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Critique de afriqueah


Brillamment, l'écriture de Laurent Mauvinier se déroule, lyrique avec des phrases longues, puis sèche avec des phrases pas terminées.
Mauvignier écrit non pas en se calquant sur le langage parlé, mais en choisissant de ne pas dire ce qui est inutile. « un miracle a eu lieu, et c'est elle, là, qui est venue vers lui, elle dont il s' étonne de ce qu'elle peut bien lui trouver de si, de tellement, enfin de, il ne comprend pas, il ne voit pas, mais bon, tant mieux, seulement tant mieux ».
Dans un monde de paysans pauvres du Nord de la France, qui parlent des bicots et des négros sans en avoir jamais vu un seul, une réunion de famille se trouve être le révélateur d'un racisme de la part du plus pauvre, Bernard, presque clochard. Puis l'incident arrive, et les langues se délient, son cousin rappelle le jour où Bernard avait traité sa soeur mourante de salope, les souvenirs remontent et c'est tout l'art de Mauvinier de nous faire assister à cette lente remontée pleine de questions sur le passé. Nous cherchons, au fil des pages à comprendre pourquoi ce Bernard soulève tant de questions, ce qui a pu se passer pour qu'il soit raciste de façon si bête et si inacceptable:
« Et lui il peut être là. Lui, le.
Arrête.
Le bougnoule ».
Et le souvenir de la guerre d'Algérie arrive, la « pacification », qui commence par l'intrusion dans un village où les recrutés français cherchent les hommes, et ne trouvent que femmes, enfants et vieillards. Ils sont où les hommes ?
Personne ne trouve les hommes.
Ces recrues qui n'ont rien choisi voudraient bien s'opposer à une résistance, trouver ces fameux fellahs qu'ils ont la mission d'achever, mais rien, que le silence des civils, parfois un meurtre horrible et le silence alentour. Ils voudraient bien finir, rentrer enfin chez eux au lieu d'être obligés de vivre cette parodie de guerre sans combat et sans ennemi déclaré. La destruction des villages continue donc, à la recherche des hommes. En repensant au meurtre d'un médecin, un des protagonistes (là dessus, je n'ai pas du tout compris qui parlait) se demande quel genre d'homme il faut être pour en arriver à cette ignominie: « pas des hommes qui font ça. Et pourtant. Des hommes. Il se dit pourtant parfois que lui ce serait un fellaga ». A la guerre il n'y a pas de type bien, tu es obligé de tuer et de détruire, tu n'es qu'un homme.
Et Mauvignier, par l'intermédiaire d'un de ses personnages, Rabut, ou Fevrier,( ?) se pose la question du pourquoi de la violence absolue, le meurtre sans pitié, sans rien d'humain, mutiler à coups de hache une famille algérienne innocente, fait très certainement par un harki lui aussi déboussolé. Ils se trouvent tous ces jeunes appelés comme dans un entonnoir, et décident d'arrêter de parler des fells, et de parler de bougnoules ou de moricauds, « on avait décidé que c'était pas des hommes ».
Mauvaise réponse à une bonne question et conclusion selon moi un peu ratée de ce livre qui n'en finit pas, pour exposer le racisme sans pourtant l'expliquer. Des jeunes, sans formation, jetés sans rien comprendre dans un conflit qui les dépasse, incapables de comprendre pourquoi on les oblige à y participer. La bonne question, c'est sur l'inanité de cette pacification qui a cassé tant de jeunes et leur ont même insufflé le racisme. La mauvaise réponse, c'est que l'on ne comprend pas vraiment ce qui a pu précipiter ces jeunes paysans dans le racisme. Car, de Bernard, et des raisons de son accès de fureur contre le « bougnoule », on ne sait rien, Ou alors je n'ai pas compris. Autant Mauvinier est un grand écrivain, avec un phrasé particulier et remarquable, autant son histoire ne tient pas debout. Et même, l'idée m'est venue que son écriture était remplie de tics de langage. Comme une particularité qui lui faisait faire l'économie d'écrire une vraie histoire. Je sais, c'est pas gentil ce que j'écris.
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