique… Curieux mélange, mais qui prend, dans ce livre puissant, forme d'évidence : peut-être n'est-il pas trop tard pour oublier considérations comptables et impossibles procédures, et retrouver dans la dispensation de soins un peu d'humanité, simplement un peu d'humanité. Mais encore faut-il en avoir les moyens, et que ceux qui les attribuent en perçoivent l'ardente nécessité. Ce précieux livre peut y contribuer.
Léo Cairn.
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