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Critique de lilylitblog


Tal Madesta part de sa propre expérience de rejet d'une sexualité vécue comme une accumulation, une consommation, une quête effrénée qui dans son cas aurait pour objectif une reconnexion à son propre corps, jamais atteinte par ce biais. Au contraire, l'expérience des relations sexuelles partagées opère comme une forme de dissociation et se révèle plus douloureuse qu'autre chose. D'emblée, la réflexion se construit sur un paradoxe : d'un côté, la dénonciation d'une pathologisation des corps non-désirants, d'une mise sous contrôle, y compris médical, par une société dans laquelle la sexualité est perçue comme universellement souhaitable (du moins dans le champ de l'hétérosexualité) et signe d'une bonne santé ; de l'autre, le récit d'une histoire personnelle marquée par des violences intra-familiales dès l'enfance qui ont contribué à construire un rapport au corps douloureux et complexe. de cette contradiction entre évidente souffrance personnelle qui nuit à la possibilité d'épanouissement sexuel et refus de considérer les corps non-désirants comme cassés et à soigner, l'auteur ne sort jamais.

Finalement, sa posture est celle d'un rejet de l'analyse des parcours singuliers, au moins dans toute sa première partie, y compris ceux des personnes asexuelles, qu'il exclut du champ de son propos. Car celui-ci est éminemment politique, et plus clairement anticapitaliste. Ce n'est pas un hasard que le terme « prix » figure dans le titre de l'ouvrage : la partie la plus intéressante du livre est probablement celle où l'auteur s'appuie sur des études pour démontrer le poids d'un marché en cours de conquête autour de l'idéal d'une sexualité épanouissante : coachs, sexologues, magazines, sextoys, sites de rencontre etc. Il démontre que l'incitation à la sexualité est un des avatars de la domination patriarcale et capitaliste qui fait du couple hétérosexuel et de la cellule de la famille nucléaire des objectifs et des normes, rejetant le potentiel échec sur le dos des individus eux-mêmes qui ne feraient pas assez d'efforts pour les atteindre. Et donc, devraient employer du temps, de l'argent et de l'énergie dans cette quête.

Dans la deuxième partie, il est question d'évacuer ces normes, de changer de paradigme et d'objectif pour mettre son énergie dans la construction d'autres types de liens, non-définis par l'existence d'une sexualité partagée : construction de familles alternatives, importance des amitiés. Si l'on regrette que certains exemples historiques ne soient pas approfondis, tels que ceux des béguines ou des bostoniennes, l'auteur préfère donner la parole à certain(e)s de ses ami(e)s, issu(e)s de la communauté LGBT+, et retrouve alors l'intérêt pour les parcours singuliers qui étaient évacués de la première moitié du livre. Mais en excluant totalement les personnes cishétérosexuelles du champ de sa réflexion, l'auteur est paradoxalement limitant, et on peut reprocher au texte de ne pas aller bien loin. Il manque une plus grande richesse et diversité de témoignages, une analyse plus détaillée des perspectives proposées pour vraiment donner au livre un intérêt et une portée au-delà de la dénonciation, toujours bienvenue, du système dans lequel nous vivons.

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